jeudi 28 mars 2024

Un être dépressif - 15 -

 


Un être dépressif

-  15  -

Une transplantation, c’est extraire de la terre
pour la planter ailleurs.
 

Je tarde à le publier ce dernier billet. Comme le dit si bien Boileau, « sur le métier remettez vingt fois votre ouvrage » ce vers se vérifie parfaitement puisque plus d’une semaine sépare le 14 du 15. Je me hâte donc lentement sans perdre courage…

 

    Achever une tâche, qu’elle soit agréable ou pénible, nous amène à une conclusion, un épilogue… un dénouement. J’y arrive avec ce billet, le quinzième, qui sera suivi d’un dernier TIRÉ À PART. J’y arrive donc avec le sentiment d’avoir rempli un contrat, celui que la psychologue m’invitait à signer, ainsi que certaines constatations : celle d’avoir revisité ces mois douloureux, autant ceux vécus au Vietnam qu’au Québec convaincu de ne pouvoir en altérer le contenu ; celle d’avoir travaillé fort pour modifier les effets qu’ils ont sur moi (physique et mental) ; qu’une certitude s’est installée, la transplantation des racines dans une terre plus accueillante m’est bénéfique. L’allégorie du végétal (fleurs fanées qui s’éteignent, feuilles jaunies cessant de respirer, tige chancelante et vacillante) décrit bien cette nouvelle réalité, celle d’une plante dont seules les racines survivent si transplantées dans une terre qui ne soit ni froide ni en manque d’une quantité suffisante d’oligoéléments. Vous les connaissez ceux qui me sont essentiels, auxquels avec le temps s’en sont ajoutés d’autres aussi nutritifs. Ici je pense,  aux amis de café, de cinéma que je croise régulièrement. La méditation journalière. Sans oublier mes lectures du neuropsychiatre Boris Cyrulnik, mes écoutes du chanteur Elliot Maginot.

Ces deux derniers sont, pour un «une voie» pour l’autre «une voix», qui ont rempli d’énergie une âme desséchée. Aussi, me redonner l’élan pour modeler une routine.
 
 

De transplantation à la routine. 

 

Celle qui orchestrait ma vie vietnamienne tournait autour de la musique, variant selon les journées et le travail d’écriture. Elle revient maintenant…

Celle de lire plus de cinquante pages quotidiennement. Elle se réinstalle.

Celle de marcher, là-bas sous le soleil près de la mer, ici à la fois utilitaire (n’ayant pas de véhicule pour me déplacer) ou gratuite, freinée seulement par la pluie ou la neige.

Celle d’écrire. En retrouver et le goût et la nécessité.

À la suite de ces billets regroupés sous le thème Un être dépressif, souhaitant maintenir cet usage, sans nécessairement me lancer dans un autre roman, je veux revenir à l’origine de ce blogue, soit un long et interminable conte.

( Les curieux peuvent retourner au point de départ datant de septembre 2005 ).

À l’époque - c’était au début de ma retraite - j’ai entrepris ces textes d'un grand-père vivant en Gaspésie, tout près du parc Forillon. Fiction et autoportrait s’y emmêlent.

 

)(

 

Alors qu’auparavant je pouvais demeurer au lit jusque tard le matin et y retourner tout l’après-midi,
qu'il m’était impossible de lire et d’écrire,  
que je sortais à l’extérieur si peu souvent et si peu longtemps pour marcher,
que le fait de rencontrer des gens était une laborieuse corvée,
qu’aucun projet s’étalait devant moi,
ma transplantation favorisée par la thérapie a créé une nouvelle routine, une manière inédite de voir le temps passer.
Lorsque votre espace est délimité, reconnu et accepté comme étant celui qui convient, il est plus facile de voir le temps passer... de cesser de ruminer le temps passé…

 

)(

 

    Je suis conscient de mon âge, du fait de vieillir et que les questions  soulevées au billet 14 (la dépression : pourquoi ? comment ? où ?) ces questions deviennent futiles. Elles ne résolvent rien.

N’en reste qu’une. Elle fait allusion au personnage imaginaire créé afin de mieux subir mon séjour à l’hôpital psychiatrique de Saïgon. Qu’arrive-t-il avec lui ? Je ne souhaite pas le voir disparaître parce qu’il est le seul à pouvoir dire « jamais, plus jamais dans cet hôpital», ces mots qui ramènent à mon cerveau ce que vous avez lu depuis le début de ces billets.
 
Je m’arrête ici, convaincu que chaque jour sera un combat, celui de continuer d'être qui je suis devenu.
 
FIN



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