la chanson morte
une vieille musique en sourdine
balayant les devenirs
se glisse entre les taches vernies
sous le tapis
épie une présence lointaine
qui, à pas feutrés, allait se rapprochant
il y a une fois la claire noirceur
prenant forme sur la portée de la nuit
seule,
criante,
assoupie,
accrochant à l’arbre écorcé
le squelette d’un fantôme évanoui
le vent entre les stores fermés
se faufile par la fenêtre ouverte sur l’hiver
encore et pas encore froid
où un corps endormi empalé au poteau
pointe sa solitude jazzée
vers le firmament entrouvert
en marche sur un piano sans notes
silencieuse symphonie
on entend la fugue éteinte des saisons sans raison
entonner de sa voix continue
les mots d’une chanson morte
le fantôme
le fantôme diaphane
emmêlé au brouillard
yeux noircis et pas rouges
durcit et glace
ses pas à pas
dans des foulées défraîchies
il marche glisse et frôle
son solitaire manteau
oublié près du trou
lèche les mouillures de neige
échappées des nuages engourdis
sa marche sa glissade et sa frôlure
le froid transperçant ses veines orageuses
s’accroche à lui comme autant de flèches
bousculées par le vent
il allait et venait aux sapins endeuillés et revenait
il marche glisse et frôle
dans la rigueur de la nuit
venu d’un autre monde,
le froid fantôme
marque ses pas
sur un horizon piqué de musiques égarées
il marche glisse et frôle
des banquises enfermées dans son âme
réchauffent le globe
ozone bleu électrique
il s’avance, frêle, sur notre temps
en marchant glissant et frôlant
et là encore
... et encore
là
à écrire
dans l’hiver
comme un fantôme qui passe
harcelant les solitudes
les impatiences
les anxiétés...
... et encore
là
dans l'hiver
les pieds se promenant dans de tristes ruelles blanches comme des brouillards perdus
qui neigent de fulgurantes tempêtes
balayant des passés aux avenirs trop présents
... et au printemps revenuencore immobilisés
làau coeur de la ville ployant sous d'immenses placards d'érableles pieds du fantôme écraseront les impatiences
les anxiétés
les solitudes
... et
fouettés par les grands vents d'avril
ils demanderontsi pour toujours
encore
les rêves inanimés que la vie aura sauvés des feux de l'hiver
vieilliront encore
là…
l’haleine de la neige
l’haleine des mots du silence
tombent en neige
s’accumulent auprès des étoiles
douce équinoxe
s’éteint le soleil de minuit
alors que rôdent
ruellement poursuivis
de magnétiques chats
électrifiant les feuilles mortes en quête d’eau
étrange accalmie
plus loin que les proches paroles échappées dans les flaques mauves
circulent parallèlement
les croisées de chemin
fulgurante étoile filante
les saisons emmêlées comme de chaotiques girouettes
pointant leurs ailes de plomb aux embrasures du vent
idéefixent le nord
retrouvent les routes égarées
se multiplient
encore
et encore
tels des guignols pivotant sur eux-mêmes
triste légende
au bout des années
que buvait l’éphémère
se dressent
telles de transparentes colonnes de givre
les trous des pas incertains engorgés de ciment
lancinante mélancolie
Y aura-t-il un conte de Noël? Encore quelques jours pour y songer... Je fouillerai dans les carnets de notre grand-père, juste pour voir...