dimanche 20 juillet 2008

SAUT: 223

Ce matin, le crapaud poursuit sa présentation de certains poèmes l'ayant marqué. Vous en reconnaîtrez certainement un, du moins je le souhaite car cela vous permettra le bonheur de le relire.

Nous retournons, pour votre grand plaisir, à ces trois poètes francophones hors Québec - ça me fait du bien d'écrire cela, car il y a quarante ans à peine, on ne pouvait pas se le permettre - que sont Charles Baudelaire, Arthur Rimbaud et Max-Pol Fouchet.

Vous remarquerez ce qui à l'époque m'émut n'allait pas le sens des grands poèmes connus et reconnus parce qu'ils sont, d'après les critiques, les clefs de l'oeuvre. Des icônes. Pour moi, il fallait des images. Et encore des images, celles qui ouvrent le coeur, l'âme et l'esprit.



Voici mon Baudelaire fétiche:


LA MUSIQUE

La musique souvent me prend comme une mer!
Vers ma pâle étoile,
Sous un plafond de brume ou dans un vaste éther,
Je mets à la voile!

La poitrine en avant et les poumons gonflés
Comme de la toile,
J'escalade le dos des flots amoncelés
Que la nuit me voile:

Je sens vibrer en moi toutes les passions
D'un vaisseau qui souffre:
Le bon vent, la tempête et ses convulsions

Sur l'immense gouffre
Me bercent. D'autres fois, calme plat, grand miroir
De mon désespoir!




D'Arthur Rimbaud, voici celui qui encore maintenant réussit à me troubler. En 2004, année du cent cinquantième anniversaire de sa naissance, je le lisais au Jardin des Tuileries, entouré par cette ambiance unique d'être à Paris, de savoir qu'il y fut et que certains poèmes naquirent ici. Le voici.


L'ÉTERNITÉ

Elle est retrouvée.
Quoi? - L'Éternité.
C'est la mer allée
Avec le soleil.

Âme sentinelle,
Murmurons l'aveu
De la nuit si nulle
Et du jour en feu.

Des humains suffrages,
Des communs élans
Là tu te dégages
Et voles selon.

Puisque de vous seules,
Braises de satin,
Le Devoir s'exhale
Sans qu'on dise: enfin.

Là pas d'espérance,
Nul orientur.
Science avec patience
Le supllice est sûr.

Elle est retrouvée.
Quoi? - L'Éternité.
C'est la mer allée
Avec le soleil.




Max-Pol Fouchet, (1er mai 1913–22 août 1980) c'est par «l'Oiseau de Nuit», le grand Guy Mauffette, que j'y suis arrivé. Combien de fois, sans doute parce qu'unis par le même métier, les mêmes passions, il a dit ce poème en entier ou par bribes.


NOUS TAIRONS LE SILENCE

Pour que demeure le secret
Nous tairons jusqu'au silence

Nul oiseau n'est coupable
Du tumulte de nos coeurs

La nuit n'est responsable
De nos jours au fil de mort

Il n'est que grande innocence
Et des colonnes en marche

Mais les plaines soulignent
Notre solitude de leur blé.



Vous avez le droit absolu de courir à votre bibliothèque, y trouvez un endroit paisible et lire ces trois grands et uniques faiseurs de merveilles.



Bonne lecture et au prochain saut!

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