jeudi 9 décembre 2010

Le trois cent quatre-vingt-sixième saut / Le trois-cent-quatre-vingt-sixième saut

Un assez long moment sans parcourir le cahier de lecture, le cinquième. Il est tout à fait particulier, je l’ai déjà dit, puisqu’il contient des notes d’auteurs comme Jean Bédard, David Servan-Schreiber, Gérald Messadié, Jean-Claude Guillebaud, Fun-Chang, Mihaly Csikszentmihalyi, Spencer Johnson, Fernando Savater… Des auteurs qui s’attardent sur des questions philosophiques, sociologiques ou socio-médicales.

J’y puise, en vrac, quelques réflexions, question de reprendre le rythme…

. Écrire, c’est faire étalage de la longueur, de la largeur et de la profondeur de son ignorance et on peut s’y perdre tout entier.

Jean Bédard

. Un roman, c’est l’impossible de l’écriture. Qui peut écrire le roman d’un homme? Qui peut seulement écrire le roman de sa propre vie? On n’arrive jamais à écrire un roman, malgré toutes nos intentions, on ne peut qu’écrire des histoires tronquées, tronquées par les faits ou tronquées par notre imagination. Le roman d’un homme, c’est la vérité de la vie de quelqu’un dans la vie de quelqu’un d’autre, libérée des faits par l’amour.

Jean Bédard

. L’infini de l’eau aussi bien que l’infini du sable noient l’intolérable de la vie dans l’improbable des rêves.

Jean Bédard

. Tout se passe comme si les parties du cerveau cognitif qui contiennent tout le savoir approprié n’arrivaient pas à entrer en contact avec les parties du cerveau émotionnel marquées par le traumatisme, lesquelles continuent d’évoquer les émotions douloureuses.

David Servan-Schreiber

. … le cerveau émotionnel ne désapprend jamais…

David Servan-Schreiber

. En fait, les cicatrices émotionnelles du cerveau limbique semblent toujours prêtes à se manifester dès que la vigilance de notre cerveau cognitif et sa capacité de contrôle fléchissent, même temporairement.

David Servan-Schreiber

. Comme Damasio l’a brillamment expliqué, ce qui donne une direction, un sens à notre existence, ce sont précisément les vagues de ressenti qui affluent de ces sources de vie pour animer notre corps et nos neurones émotionnels. Et c’est en les cultivant, chacune, que nous pouvons guérir.

David Servan-Schreiber

. Le gnosticisme est une philosophie qui reflète une vieille faiblesse de l’esprit humain. Incapable d’imaginer un autre ordre de la nature qui celui qui se présente à lui, et convaincu d’emblée qu’il représente le couronnement de toutes les espèces vivantes, voire de l’univers, l’homme est naturellement enclin à interpréter les échecs de ses entreprises comme injustes. Pareil à l’enfant, qui ne se soucie que de soi, il attribue son infortune à une puissance surnaturelle et maligne qu’il définit comme un méchant dieu. Et, dans sa logique, il déduit que puisqu’il y a un mauvais dieu, il y en a aussi un bon. Bien sûr, il s’identifie au bon, qu’il comble de sacrifices, allant parfois, par ruse naïve, jusqu’à offrir aussi des sacrifices au mauvais, afin de ne pas le rendre jaloux. Il suppose aussi que ses souffrances sont partagées par le bon dieu, comme on le voit si clairement dans Homère, quand les héros tiennent pour acquis que tel ou tel dieu leur est propice, et il est finalement certain que le bon dieu est à couteaux tirés avec le mauvais. Comme nous sommes tous mortels et que nous supposons que la mort est un accident absurde qui n’adviendrait pas si le bon dieu régnait, nous déduisons aussi que, sur terre, le mauvais dieu triomphe toujours du bon. Ce qui signifie que le monde matériel est l’empire du mauvais dieu. Mais comme cette idée est insupportable, nous supposons aussi que, dans le monde invisible, le bon dieu prend sa revanche. C’est ce que font les Juifs. Ils ont admirablement mis en scène les tourments de l’âme.

Gérald Messadié

. Le dessin des événements se répète toujours, et pourtant, les événements, eux, ne se répètent jamais.

Gérald Messadié

. … le bonheur n’est pas quelque chose qui arrive à l’improviste; il n’est pas le résultat de la chance; il ne s’achète pas et ne se commande pas; il ne dépend pas des conditions externes, mais plutôt de la façon dont elles sont interprétées. Le bonheur est une condition qui doit être préparée, cultivée et protégée par chacun. Les gens qui apprennent à maîtriser leur expérience intérieure deviendront capables de déterminer la qualité de leur vie et de s’approcher aussi près que possible de ce qu’on appelle être heureux.

Mihaly Csikszentmihalyi

. … seule la capacité de tirer constamment de l’enchantement à partir de ce que nous faisons peut vaincre les obstacles au bonheur.

Mihaly Csikszentmihalyi

. J’évite l’indécision et les demi-décisions fondées sur des demi-vérités. J’utilise les deux volets d’une méthode fiable afin de prendre des décisions meilleures en permanence : un cœur généreux et une tête froide. J’utilise ma tête en me posant une question pratique et je consulte mon cœur en me posant une question intime. Puis, une fois que j’ai écouté les autres et moi-même, je prends une décision meilleure, et je m’y tiens.

Spencer Johnson

. … au moment de l’action particulière ici et maintenant, c’est celui qui agit qui doit décider ce qui est le plus opportun à chaque occasion concrète, sans se borner à appliquer mécaniquement un précepte ou une norme. Les règles de l’art de vivre, comme celles de n’importe quel autre art, proposent un schème d’orientation qui ne pourra cependant jamais se substituer à la «proairesis» du sujet – pour ainsi dire – à la touche personnelle à travers laquelle il affronte, à un moment précis, l’inimitable et fragile singularité de son existence. Il n’existe pas de science du vivre définie par des axiomes et des lois universellement admises qui puissent s’appliquer aussi bien dans la solitude expérimentale du laboratoire que dans la rue ou dans la jungle, mais il existe en revanche un art où se juxtaposent des traditions mémorables, des fragments de codes anciens, des règles pratiques de comportement et l’inspiration désespérée de l’espoir, à partir duquel ou contre lequel nous agissons lorsque le cas se présente. Autrement dit, du haut de la corde raide où nous faisons de l’équilibre sans filet ou au milieu de cette mer aux courants perfides sur laquelle nous tentons de demeurer à flot, l’expérience acquise et le souvenir de nos meilleurs maîtres sont les bienvenues… mais nous continuerons cependant à dépendre de la prudence de notre esprit, car nous sommes tous seuls.

Fernando Savater

Au prochain saut

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