lundi 9 mai 2022

É P I L O G U E

                                                        ÉPILOGUE


 L’humanité comprend plus de morts que de vivants. 

Auguste Comte

 

 

    L’épilogue permet de lancer quelques pistes sur le prolongement ou les répercussions des événements mentionnés dans les pages précédentes et qui constituèrent le noeud de l’histoire. Celui-ci n’ira pas dans cette direction. Le narrateur laisse au lecteur toute la place pour y penser.

Qu’est-il devenu de l’argent obtenu par la vente des rubis ?

Ce que vous voulez bien qu’il en soit.

 

Les amours entre nos deux vieilles personnes, celles entre le jeune poète et la docteure ?

Laissez votre imagination vagabonder vers le meilleur des mondes pour chacun d’eux.

 

Est-ce que Douch connaît, enfin, la date de son procès ?

En 2005, on nage toujours en pleine inconnue.

 

Lotus, se remettra-t-il du décès de Mister Black, son retour dans le Mékong le satisfera-t-il ?

Il faut s’en remettre à son caractère combatif et son inestimable appétit pour la connaissance.

 

Qu’est-il advenu de l’assassin des deux colonels abattus dans le café Nh Sông ?

Le narrateur se permet de croire que l’intervention du père de Thi et celle de l’homme au bracelet de jade lui aura évité plus d’inconvénients que ceux dont il était victime en vivant comme sans-abri, sous les ponts de Saïgon.

 

Hermès ?

Il aurait franchi à nouveau la frontière pour s’établir avec sa famille à Phnom Penh, travaillant pour son ami médecin-pharmacien.

 

 

    LES ANCIENS COLONELS, cette histoire énigmatique remplie de rebondissements s’achève donc ici. On a demandé au narrateur de départager le vrai de la fiction, le réel de l’imaginaire. Il répond : parfois, la fiction dépasse la réalité.

Jamais cette Phalange n’a existé, tout comme l’affaire des rubis des Khmers Rouges - il signale toutefois qu’il y aurait un fond de vérité à cette information - jamais les ministères vietnamiens n’ont songé à la création d’une telle unité spéciale, tout comme la capture de Pol Pot n’a pas été envisagée par qui que ce soit dans l’administration gouvernementale et que l’objectif d’une présence vietnamienne au Cambodge n’avait pour seul objectif, celui de libérer un peuple du joug de ce groupe fanatique.

Quel but a motivé le narrateur en se lançant dans cette aventure romanesque : dénoncer le génocide en ramenant à l’avant-scène celui du Cambodge réellement survenu durant les années Pol Pot ; décrier les affres de la guerre et les monstruosités que certaines idéologies dogmatiques représentent pour les civils.

Nous pourrions questionner à n’en plus finir le pourquoi de cette soumission aveugle des Cambodgiens, leur obéissance inconditionnelle à répondre aux ordres fallacieux des Khmers Rouges et combien d’autres interrogations surgissant à notre esprit. Y répondre parut impossible au narrateur. Tellement d’événements précédant ou provoquant cette situation rappellent à quel point nous avons été sciemment éloignés du quotidien de la vie politique régnant au Cambodge entre les années 1975 et 1979, alors que ses habitants ne recevaient que des ordres à suivre.

Le monde entier ne savait que peu de choses, le pays s’étant littéralement coupé des liens extérieurs à son territoire, de sorte qu‘il devient impossible de porter un jugement autant sur son silence et sa non-intervention.

Visiter les “killing fields” et la prison S-21, 30 ans plus tard, ne change rien aux atrocités qui s’y sont déroulées. On aura beau chercher dans Phnom Penh, cette ville redevenue vivante, il sera difficile d’accoster un Cambodgien souhaitant parler de ces années cauchemardesques. Au fond de lui-même, encore interpellé par cette période, il observe un silence meurtri.

Cet épilogue n’en est pas tout à fait un, il ressemble plutôt à un aveu d’impuissance. Celle ressentie lorsque éclate à nos yeux, dans un fracas indescriptible, la cruauté d’hommes recherchant le pouvoir qu’ils auront bâti sur la peur des gens, agitant l’espoir d’un avenir meilleur.

Les monstres décrits dans cette fiction, ne sont pas exceptionnels. Ils sont réapparus ailleurs au cours du XXe siècle ; il est fort à parier qu’ils puissent renaître sous d’autres artifices. Si ce n’était strictement que pour cela, un devoir de mémoire nous oblige à partager aux générations actuelles et futures, le contenu de ces pages sombres de notre histoire qui se targue d’être humaine.

Le narrateur ne peut oublier, jamais n’oubliera sa dernière visite à la prison Tuol Sleng, la sinistre S-21, alors que de jeunes étudiants cambodgiens accompagnés de leurs enseignants, déambulaient d’une section à une autre. Ils lui semblèrent éloignés émotionnellement, notant dans un cahier d’exercices quelques réponses aux questions qui s’y trouvaient.

Qu’est-ce qui se jouait dans leurs cerveaux ? Allaient-ils, de retour à la maison, interroger leurs parents, chercheraient-ils à savoir si, quelque part dans leur famille proche ou éloignée, un des leurs y aurait été enfermé, interrogé, martyrisé, puis déplacé vers un “killing field” ?

Le narrateur croit qu’il n’en est rien. Sans doute, en est-il rien aussi pour ces touristes, suivant un itinéraire dans lequel cet endroit était un arrêt obligatoire, tourneront la page sur ce passé encore proche, se disant que cela ferait un excellent film d’horreur.

L’épilogue prend fin. Il laisse un narrateur hésitant, ne sachant trop s’il ferme le livre ayant eu pour sujet le Cambodge ou le Kampuchéa...

Un peu de politique à saveur batracienne... (19)

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