mercredi 27 juin 2012

QUATRE ( 4 ) CENT-TRENTE-DEUX ( 32 )


À la réflexion, je me rends compte que d'avoir divisé en quatre étapes distinctes (installation/adaptation; acclimatation; prise de possession; constatation et prégnance), les avoir situées dans le temps (un mois chacune) cela ne tient pas la route. En effet, on doit s'installer selon l'endroit où l'on se trouve et je ne me trouvais pas toujours au même endroit, de sorte que cette étape réapparaissait à chaque moment d'un départ et d'une arrivée. Pour ce qui est de l'acclimatation, je peux réellement dire que j'y suis arrivé à la fin du mois de janvier et que le processus d'adaptation, un travail de tous les jours.

Voici ce que j'entends par «acclimatation»: vivre dans un milieu différent de son milieu d'origine. Ensuite, «adaptation»: se mettre en harmonie avec les circonstances, le milieu dans lequel on se trouve. Finalement, ces deux concepts se sont plus souvent croisés, interpelés et revenus tout au cours du voyage en raison sans doute de l'absence de repères dans l'environnement proche. On avait beau m'expliquer telle coutume, telle habitude, telle réaction, telle manière de faire, je réussissais à les comprendre, mais les intégrer, une autre paire de manches. Tellement facile à dire qu'il est si simple de faire ainsi, de faire comme ça... plus rapide, plus évident! Je crois que tant et aussi longtemps que tu n'es pas en harmonie avec chacune des circonstances, chacun des lieux, que tu ne cesses de comparer un nouveau milieu avec celui de ton origine, tu te trouves encore sur le chemin vers l'adaptation.

On dira... prendre un mois pour s'acclimater ... c'est un peu long. Sans doute. Mais je réalise, en faisant cet espèce de bilan, que vivre à 30 degrés Celcius quasi jour et nuit, modifier sa routine occidentale au niveau des repas et du repos, habituer son oreille à des sons pour certains connus, pour d'autres entièrement nouveaux, à la langue principalement, devoir pour une très bonne partie de ta vie quotidienne t'en remettre à quelqu'un d'autre, il faut se donner le temps, s'armer de patience et faire confiance autant aux autres qu'à soi. Donner le temps à l'horloge biologique d'ajuster son appareil!

Il existe diverses méthodes pour apprendre à nager: le cours progressif avec tous ces niveaux à franchir, les différentes étapes ou encore la méthode radicale, c'est-à-dire que tu te lances à l'eau (ou on t'y jette carrément) et tu te débrouilles pour ne pas te noyer. Par analogie, j'ai opté pour la voie progressive, donc placé en mode observation/questionnement. Je savais que la question du temps ne posait pas problème: j'étais là pour trois mois et les choses n'allaient pas se déplacer à un point tel que je les aurais ratées si je n'allais pas à leur rencontre au cours de la première semaine. Autre élément, mon guide craignant le soleil, les premiers temps, la majorité des activités se déroulaient en fin d'après-midi et en soirée. Par chance, à l'appartement loué dans le District 2, il y avait une piscine où je pouvais me délasser et, sous de magnifiques palmiers, lire à l'ombre sans être absolument dérangé par qui que ce soit, y passer des heures complètement seul. Ce lieu m'aura permis des périodes de repos inoubliables.

Autre élément avec lequel j'ai eu à m'acclimater puis m'adapter: la motocyclette. Ce moyen de transport aura été le plus important que j'aurai utilisé. Je ne reviendrai pas sur son importance à Saïgon qui est incommensurable, mais plutôt sur le fait qu'à titre de passager je devais manifester une totale confiance au conducteur, ne pas lui nuire et maîtriser mes réactions qui, au début, se faisaient nombreuses... Rouler en moto dans Saïgon est une aventure et jusqu'à la fin, une aventure renouvelée. Je me souviens parfaitement qu'au retour d'une visite dans la ville ou d'un restaurant, descendant de la moto je ressentais l'essentiel besoin de me délier les muscles non pas seulement des jambes ou du dos, mais du corps entier. Constamment aux aguets j'avais cette impuissante impression de ne pas pouvoir intervenir afin d'éviter ceci ou d'aider à cela. La moto aura été pour moi une source de lâcher-prise extraordinaire. De confiance et d'aveu d'impuissance. De collaboration aussi, car mon guide me disait comment agir pour faciliter un dépassement ou effectuer tel ou tel type de manoeuvre. J'avoue qu'un mois m'aura été nécessaire avant de pouvoir monter sur l'engin en tout confort. J'avoue aussi que la moto est idéale pour visiter, un peu moins pour prendre des photos, et qu'à notre arrivée dans les différentes villes où nous avons séjourné, elle faisait partie de nos indispensables.

L'acclimatation/adaptation à la nourriture fut rapide et combien agréable. Du début à la fin, se nourrir au Vietnam - que ce soit à l'appartement, au restaurant ou directement à l'extérieur, sur le trottoir - aura été l'occasion de belles expériences culinaires. Je ne peux pas dire la même chose pour la Chine. Il faut toutefois oublier le vin; trop chaud. La bière quand je pouvais en trouver de la froide désaltérait parfaitement bien. Dans je ne sais trop combien de restaurants où nous avons mangé, à Saïgon d'abord, tout était délicieux, frais et rapidement servi. Ailleurs, que ce soit au centre du pays ou plus au nord, les particularités culinaires m'ont ravi. On mange très bien au Vietnam et à des prix qui défient toute concurrence. À l'appartement, mon guide qui s'est avéré un cuisinier hors-pair m'a principalement fait goûter à des spécialités familiales, beaucoup à base de crevettes, calmars et de porc. Partout, légumes et fruits en abondance. Je puis dire que cette acclimatation/adaptation fut agréablement facile.

À la fin du mois de janvier, la chaleur ça allait - seulement un des trois climatiseurs fonctionnait en milieu d'après-midi - la moto aussi, la nourriture parfaitement bien, l'environnement humain (la famille de mon guide et ses amis, les amis des amis) m'est devenu un réseau fiable, je pouvais bouger de plus en plus seul dans Saïgon, les activités entourant le Têt, une occasion supplémentaire de vivre de plus près la vie et la culture vietnamienne, les quelques jours à la mer (Mui Ne) alors que nous y sommes allés par autobus ce qui a permis de découvrir la campagne vietnamienne et des gens plus intimement en raison des autobus-lits, à la fin du mois de janvier je peux vraiment dire que je suis acclimaté. Pour ce qui est de mon processus d'adaptation, il est en mode asiatique.

J'achèverai ces commentaires qui tournent principalement autour de l'acclimatation/adaptation en me posant une question. Y a-t-il des choses auxquelles l'occidental que je suis n'aura pas réussi à s'adapter? Le processus est quotidien, chaque jour apportant son lot d'images qui bousculaient mes schèmes. Il s'agissait parfois de détails insignifiants (les poules qui circulent sur la voie publique en plein coeur de Saïgon), parfois plus saisissants, ici je songe aux différentes illustrations de l'histoire du Vietnam que les musées (de Saïgon) nous appellent à réfléchir. Aussi, voir toutes ces personnes âgées qui travaillent dur et solide, sous un soleil de plomb, sans s'arrêter jamais, mus par une espèce de devoir quotidien où la survie semble en être le moteur. Ces personnes handicapées qui vous offrent des billets de loterie. Ces femmes qui, sur le coup de 17h, sortent de leur maison avec un petit hibachi et cuisent leurs spécialités sur le bord du trottoir. Mais pour répondre directement à la question, je crois qu'une chose avec laquelle j'aurai eu un peu plus de difficulté fut de devoir ralentir mes élans naturels vers les gens sachant que je ne pourrai pas approfondir ni une conversation ni une rencontre. Et à ce niveau, la Chine trône en tête de liste. Dans les deux villes visitées, le contact avec le peuple chinois fut nul. Au Vietnam, plus facile, mais la barrière linguistique était souvent infranchissable.

La prochaine fois, nous verrons ce que j'entends par la prise de possession, la constatation et la prégnance.

À la prochaine




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