samedi 30 juillet 2011

QUATRE (4) CENT-HUIT (8)



Ça y est! Vous en avez un devant vos yeux. Celui-ci (petit crapaud) n'est pas le plus petit mais le deuxième plus petit. Je continue, caméra en main, à chercher les autres et vous les présenter.

Les crapauds autour de la maison ne sont pas comme les chats. En effet, aux crapauds s'ajoutent trois (3) chats: LA VOLEUSE, GARÇON et LA NARVEUSE. C'est d'abord LA VOLEUSE qui s'est présenté sur mon balcon arrière. Par la suite, GARÇON - Éthan l'a appelé ainsi - et finalement LA NARVEUSE, un soir. On dirait qu'en campagne les chats ont une autre attitude face à la vie et face aux gens. En ville, c'est la ruelle qui représente leur royaume. En campagne, ils semblent de passage, s'arrêtent le temps d'un repas puis repartent. GARÇON, des trois, a conservé cette routine. Le matin, c'est nouveau d'aujourd'hui, bien étendu sur la chaise il attendait le déjeuner. Le soir, à l'heure du souper, il vient en plus chercher quelques caresses.

Je ne suis pas un amateur d'animaux mais d'observer leur comportement qui dans le cas de ceux-ci ressemble à une recherche d'amour me fait plus... ouvert. Sauf que les chats resteront, tout comme les crapauds, à l'extérieur; ne suis pas encore prêt à les voir se promener dans la maison. Un jour... peut-être. Est-ce que cet hiver alors que le froid imprimera dans les yeux de GARÇON comme une requête à le sauver du blizzard, est-ce que?? On verra.

Nous arrivons à la fin de juillet. Agota Kristoff (Le Grand Cahier) est décédée. Jack Layton doit combattre un autre cancer. Et je lis COMMENT DEVENIR UN MONSTRE de Jean Barbe.

Il fait toujours en campagne ce petit vent délicieux, celui qui entre par ma fenêtre de nuit et m'amène à dire que l'air pur de la campagne n'a dont rien à voir avec celui de Montréal. Est-ce possible de passer aussi rapidement de l'un à l'autre? De se désintoxiquer aussi vite? La suite des événements nous le dira...

Je vous offre un poème purement... issu de la campagne. Tout comme celui de l'ange. J'espère qu'il vous plaira.



rhapsodie manuelle


la main ne retrouve plus l’espace perdu
derrière la porte elle écoute Mahler
solitude couleur vanille et sable

une main tendue à perte d’espace
devant la moustiquaire étoilée pleure Mendelshon
tristesse couleur d’odeurs balnéaires

cette main recherche l’espace du temps des musiques
accroche opus et köchel au bout des doigts
des violons Paganini, des pianos Liszt



la main telle une harpe déployée
sur les vagues Debussy siffle
de longs et profonds crescendos

une main suspendue comme une ombre aux arbres
relance au fond des espaces musicaux
un Mozart léger, un Beethoven souffrant

cette main qui court sur les notes d’été
chez Bartok, puis Saint-Saens, s’arrête
soupire une sérénade ruisselante de frissons

Au prochain saut

lundi 25 juillet 2011

QUATRE (4) CENT-SEPT (07)



Paul Valéry - on ne le cite pas très souvent celui-ci - dit qu'«un ange ne diffère du démon que par une réflexion qui ne s'est pas encore présentée à lui.»


Notre ami ROBERT ouvre trois portes. Par la première, la plus utilisée, il dit qu'il s'agit d'un être spirituel intermédiaire entre Dieu et les hommes, un ministre des volontés divines. La deuxième, plus à la hauteur des hommes, parle d'une personne parfaite, utilisée comme terme d'affection. La troisième, assez rare, pour nommer un grand poisson de mer.

De mon côté, et nonobstant ce que j'ai déjà écrit ici sur les anges, je serais porté à associer ce concept à celui des signes. Le poème que je vous offre aujourd'hui - un ange a passé - ira dans ce sens. Un signe - combien de fois ne les remarquons-nous pas - et si oui, ne les décodons qu'une fois le message transformé en réalité. Cet avant-coureur innocent, je le vois transporté par un messager qui ne réfère absolument pas à Dieu ou ses semblables. Hermès de cette espèce de réalité située entre le réel et le non-réel: l'entre-réalité. Belle idée, n'est-ce-pas? Vous souhaiteriez que j'aille un peu plus loin? Tentons...

Dans le réel, les anges n'existent pas sauf lorsqu'on utilise le terme afin de l'associer à l'affection.

Dans le non-réel, les anges peuvent exister puisque même le non-réel le pourrait. Leur rôle de baladeur frénétique rappelle aux gens ceci ou cela, ce ceci/cela étant puisé à l'ésotérisme ou aux choses religieuses qui nous sont déjà connues ou du moins dont on a entendu parler. L'environnement non-réel nécessite les anges afin de diffuser ces idées qui exigent au préalable un acte de foi ou un acte d'intense croyance.

Dans l'entre-réel, on devient pro-actif. Un signe se décroche de quelque part, un peu comme une île de glace quittant le pôle. Il s'avance. La myopie humaine nous empêche souvent de le voir alors que nous ressentons tout de même sa présence. Une sorte de froideur, d'odeur ou de mouvement qui chacun, par son énergie propre, tente de nous transmettre quelque chose. Et le signe passe. On ne le remarque à peu près pas ou, au contraire, il nous secoue. Voici le champ d'intervention de l'ange. Selon sa force et son expérience il nous poursuit, pas très longtemps car c'est fugace un ange, et s'il nous nous attrape, il tente d'imprimer en nous... son message. Cette surprise nous saute au visage inopinément et nous tentons de la décoder à partir de gestes, de mots ou d'actions des autres qui s'agitent autour de nous. C'est lorsque la conscience intervient dans l'entre-réel que l'ange s'enfuit et que nous voilà aux prises avec cet avant-coureur du temps...

Pas si mal comme théorie. C'est d'ailleurs celle que je tente de rendre intelligible par la métaphore de la marionnette et du camelot qui dort au fond de mon disque dur depuis... trop d'années. J'ose espérer que cet automne, dans la nouvelle maison, le nouveau bureau de travail, j'espère que ça débloquera... enfin.

Alors voici ce poème.

un ange a passé

un ange a passé
papillon sur le bout des ailes d’un oiseau
se laissant bercer sous les nuages

triste, puis un ange passa
heureux je fus

un ange a passé
des étoiles auréolant sa tête
et ses yeux sont piqués de diamants

fatigué, puis un ange passa
reposé je fus

un ange a passé
sous la pluie fine marchait
et la plage s’est ensoleillé

triste, puis un ange passa
heureux je fus

un ange a passé
sa voix enrobée dans le miel
chantait des mots ignorés

fatigué, puis un ange passa
reposé je fus

un ange a passé
ses yeux grands comme la terre
lançaient des éclairs d’amour

triste, puis un ange passa
heureux je fus

un ange a passé
ses mains ont fait siffler le vent
et l’écho m’est parvenu

triste et fatigué j’étais
heureux et reposé je suis



Au prochain saut!

mardi 19 juillet 2011

QUATRE (4) CENT-SIX (06)



Vous admettrez avec moi qu'il y a tout de même un sacré bout de temps que le crapaud n'a exigé de vous... une certaine attention: celle de lire un passage ou deux provenant de mes cahiers de lecture. Alors aujourd'hui, en ce début de canicule*, l'effort - fort agréable admettons-le - sera de mise. Bon retour à nos petits plaisirs!



. ai ce besoin vital de vous écrire avec l'âme

au bout des doigts DANNY PLOURDE



. On peut endormir l'esprit de mille et une façons, lui faire tenir tous les paris, mais c'est le corps qui lance les dés et qui se réveille au milieu des rêves détruits. YVON RIVARD



. Mais en bas, ce n'est jamais comme d'en haut, et devant, ce ne sera plus comme derrière. MARC-ANDRÉ BROUILLETTE



. L'inquiétude, selon FERNANDO SAVATER, cela veut dire que la routine instinctivement apaisante - même embellie par des succès partiels - ne suffira jamais à nous permettre de continuer à vivre humainement. Être humain c'est chercher sans cesse et toujours la formule de la vie humaine.



... à vrai dire, qu'est-ce qu'une personne? Une succession de personnages qui se cherchent les uns les autres sans jamais se reconnaître tout à fait ! JEAN BÉDARD



. J'éprouvais aussi, devant que de parler, à quel point deux êtres, vivant somme toute de la même vie, et qui s'aiment, peuvent rester (ou devenir) l'un pour l'autre énigmatiques et emmurés; les paroles, dans ce cas, soit celles que nous adressons à l'autre, soit celles que l'autre nous adresse, sonnent plaintivement comme des coups de sonde pour nous avertir de la résistance de cette cloison séparatrice et qui, si l'on n'y veille, risque d'aller s'épaississant... ANDRÉ GIDE



. Des mots veillent, on ne sait où? Précèdent, naissent au bout de la langue. Des mots que l'on prononce parfois avant de les habiter. ANDRÉE CHEDID



Et il y a toujours en moi quelqu'un qui doute de l'amour qu'on dit lui porter... Dr OLIEVENSTEIN



. Demain n'arrive jamais mais le lendemain oui. NANCY HOUSTON



. Rester vivant, ça se mérite. JONATHAN LITTLE



. ... mieux vaut regarder le ciel que d'y être. C'est un endroit si vide, si vague. Juste l'endroit où se promène le tonnerre et où les choses disparaissent. TRUMAN CAPOTE



. La réalité n'est pas la vérité. ROBERT LALONDE



. La vie, c'est un embêtement, poursuivit Zorba; la mort, non. Vivre, sais-tu ce que ça veut dire? Défaire sa ceinture et chercher la bagarre. NIKOS KAZANTZAKI



. Du plus profond il faut que le plus haut à sa propre hauteur s'élève. NIETZSCHE



. C'était au reste un de ces hommes qui aiment assister à leur propre vie, considérant comme déplacée toute ambition de la vivre. On aura remarqué que ceux-là contemplent leur destin à la façon dont la plupart des autres contemplent une journée de pluie. ALESSANDRO BARICCO



. L'amitié qui les avait unis leur appartenait en commun, et aucun d'eux n'avait le droit de ruiner à jamais le bonheur de l'autre. ROGER PEYREFITTE



. Dans la vie, tout finit en histoire. FRANCIS CARCO



. La vie change dans l'instant. L'instant ordinaire. JOAN DIDION



. Il vaut mieux être blessé par la réalité que réconforté par un mensonge. KHALED HOSSEINI



. Les mondes que j'imagine sont peu habités. La foule se presse trop nombreuse, elle parle trop fort autour de moi. Alors il faut éclaircir la forêt, nettoyer le paysage. Quelques amis, quelques ennemis suffisent pour faire une vie. En dehors d'eux, la terre marche toute seule, les fleuves coulent, les téléphones sonnent dans le vide. PIERRE NEPVEU



. ... c'est le doute qui fait l'homme, pas la foi. C'est l'inquiétude, et non la croyance. L'épreuve du discernement, bien plus que les convictions. DIDIER van CAUWELAERT


*canicule: époque de grande chaleur (l'étoile de Sirius ou canicule se lève et se couche avec le Soleil du 22 juillet au 22 août).


Au prochain saut!

mardi 12 juillet 2011

QUATRE (4) CENT-CINQ (05)



Il en faut au moins un en juillet. Minimalement. Un saut et puis après on verra!

La main risque de s’ankyloser. Si facilement.

Même si ce n’était que pour dire la présence – symbolique peut-être – de trois ou quatre crapauds autour de la maison. Ils n’ont rien mais absolument rien à voir avec celui du parc Forillon; on ne me croit toujours pas alors que je raconte cette vision «batracienne/amphibienne» qui coassait à la lune dans un étang, y retourner je le retrouverais, tout près de la mer, face au parc Forillon.


Non, rien à voir, mais ils s’amusent à crapahuter ici et là. Souvent sous les plans de tomates ou encore du côté des grands pins; parfois devant, tout juste près de la souche qu’il faudra bien un jour enlever.


Nous sommes souvent portés à interpréter la vie animale à partir de références familiales : le père/la mère/les enfants. Dans le cas de mes crapauds de campagne, c’est la même chose. Le plus gros, sera pour notre compréhension, «la maman». Pas de papa. Et trois petits, dont un minuscule et deux moyens.


J’ai tenté à deux reprises de les prendre en photos. Ils n’ont pas collaboré. J’arrivais, l’appareil en main, et oups! disparus. Sans vous faire de promesses, j’essaierai une autre fois de les immortaliser sur pellicule électronique.


Mon frère me demandait si j’avais vu des écureuils dans mon nouvel environnement. Un seul. Une seule fois. Depuis, il a disparu. C’est à croire que maintenant je suis dans le bon étang!


Il n’y a pas que ces trois/quatre crapauds qui alimentent mes observations campagnardes. L’air. Mon ami Gérard, à qui je disais que mon dernier saut à Montréal fut pénible au niveau de l’odeur du vent, croit que je suis en désintoxication de CO2. Moi qui raffolait de tout ces gaz qui enveloppaient la métropole, maintenant – à peine trois mois plus tard – ne demande que cet air pur qui a su plonger un court instant dans la rivière au bout de la rue.


Oui : les crapauds, l’air et aussi les gens. Beaucoup les gens. Ciel! c’est à croire que je suis en train de vous raconter ma vie… Pourtant, la vie des autres c’est un sujet à roman ou à nouvelle… Deux mots alors. Un peu pour vous situer tout comme je l’ai fait alors que le blogue fut lancé en septembre 2005. Ce nouvel environnement de crapauds, d’air et de gens – ici, ce sont les filles, les petits-enfants, Claudette et Réal – ne peut se bien saisir sans que leur juxtaposition. Ça devient un tout. Voilà, je vous laisse deviner le reste…


En campagne – La Palisse dirait «on n’est pas en ville» - tout peut sembler différent. Le rythme de vie, le temps qui passe, l’organisation des journées. Le fait que le «voisinage» n’a pas la même signification. J’oubliais de vous parler que j’ai installé ma porte moustiquaire à l’entrée en avant. Ça vous décroche un courant d’air d’une pureté sans égal. Vous devriez voir et apprécier. Bon voilà, je reviens à mes… j’allais dire moutons alors que sans doute vous pensiez… crapauds.


Le goût d’écrire me revient. Il aura été précédé par un immense besoin de lire. Que doit-on faire lorsque lire ne fait plus partie de nos occupations quotidiennes? Une seule chose. Lire. Lire Gabrielle Roy. J’achève «La montagne secrète». Lire nos bons vieux classiques. Et Gabrielle Roy en fait partie.


Ensuite, ce sera Atiq Rahimi, «Maudit soit Doistoïevski».

En parallèle, Pablo Neruda, «Chant général». Pure merveille!

Vous vous doutiez bien que ça allait finir par un poème Celui que je vous offre aujourd’hui a été entrepris à Montréal, achevé en campagne. Avec tout mon cœur, le voici :

difficile à dire

difficile à dire s’il s’agissait de neige ou de pluie

que cette boue ramassée en flaque au milieu de la ruelle

le vent qui nuit et jour hante les clôtures a sa propre idée…

à partager avec la pleine lune lorsque celle-ci

exigeant l’alignement des étoiles, daignera

par ses mots livides nommer cet amalgame bizarre


… et les bruits semblaient venir de loin


difficile à dire s’il s’agira de pleurs ou de cris

dans l’inavoué de ces rencontres espérantes

celles que les siècles écrivent à l’encre de sang

pour continuellement les arracher du papier sauvage

comme des promesses d’angles morts aux intersections humaines

et se promèneront dos à dos sur des chemins obscurs


… et les bruits au loin semblaient se répercuter


difficile à dire si ces larmes diluées dans la neige ou dans la pluie

comme autant de silences contenus, retenus puis projetés

à même la hargne des oiseaux qui les picoreront… gelées

difficile à dire dans leurs mouvements microscopiques

le parcours ininterrompu d’une vie en pente descendante

abrupte comme ces pas amusés qui giclent sur la flaque


… et les bruits s’éteindront mouillés dans l’innommé

Au prochain saut

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