jeudi 22 octobre 2015

Trois jours plus tard...



                                                         … la poussière retombe tout doucement.

Nous sortons de la plus longue et certainement l’une des plus intéressantes campagnes électorales canadiennes depuis fort longtemps. Pourtant on ne nous l’annonçait pas ainsi, la prévoyant coûteuse, ennuyeuse et ne suscitant que fort peu d’intérêt de la part des électeurs à la grandeur du pays.

         … et la poussière retomba.

Les spécialistes, des politologues aux chroniqueurs des différents médias, analystes et sondeurs, tous s’attendaient à l’élection d’un gouvernement minoritaire – même LE CRAPAUD le prévoyait – parfois libéral, souvent conservateur avec, soufflant dans le dos, une présence néo-démocrate pouvant brouiller les cartes.

                                                            … quel sens donner à cette poussière?

Précisons que ladite poussière nous est venue d’un vent, immense, qui a soufflé d’est en ouest sur le territoire, émanant des Maritimes, multipliant ses forces dans le centre du pays, s’essoufflant un peu lors de son passage dans les Prairies pour arriver en Colombie britannique et s’y stabiliser. Ce vent a emporté avec lui deux éléments importants à qui cherche un sens à la poussière qui en résulta :

a) éconduire le Prime Harper et son gouvernement conservateur;
b) l’assèchement plutôt brutal d’une vague orange néo-démocrate.

Je pourrais ajouter l’importante diminution du vote des Québécois pour le Bloc, parti souverainiste qui de par sa seule existence et le fait qu’il fasse partie du jeu électoral canadien légitime le pouvoir fédéral. Également, le début d’une assise pour le Parti Vert au Canada. Ces deux éléments ne nous sont pas très utiles dans la recherche de sens à donner aux résultats des élections du 19 octobre 2015.

Éconduire le Prime Harper

Au-delà de l’usure d’un gouvernement ( ce dernier régnait depuis près de 10 ans, parfois en minoritaire puis à la fin en majoritaire ) il faut voir un retour des Canadiens vers les véritables valeurs de ce pays qui sont à des lieux de ce que le Prime Harper nous a passées dans la gorge depuis son arrivée au pouvoir : 
la militarisation du pays, 
une philosophie de la loi et de l'ordre à tout crin, 
la destruction de notre renommée internationale, 
le non-engagement dans la lutte pour sauver la planète, 
la xénophobie, 
le musellement des scientifiques, 
le favoritisme envers les riches et les bien nantis, 
la judiciarisation de tout et de rien, 
la perte de nos droits de citoyens 
et surtout, 
surtout
l’abandon de nos rêves, le meurtre de nos espoirs et l’expulsion manu militari de tout ce qui pourrait être source de bonheur individuel et collectif.

Ce gouvernement, le pire de toute l’histoire canadienne, a voulu :
réécrire l’histoire canadienne;
nous remettre à genoux devant la monarchie britannique;
ramener les femmes à la maison, les y clouer dans leur rôle de femmes au foyer;
tuer la culture, l’avorter dès son apparition, couper les sources d’information quelles qu’elles soient;
a détruit le registre des armes à feu avalisant l’idée qu’une arme à la main de chaque citoyen demeure toujours la meilleure protection contre nos ennemis, à commencer par son propre voisin;
et la liste peut encore et encore s'étirer.

Pour tout cela ce gouvernement mérite d’avoir été éconduit.


La vague orange

Née lors de l’élection fédérale tenue en 2011 et en lien direct avec le niveau de sympathie que l’ancien chef aujourd'hui décédé du NPD, Jack Layton, inspirait au Canada et principalement au Québec, une vague a déferlé : on l’a nommée ''vague orange''.

Grand favori en début de campagne, le NPD semblait se diriger vers le pouvoir, une deuxième première dans son histoire : 2011, l’opposition officielle à la Chambre des communes d’Ottawa et le pouvoir en 2015. Tout semblait baigner dans l’huile jusqu’au moment où son chef, Thomas Mulcair qui venait de modifier son prénom en Tom, bifurqua sur sa droite alléguant sans doute que gauche+droite=centre. Mauvais, fort mauvais calcul. Le NPD ne devenait plus crédible aux yeux de ceux qui souhaitent le départ à tout prix du Prime Harper, l’assurance que les Conservateurs ne se retrouvent plus au pouvoir au lendemain de l’élection.

Cette mathématique, à mon point de vue, s’est avérée plus dévastatrice sur le score final de son parti que la question du niqab qui n’intéressait que les Québécois de souche attachés au Parti Conservateur et au Bloc.


         … demeurons dans la recherche de sens.

Éconduire le Prime Harper, l’assèchement de la vague orange furent des vecteurs importants qui ont favorisé Justin Trudeau et le Parti Libéral du Canada. Ajoutons-y le fait que le Bloc qui a reçu moins de 20% de la faveur populaire s’est tiré dans le pied en ressortant ses vieux interprètes, ses vieux discours ringards et ses slogans éculés. QUI PREND PAYS PREND PARTI (thème électoral du Bloc) vu à la lumière des résultats signifie que le Canada est le choix de pays du Québec. Je ne crois que cela était l’objectif du message.


Le changement. Facile à dire que voici le mot le plus fréquemment utilisé lors de nos campagnes électorales. Vient en deuxième : un plan. Vous reconnaissez ici messieurs Trudeau et Mulcair qui y ont recouru jusqu’ad nauseam.

Pour ce qui est du ''changement'', tous nous pouvons dire que voilà mission accomplie. Nous avons changé de gouvernement, du moins le nouveau sera officiellement en poste autour du 4 novembre. Il nous reste à souhaiter que le verdict populaire transporté par cette volonté de changement ne reçoive pas que cela pour nourriture, un changement de garde. Rappelons un vieil adage populaire : plus ça change plus c’est pareil. L’exemple notoire du président Obama vibre encore à nos oreilles : YES WE CAN et rien n’a été modifié en profondeur.

Un plan - une idée précise de ce que l’on veut faire - il me semble que cela ne rime pas avec la politique qui, souvent, s’avère synonyme de compromis, de ruse, de diplomatie, de stratégie et régulièrement à la remorque des mouvements de la société plutôt changeante à notre époque.

Le plan du Prime Harper a pu se mettre en branle seulement lorsqu’il est devenu majoritaire, pouvant ainsi faire fi de tout. Il aura réalisé son plan en s’appuyant sur un dogmatisme rigide bien posé sur l’autel doctrinal de ses croyances rétrogrades. Qu’en sera-t-il du nouveau Prime, Justin Trudeau?

 
Le temps nous le dira. Il a quatre ans pour réaliser ce plan dont il nous a abondamment parlé en période électorale. Il ne faut pas s’attendre à une révolution dans les prochains jours, celles-ci provenant rarement des pouvoirs en place. Il ne pourra pas, toutefois, accuser les autres d’avoir miné sa route ou l’avoir empêché par leurs entraves à édifier une nouvelle société post-conservatrice.

Je crois que le meilleur plan pour assurer un changement qui s’inscrirait dans la permanence doit contenir ce premier ingrédient : la participation citoyenne. Une véritable contribution, de celle qui ne se limite pas à voter aux quatre ans mais plutôt dans la reconnaissance du droit de parole, d’intervention pour chacun des paliers de gouvernement du municipal au fédéral, chacun des citoyens, de prise de décision non pas à partir de compromis mais d’entente menant à la concorde, ce vieux mot que l’on utilise trop rarement, mot qui nous amène à la collaboration à une œuvre commune.


La campagne électorale s’est achevée, son résultat soulève l’espoir au Canada et dans bien des endroits du monde. Je souhaite que nous utilisions ce moment de grâce pour devenir ou redevenir le pays que nous souhaitons à défaut de ne pouvoir, nous Québécois, se décider à faire le nôtre.


À la prochaine












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