samedi 20 janvier 2024

Un être dépressif - 4 -

 

Un être dépressif

- 4 -

Un chien borgne sur une route brumeuse...


    Mon état d’être à Da Nang (principale ville du Centre du Vietnam) correspond à ceci  : silhouette amaigrie, physionomie fatiguée, incapacité majeure à dormir malgré la médication, appétence devenue inquiétante pour mon ami Phuoc qui propose une foule de menus variés afin de la combattre, se demandant toutefois comment j’arrive à pouvoir refuser un verre de vin rouge.

Les randonnées en bordure de mer s’espacent en raison de mes pas ralentis. Je me sens contraint d’y aller pour CaCao, le chien borgne que mon voisin de palier a adopté dès son arrivée en ville. Un rêve d’enfance auquel ses parents ont toujours opposé une fin de non-recevoir.



    Fin février, deux événements distincts l'un de l'autre m'amènent sur une route inconnue, de plus en plus brumeuse. Malgré le fait que Da Nang, troisième cité en importance du Vietnam, soit moins envahie par les touristes étrangers, perçus comme les agents de propagation de la covid-19, on n'hésite pas à réagir férocement à l'apparition des premiers cas liés à ce que l'on nomme encore "épidémie", par des restrictions dignes de la réputation du régime communiste : un cas officialisé et la ville se retrouve fermée dans son entier pour quinze jours ; la chasse à ceux quipourraient répandre le virus se transforme en véritable inquisition.

Le deuxième événement résulte de l’insistance chez Phuoc afin que je consulte un médecin pour comprendre les causes de cette perte de poids qui, selon lui, devient problématique surtout que je ne m’alimente presque plus. Au Vietnam tout se soigne par l’alimentation, ce qui confirme le vieux dicton “quand l’estomac va tout va”... 













    Le système de santé vietnamien n’est pas gratuit pour l’ensemble de la population, encore moins pour les expats qui, par ailleurs, peuvent s’offrir des services de qualité moyennant, bien sûr, de payer le prix. Les hôpitaux, tout comme les cliniques et les polycliniques, sont régis par des normes extrêmement sévères imposées par le gouvernement et scrupuleusement respectées par le personnel médical.

Phuoc a raison, je décline, et selon lui, durement. Ma visite chez un médecin vietnamien, surpris par l’inefficacité du neuroleptique, me le fait abandonner sur le champ, le remplaçant par une molécule s’apparentant mieux, à son avis, à la paroxétine prescrite par mon médecin québécois et confirmée par celui de Saigon. Arrêt immédiat de l’olanzapine, prise du nouvel antidépresseur joint à un somnifère.

Bang !

Les portes de l’enfer s’ouvrent brutalement...

Les nuits deviennent un écran géant sur lequel mauvais rêves, cauchemars, hallucinations, divagations, chimères se combinent me faisant frissonner davantage d’un scénario à l’autre. Alors qu’avant je pouvais définir mes nuits comme des espaces durant lesquels je pouvais à tout moment ouvrir les yeux, me lever et cela dans un état de conscience qui sporadiquement devenait inconscience. Je ne sais plus, maintenant, qu’être un spectateur terrifié de tout ce qui se bouscule dans ma tête à deux pas d’éclater, avec pour but de m’angoisser.

Et ça réussit.

J’abandonne par moi-même le somnifère persuadé que les dommages s'inscrivent déjà dans mon imaginaire.

Une semaine plus tard, retour chez le même médecin qui, à nouveau, tout comme au premier rendez-vous, annule ledit médicament qui devait ressembler à la paroxétine pour m’en prescrire un autre. Je deviens cobaye d'une pharmacopée qui semble complètement dépassée pour mon état mental. 

La situation s'aggrave. Je le revois une troisième fois et c’est là qu’il admet ne plus avoir de solution autre que celle de me recommander à un hôpital psychiatrique, espérant que l’on puisse me venir en aide.

Nous sommes à la fin du mois de mars 2021...

À la prochaine





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