samedi 19 mai 2007

Le cent soixante-quatrième saut de crapaud (15)

Chapitre 36


Rock revint avec sa radio, l'installa tout près de la cantine. On entendit d'abord des grincements, des grichements et des chuintements autant sur la bande FM que la bande AM. Après quelques minutes de manipulation, des couinenements une voix se détacha:
- Bulletin spécial. Bulletin spécial.
- Ça fonctionne, cria Rock, fier de son coup.
- Un important vol de pierres précieuses évalueées à près de 27 millions de dollars a eu lieu ce matin à Montréal. Pour de plus amples informations, voici notre envoyé spécial sur place, Claude Verrieux.
- Écoutez, dit Mario.
- Vers 8 heures 10 ce matin, un camion de la Brink's transportant des pierres précieuses évaluées à 27 millions de dollars a été attaqué et volé. C'est derrière l'édifice Saint-Antoine, dans une ruelle menant au Musée, qu'un groupe de voleurs en scooters formant un triangle autour du camion a réussi l'audacieux coup. Le camion venait y déposer les pierres précieuses devant être exposées au public. Les quatre employés de la Brink's ont été assommés mais aucun d'entre eux ne fut blessé sérieusement. Nous avons rencontré l'inspecteur Mike Jackson, chargé de l'enquête. On se souviendra qu'il s'était illustré dans la fameuse affaire du vol des équipements de hockey du club Les Canadiens de Montréal, il y a de cela quelques mois.
- 27 millions, tout un vol, dit Caro buvant son jus d'orange à petites gorgées, pas trop rassurée par la qualité de l'eau du ruisseau.
- Inspecteur Jackson, auriez-vous des informations supplémentaires à transmettre à notre auditoire?
- Nous sommes, Roger-Ninja et moi-même, sur l'enquête depuis quelques minutes et tout nous porte à penser qu'il s'agit là d'un vol.
- Vraiment?
- Il n'y a pas de doutes dans notre esprit?
- Avez-vous des indices, des pistes, des détails, quelque chose qui orienterait vos recherches?
- D'abord, il faut se demander pourquoi a-t-on bien pu faire un geste aussi répréhensible.
- Et vous en pensez quoi, Inspecteur?
- Nous allons examiner tous les indices, toutes les pistes, tous les détails qui orienteraient nos recherches... Nous interrogerons les employés du camion et soyez assuré que nous éluciderons cette histoire spectaculaire dans le temps de le dire.
- Merci, monsieur Jackson et nous souhaitons être tenu au courant de tous les développements de cette affaire.



La radio, finalement, réussit à réveiller Bob qui rejoignit le groupe intrigué par cette affaire de vol de pierres précieuses.



Chapitre 37


L'inspecteur Jackson était un personnage bien spécial, physiquement très imposant: plutôt gros et grand, ses cheveux sales se camouflaient sous un grand chapeau noir à larges rebords qu'il portait douze mois par année. Son imperméable couleur Colombo possédait de multiples poches - il le portait depuis le jour il fut engagé par la police de Montréal - lui permettant de transporter tout ce dont il avait besoin: un calepin de notes, sa pipe, un appareil-photo, sa bouteille whisky, une loupe, une lampe de poche, un arme de petit calibre, un cellulaire, et encore, et encore plus...
Les lunettes fumées, souillées comme ses vêtements, ne le quittaient jamais. Toutefois, ce qui le caractérisait le plus, son chow chow, le fidèle Roger-Ninja, qui le suivait et bien souvent, le précédait...



Les enquêtes qu'il mena furent toutes classées dans le tiroir des affaires non résolues. Rien encore, exception faite des équipements de hockey, n'a abouti soit parce qu'il partait sur une mauvaise piste, soit que tant de détails lui passaient devant les yeux sans qu'il ne les remarqua ou pire, qu'il compliquait tellement les choses que plus personne et lui-même ne comprenaient plus rien.

Cette histoire de pierres précieuses lui avait été confiée... et ce qu'il savait pour le moment lui provenait de la déclaration d'un des quatre employés de la Brink's:
- Nous filions vers le Musée alors que six scooters disposés en triangle nous suivirent. En prenant la ruelle vers l'édifice Saint-Antoine, les scooters étaient toujours derrière nous. Nous nous sommes arrêtés, sommes sortis et ce fut à ce moment que nous fumes maîtrisés, ligotés et avandonnés tout juste à l'entrée arrière du Musée.« Avant d'être assommé, j'ai eu le temps de voir qu'ils étaient armés. Je ne puis dire exactement le type d'armes mais cela ressemblait à des lance-marteaux.» Les voleurs laissèrent leurs scooters sur place et partirent avec le camion. Ils nous semblaient jeunes et il y en avait un qui portait un habit de camouflage vert kaki.

L'inspecteur Jackson fit le tour des lieux et remarqua un insigne sur chacun des scooters : un aigle à deux têtes possédant des griffes gigantesques tenant des objets difficilement indentifiables. Sur un scooter, dans un des sacs, il découvrit des crottes de rat, une bouteille de bière d'épinette, une boussole de même qu'une carte topographique sur laquelle, collée à différents endroits, de gros points rouges.

Toutes ces informations recueillies après le vol indiquaient que le camion de la Brink's serait sorti de Montréal pour prendre la direction de Mirabel.

L'inspecteur Jackson et Roger-Ninja, dans leur Renault 5 toute cabossée, sortirent de Montréal. Conduisant prudemment au point d'en devenir dangereux, Jackson tentait de reconstituer le puzzle d'indices et d'informations. Il souhaitait que son enquête ne dura pas trop longtemps, puisque nous étions samedi et qu'il était en vacances depuis la veille. Étant le seul inspecteur disponible en cette fin de semaine de la Saint-Jean-Baptiste, son chef se vit obligé de lui confier le début de l'affaire tout en se disant qu'il allait mettre quelqu'un de sérieux sur l'affaire au début de la semaine prochaine.





Jackson se versa une rasade de whisky. Son chien le regarda et dans ses yeux tristes on pouvait lire que cela n'était pas tellement bon pour lui. L'Inspecteur avait l'habitude de parler à son chien comme s'il s'agissait d'un humain et dans le regard du chow chow, souvent il y voyait des messages plus intelligents que ceux dont lui-même pouvait être l'instigateur.

- Drôle d'affaire, mon Roger-Ninja. Qui pouvait bien savoir que ce camion contenait ces pierres précieuses? Pourquoi attaquer avec des scooters et des armes non conventionnelles? Et Cette carte qui nous mène vers le parc national par la route de Mont Laurier. Suivons notre pif légendaire!

La petite Renault 5 roulait sans arrêt en ce samedi matin ensoleillé, toutes fenêtres ouvertes. Après quelques kilomètres de route, la voiture se mit à toussoter, donnant des signes de fatigue évidente et finalement s'immobilisa en plein milieu de la route.

- Pas possible, qu'est-ce qui se passe?

L'Inspecteur descendit, se dirigea machinalement vers le capot qu'il souleva. Rien de spécial ne lui sauta aux yeux. Il revint. Redémarra la voiture pour s'apercevoir que l'indicateur d'essence signalait une panne.

- Nous voilà bien pris. Presqu'en plein bois, plus d'essence! se disait un Jackson assis sur le pare-choc arrière, Roger-Ninja à ses pieds.

Il se dit qu'une voiture finirait bien par passer par là et le dépannerait. Mais c'était le calme plat. Il n'entendait que les bibittes lui tourner autour du chapeau alors qu'une idée, timidement, s'installa dans sa tête: envoyer son chien vers le prochain village pour ramener de l'aide.

Avant même d'en parler, Roger Ninja était déjà parti en courant.


Chapitre 38

Les Six + un achevaient de déjeuner quand le solennel Bob prit la parole:
- Nous irons vérifier vers 16 heures si l'emplacement numéro 2 est intéressant. C'est à une heure de marche et en route, nous trouverons une grotte que la carte indique. On pourra la visiter. Nous partirons après dîner. D'ici là, ceux qui souhaitent aller à la pêche, je crois que le ruisseau peut offrir de belles prises.
- On pourrait p't'être organiser une course de guernouilles.
- Je reconnais là ton grand sérieux, répondit Bob.

Le campement numéro 1 était inondé de soleil et dans l'esprit de Bob, il fallait absolument assurer ses arrières et prévoir un emplacement 2 au cas où... mais pour le moment, tout lui semblait correct. Les Six avaient placé leur sac de couchage de manière à les faire aérer. Celui de Joe en avait bien besoin...

- Joe, viens-tu avec moi? On va ramasser des champignons, proposa Annie.
- On amène Raccoon.

Bob demanda si Mario avait de la corde et un hameçon dans son coffre à outils, alors que Caro annonçait qu'elle marcherait autour, sans trop s'éloigner.

Ce fut en amont du ruisseau que le chef et son second se dirigèrent pour la pêche. Mario vérifia du côté de Caro s'assurant que tout semblait correct.

Rock, seul au campement, s'empressa d'aller ranger sa radio dans la tente avant de partir à la recherche d'un petit souvenir qu'il ramènerait à la maison. L'étiquette dans le veston de Joe était toujours bien imprimée dans son esprit.

Chapitre 39


Roger-Ninja revint à l'auto de son maître en compagnie d'une remorque. Le propriétaire de la station-service Stropway - la seule d'ailleurs dasn ce village - fut surpris de voir planté devant une de ses deux pompes à essence, un chow chow, fixant celle qui distribuait de l'essence « régulière ». Grand amateur de l'émission télévisée « Le Vagabond », monsieur Vallerand se dirigea vers l'animal cherchant à découvrir le message que les yeux de Roger Ninja lui envoyaient.

- Sûrement qu'il veut me dire quelque chose: une panne?

Le chien, museau collé à la pompe, lui montra la pompe à essence et fit quelques pas en direction d'où il venait puis s'immobolisa.

- Sûrement qu'il veut que je le suive: où?

Roger Ninja jappa de sa voix forte et rauque tellement fort que le garagiste recula de deux pas.
- Sûrement qu'il veut que je vienne tout de suite: avec de l'essence?

Le chien rebroussa chemin alors que monsieur Vallerand remplit un réservoir d'essence - régulière - sauta dans sa remorqueuse et tout doucement, suivit la bête qui courait devant lui.

Dix minutes plus tard, au bout de la route, il aperçut quelqu'un assis sur le pare-choc d'une Renault 5, pipe à la bouche:
- Bonjour monsieur, sûrement que ce chien vous appartient?
- En effet! Je suis l'inspecteur Jackson de la police de Montréal. J'enquête sur le vol de pierres préciseuses survenu ce matin au Musée Saint-Antoine et je suis en panne d'essence.
- Sûrement que vous si vous n'aviez pas eu votre chien, sûrement que vous seriez encore là?
- Sûrement.

Le garagiste remplit le réservoir de l'Inspecteur et avant de le quitter:
- Votre chien pourrait sûrement jouer à la télévision, comme le Vagabond.
- Sûrement.

L'inspecteur Jackson ouvrit la portière à Roger Ninja qui sauta devant. Après avoir jeté un coup d'oeil sur la carte, il reprit la route. Il se dit qu'il devrait s'arrêter à Stropway emplir le réservoir d'essence - de régulière - prendre quelques provisions, téléphoner au bureau afin de vérifier si des développements étaient survenus depuis son départ et qu'il ajouterait au dossier.

Il entra au garage-dépanneur de monsieur Vallerand, sûrement heureux de le revoir, ramassa des provisions pour le chien - monsieur Vallerand se demandait si Roger Ninja mangeait les mêmes chose que le Vagabond? Sûrement - et pour lui. Il remarqua qu'à la télévision, l'appareil était dans le fond de la pièce et le propriétaire du garage-dépanneur devait sûrement se tordre le cou pour suivre ses émissions canines...on diffusait les images du vol de ce matin. Il revoyait les scooters dans la ruelle, l'animateur qui allait dans un instant l'interviewer puis des passants leur demandant ce qu'ils savaient de l'événement.

- C'est vous! C'est vous! Sûrement que vous allez devenir une vedette, auant que votre chien, dit monsieur Vallerand alors que l'Inspecteur sortait.
- Sûrement, répondit Jackson en se dirigeant vers la Renault 5, sortit son cellulaire pour rejoindre la Centrale.

On lui dit que rien de nouveau n'était à signaler, personne n'avait revendiqué le vol et on cherchait à savoir oì il était maintenant.

Il consulta une autre fois la carte avant de repartir sur la route nationale menant à Mont Laurier, Roger Ninja à côté de lui, tête dehors.

Un peu de politique à saveur batracienne... (19)

  Trudeau et Freeland Le CRAPAUD ne pouvait absolument pas laisser passer une telle occasion de crapahuter en pleine politique fédérale cana...