mercredi 29 avril 2015

30 avril 1975 / 30 avril 2015



          Au moment où vous lirez ces lignes écrites à Saïgon, le 767 de Qatar Airways se dirigera vers Doha en provenance de Ho Chi Minh. Je serai à bord. Puis, après un transit d’environ huit heures, un second 767 s’envolera vers Montréal. Je serai à bord, également.

Tout cela un 30 avril: 40 ans après la libération de Saïgon par les armées vietnamiennes du Nord. En une journée, la guerre du Vietnam, celle que menaient les GI's Américains contre ce peuple énergique et courageux, prenait fin. Des hélicoptères avec à leur bord des ressortissants américains, des collaborateurs vietnamiens faisaient la navette entre ce qui est appelé aujourd’hui le Palais de la Réunification ou encore Palais de l’Indépendance et des bateaux parqués sur la mer Orientale, prêts à fuir, direction USA.

S’enclenchaient également les départs successifs et nombreux des ''boats people'', ces Vietnamiens du Sud qui ne se voyaient pas vivre dans un pays à obédience communiste. Ces mêmes ''boats people'' que le Sénat canadien veut honorer aujourd'hui en leur dédiant le 30 avril comme journée commémorative. Je passe rapidement sur cette effronterie mais la signale tout de même au passage.

30 avril, journée fériée au Vietnam et en raison de son 40ième anniversaire, elle connaîtra un déploiement plus important qu'à l'accoutumée, autant politique que populaire. Plusieurs rues du Distrcit 1 où se situe le Palais de la Réunification sont fermées et se préparent à accueillir une foule imposante lors de grandes festivités. Déjà hier soir (29 avril), on inaugurait la rue Nguyen Hué devenue rue piétonne, embellie par ses éclairages de type solaire, ses jets d'eau qui ont su fasciner jeunes et moins jeunes. On se serait cru en période du Têt.

Je serai dans le 767, frustré de manquer la fête, déçu de n’avoir pu, dans une quelconque chronique écrite à Saïgon, aborder ces sujets notés au cahier noir:

-     j’aurais aimé vous entretenir des cireurs de souliers qui, arpentant les rues du centre-ville,  offrent leurs services; 

-  vous parler de l’importance des ''sécurités'' que l’on croise partout, principalement occupées à gérer le stationnement des motos; 

-   de ce faisceau de lumière blanche provenant de loin, sans de l’aéroport, puis ceux de la tour Bitexco qui, telles des épées, balaient le ciel; 

-   du livreur de glace, en moto, descendant de celle-ci pour livrer son butin congelé que l’on soupèse afin de ne pas payer ce qui a fondu en chemin; 

-   du cellulaire, omniprésent chez tout Vietnamien;

-  des installations du Marché Ben Thanh qui le transforment vers 18 heures et  cela en quelques minutes, lui donnant l'allure d'un gigantesque marché de nuit; 

-   de cette manie qu’ont les gens de vous interroger sur votre âge, votre nom et de ne jamais les oublier par la suite; 

-  des fumeurs de JET, la cigarette nationale, qui préfèrent vous acheter un paquet entier au lieu de vous en offrir une;

-  de la bière vietnamienne servie ''tablette'' dans un verre contenant un immense glaçon; 

-  de ces personnes âgées étrangères, majoritairement masculines, au bras de jeunes vietnamiennes;

-   du lien entre mère et fils dans ce pays où la moyenne d'âge est sous les 30 ans.

J’aurais aimé vous entretenir de tout cela; ne l’ai pas fait, me disant sans doute que l’occasion se présenterait; mais tempus fugit, de sorte qu'à la fin des sujets restent en plan.



Aujourd’hui, 30 avril 2015, comme ultime message de ce voyage, je publie à nouveau ce poème écrit à Saint-Pie et offert au Vietnam lors des événements des Paracels (Archipels Hoang Sa et Truong Sa) le printemps dernier, en raison de l’intervention chinoise en zone territoriale vietnamienne. Ceci déclencha une levée de boucliers, un regain du nationalisme et une prise de conscience du territoire et de son essentielle protection.

Il a été écrit en français, je l'ai traduit en anglais et finalement par mon ami Lâm l'a revêtu en vietnamien.



Palais de la Réunification

ils ne pourront oublier tes yeux…

ceux qui maintiennent ta gorge immobile
ils ne pourront oublier tes yeux
tes yeux de mer, tes yeux de soleil

ceux qui violent ta route
ils ne pourront oublier tes yeux
tes yeux de sol, tes yeux de pluie

ceux qui pétrolent tes rives
ils ne pourront oublier tes yeux
tes yeux d’hier, tes yeux de maintenant

savent-ils, ceux qui marchent sur tes îles,
que ton sable couleur sang
emplira le gouffre creusé par leur ingérence

ils ne savent pas
mais ils ne pourront oublier tes yeux
que tu as plantés au cœur de ton courage

sauront-ils, ceux qui enceignent tes rives
que tes yeux ouverts sur les vagues du temps
ne seront dupes des pirates mariés aux sirènes

ils ne pourront oublier tes yeux
tes yeux couleur de mer
et s’y embabouineront


Palais de la Réunification

they can not forget your eyes ...

those who maintain your throat still
they can not forget your eyes
your sea eyes, your eyes sun

those who violate your way
they can not forget your eyes
your soil eyes, your eyes rain

those who rape your shores
they can not forget your eyes
Yesterday your eyes, your eyes now

they know, those who walk in your islands
than thy blood-colored sand
will fill the pit dug by their interference

they do not know
but they will remember your eyes
you have planted in the heart of your courage

will they, who encircle your shores
your eyes open on time waves
not be fooled by the lure married pirates

they can not forget your eyes
your sea-colored eyes


and they get stuck in the mud



Palais de la Réunification
(Pas d'objÀ : Jean Tu

HỌ SẼ KHÔNG THỂ NÀO QUÊN ĐƯỢC ĐÔI MẮT

Vẫn còn đó những người làm em đau
Nên làm sao họ quên đi được đôi mắt
Với nỗi đau rộng như biển và sắc như ánh mặt trời

Những người hại em còn tồn tại trên đời
Nên mãi mãi họ sẽ phải còn khắc ghi đôi mắt
Đôi mắt đì lên sỏi đá, đôi mắt lạc giữa những cơn mưa

Những kẻ đã làm đục bẩn đôi vai em lúc xưa
Sẽ muôn đời bị ám ảnh bởi ánh nhìn như cắt
Đau thắt những ngày qua, xót xa cho đến tận mai này

Những con người đan tâm cướp đi những gì em đắp xây
Rồi sẽ phải lắm đầy cả cuộc đời của họ
Bằng nước mắt, bằng máu…và bằng cái gọi là quả báo ở trên đời

Vì nổi đau không đong đếm bằng lời
Nên cả đời họ sẽ không thể nào nghe được
Rằng lòng can đảm của em đang lớn mạnh từng ngày

Rồi đây những kẻ đã làm dơ đôi bờ vai ấy
Sẽ phải thấy bằng ánh mắt thời gian
Không phai lãng bằng những điều giả dối

Họ sẽ không thể quên, không thể nào, tuyệt đối
Đôi mắt với nỗi đau rộng sâu như biển
Và sắc như ánh mắt trời...


À la prochaine

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