mardi 17 novembre 2009

Le trois cent treizième saut



Il y a longtemps. En fait, le dernier poème du crapaud remonte au saut 285, c'est-à-dire en juin dernier. Une certaine panne sèche? Ou, je ne sais trop, une recherche de dire autrement. Je vous laisse le soin de comparer aux autres celui d'aujourd'hui, mais personnellement il me plaît bien. Sans doute parce qu'il aura été difficile de l'achever.
Il porte le titre suivant:
il y eut une invitation et elles furent nombreuses

Le voici.


il y eut une invitation
et
elles furent nombreuses



il y eut une invitation

un deuil serait souligné
sur le seuil des âmes qui la recevraient

et elles furent nombreuses

invitation adressée par courriel sur clavier qwerty
quelques âmes ébranlées s’en étonnèrent

elles furent nombreuses

une invitation plus buffet que banquet
exhortation au centre d’une île où pleurent des nymphéas
un bateau évanescent transporterait les invitées

furent nombreuses

débuta dans la cohue l’incompréhensible palabre
simultanément tenu d’un bout à l’autre de l’île
sur la grève empoussiérée des sirènes serinaient
des hôtesses démaquillées marmonnaient l’invitation

nombreuses

on assécha le feu
qui depuis le matin dévorait les coraux
entrées froides pour invitées surprises

on alluma les eaux salées
qui depuis la nuit bouillonnaient
comme des mains sacrilèges, aveugles et impaludées


- la vie, un fantôme activé par une marionnette à fils


cette redondante mélopée
sortait de la bouche affamée
d’on ne sait trop combien de lamantins voraces
arpentant les berges sur lesquelles les âmes accostaient


- la vie, une marionnette à fils hantée par un fantôme


l’écho chevrotant reprenait en accents torrides
les paroles monocordes, monotones et chantées
lançant la discorde au visage des convives javanaises

un long manteau blanc-fantôme
une jaquette noire-marionnette
cachaient leurs soupirs enfouis dans un bol de chiffres
offert aux convives sulfureusement nourries
afin qu’elles ne cherchent plus
aux creuses paroles, des messages surannés


- un chemin pavé de laideurs mène à la BEAUTÉ


les invitées infidèles et meurtries
endeuillées par leurs regards vaporeux
retenaient de longs soupirs marins
jusqu’à l’heure des condoléances gratuites

inscrivaient avec des os de requins affamés
le nom des âmes éternellement mortes
unanimement reconnues et oubliées

adressaient alors des psaumes desséchés
aux anges noirs, relève de l’atoll,
pris aux fils fantomatiques des marionnettes débranchées


- la vie, un triste silence à la fenêtre fermée -


et elles mangeaient
comme mangent à des noces mortes
des convives inconnus
à qui on aurait greffé à l’aisselle
des palimpsestes indéchiffrables
enrubannés du colophane des violons timorés

et elles écoutaient
mélopées et psaumes
résonnant à leurs pieds

et elles attendaient
impatientes, de cette patience des coquillages,
que le deuil pour lequel

il y eut une invitation
et elles furent nombreuses


se déplaça sous les vagues, sous les marées
entre ressac et mer bleue verte

et elles attendront
comme on attend
lorsqu’en attendant
on croit ne plus attendre

il y eut une invitation
et elles furent nombreuses

à recueillir sur le sable jaune
des marionnettes sans fils
des fantômes dévastés
et un bateau sabordé

Au prochain saut

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