samedi 27 décembre 2008

Saut: 252

Le 27 décembre 2007, il y a un an exactememt, au dernier saut de l'année (le 190), je vous offrais un texte intituté «La Marche» et signé par France Théorêt.

Aujourd'hui, pour clore 2008, c'est de Yann Martel dans «L'histoire de Pi» que j'ai puisé celui-ci, sur la peur.


« Je dois dire un mot sur la peur. C'est le seul adversaire réel de la vie. Il n'y a que la peur qui puisse vaincre la vie. C'est une ennemie habile et perfide, et je le sais bien. Elle n'a aucune décence, ne respecte ni lois ni conventions, ne manifeste aucune clémence. Elle attaque votre point le plus faible, qu'elle trouve avec une facilité déconcertante. Elle naît d'abord et invariablement dans votre esprit. Un moment vous vous sentez calme, en plein contrôle, heureux. Puis la peur, déguisée en léger doute, s'immisce dans votre pensée comme un espion. Ce léger doute rencontre l'incrédulité et celle-ci tente de le repousser. Mais l'incrédulité est un simple fantassin. Le doute s'en débarasse sans se donner de mal. Vous devenez inquiet. La raison vient à votre rescousse. Vous êtes rassuré. La raison dispose de tous les instruments de pointe de la technologie moderne. Mais, à votre surprise et malgré des tactiques supérieures et un nombre impressionnant de victoires, la raison est mise K.-O. Vous sentez que vous vous affaiblissez, que vous hésitez. Votre inquiétude devient frayeur.


Ensuite, la peur se tourne vers votre corps, qui sent déjà que quelque chose de terrible et de mauvais est en train de survenir. Déjà, votre souffle s'est envolé comme un oiseau et votre cran a fui en rampant comme un serpent. Maintenant, vous avez la langue qui s'affale comme un opossum, tandis que votre mâchoire commence à galoper sur place. Vos oreilles n'entendent plus. Vos muscles se mettent à trembler comme si vous aviez la malaria et vos genoux à frémir comme si vous dansiez. Votre coeur pompe follement, tandis que votre sphincter se relâche. Il en va ainsi de tout le reste de votre corps. Chaque partie de vous, à sa manière, perd ses moyens. Il n'y a que vos yeux à bien fonctionner. Ils prêtent toujours attention à la peur.


Vous prenez rapidement des décisions irréfléchies. Vous abandonnez vos derniers alliés: l'espoir et la confiance. Voilà que vous vous êtes défait vous-même. La peur, qui n'est qu'une impression, a triomphé de vous.


Cette expérience est difficile à exprimer. Car la peur, la véritable peur, celle qui vous ébranle jusqu'au plus profond de vous, celle que vous ressentez au moment où vous faites face à votre destin final, se blottit insidieusement dans votre mémoire, comme une gangrène: elle cherche à tout pourrir, même les mots pour parler d'elle. Vous devez donc vous battre très fort pour l'appeler par son nom. Il faut que vous luttiez durement pour braquer la lumière des mots sur elle. Car si vous ne le faites pas, si la peur devient une noirceur indicible que vous évitez, que vous parvenez peut-être même à oublier, vous vous exposez à d'autres attaques de peur parce que vous n'aurez jamais réellement bataillé contre l'ennemi qui vous a défait.»


Je vous souhaite une bonne fin d'année 2008 et une belle entrée en 2009. Nous nous reverrons pour les voeux de circonstance.


Au prochain saut

lundi 22 décembre 2008

Saut: 251



À quelques jours de Noël, le crapaud vous présente ses étrennes. Vous vous en doutez, il s'agit un poème. Non, pas celui sur le temps... faut lui laisser le temps.

À ceux qui me demandent si je vais déposer un conte de Noël sur le blogue - les plus anciens lecteurs se rappelleront celui du 23 décembre 2005, le seul d'ailleurs - le crapaud répond que non, malheureusement non. Pourquoi malheureusement? Cette semaine, au cours d'une marche quotidienne dans les grands froids montréalais, les trottoirs glacés et glissants, une idée m'est venue. Cette idée aurait très bien pu devenir un conte. Mais, va savoir pourquoi! , ça ne s'est pas concrétisé. Je crois être trop pris actuellement avec mes histoires de temps...

Je repars dans quelques minutes, marcher, alors je promets que si cette veine d'idée revient me hanter, j'irai plus loin et peut-être en ferai un conte du jour de l'an...

Voici ce poème, il sera le dernier à paraître sur le blogue en 2008 et porte le titre suivant:
un astronaute, des corbeaux... au loin


Suivra la petite chronique, mais je vous en parle après ce poème. Bonne lecture!



un astronaute, des corbeaux… au loin

un astronaute marche dans la ruelle
il parle tout seul
dans sa main asséchée, une bouteille d’eau de l’au-delà,
il bat la mesure militaire,
un pas appelant l’autre


au loin… deux corbeaux le suivent


l’apesanteur pèse lourd aux talons astronautes
se colle au bitume automnal
comme de la glue martienne
du sable rouge accroché à sa ceinture scaphandre
il aspire les trous de l’univers comme des aimants dépolarisés


au loin… deux corbeaux le poursuivent


au bruit qui taraude une clôture, sursaute l’astronaute,
de muettes comètes s’y pendent, accrochées à l’envers,
radieuses de promesses aériennes
elles charrient des vents stellaires étourdissants
alors que s’enfuient deux oiseaux d’acétylène


de loin… deux corbeaux lui survivent


un télescope inversé dans son bagage inutile
tintinnabule aux talons de l’astronaute
au fond de la ruelle hébétée, il fixe des yeux
ces hordes désaccordées de corbeaux accumulés
qui embrouillent son chemin, azimut perdu


deux corbeaux, pierres de lune, s’immobilisent
deux corbeaux solaires s’éclipsent de la bande…

et de loin… s’approchent de l’astronaute



Je vous parlais, au saut 250, d'une nouveauté. Au fil de mes lectures, certains mots se sont accroché à mes yeux, à mes oreilles. Soit que leur sens m'était tout à fait inconnu ou encore leur sonorité, leur architecture m'amenaient à des images aussi inattendues que saugrenues. J'en ai fait un cachier. Je dirais, un florilège. Dans ce cahier (noir à rebords rigides) ils sont en désordre comme ils me sont arrivés. Ici, je les ai «ordre-alphabéthisés». Voici un A et un B.

Oh! oui. Je souhaitais nommer cette chronique le «mot-dit». En lisant le poète français André Frénaud, j'y ai découvert ce petit vers tout simplement génial et fort approprié à cette entreprise: «un carnet d'ivoire avec des mots pâles».


Alors les «mots-dits» iront échouer dans ce carnet d'ivoire...

(A)

A B S C O N S (adjectif)

. difficile à comprendre
- (abstrus)

(B)

B A G U E N A U D E R (verbe intransitif)

. s’amuser à des choses vaines et frivoles (comme les enfants qui font éclater des baguenaudes : petites gousses remplies d’air qui éclatent avec bruit lorsqu’on les pressent);
- muser

. baguenauder ou se baguenauder : se promener en flânant.
- se balader; flâner; musarder; se promener.


Joyeux Noël et au prochain saut

jeudi 18 décembre 2008

Saut: 250



Nous poursuivons, aujourd'hui, les citations au sujet du temps.

Le crapaud veut vous signaler qu'à partir du prochain saut (le 251) il ajoutera une nouveauté. En effet, depuis un bon moment déjà, j'épure mes cahiers de lecture et glisse ici les petits bijoux récoltés sur plusieurs années de lecture.

J'ajouterai le fruit d'un autre cahier. celui des mots qui ont frappé mon imagination depuis ce jour où je me suis mis à lire en compagnie de mon ami Robert. Robert, il est petit mais il sait tout, ou presque. Ce dictionnaire aux feuilles d'oignon m'est certainement l'ami le plus fidèle. Lorsqu'un mot m'est, me fut inconnu, je me retournais vers lui. Parfois, souvent même, il admettait son incapacité à le décrypter mais dans le grande majorité des cas, il me renseigne (gnait)...

Je vous offrirai donc, dès le prochain saut et les autres qui suivront, ces mots qui m'ont ébloui et que malheureusement nous n'utilisons trop peu. Ce sera un peu mes « mots dits»...

D'ici là, revenons au temps...



. Cette mobile image
De l'immobile éternité. Jean-Jacques Rousseau

. Le temps est une pensée ou une mesure, non une réalité. Antiphone

. Le temps et la mémoire sont de véritables artistes; ils corrigent la réalité et la ramènent plus près du désir du coeur. John Dewey

. Le plus de sable s'est écoulé du sablier de la vie, le plus clair nous devrions être capables d'y voir au travers. Jean-Paul Sartre

. La vie bourgeonne, une accélération de la vague pulsion primordiale, dans le ténébreux gaspillage du temps. W.V.O. Quine

. Il faut toujours semer derrière soi un prétexte pour revenir, quand on part.
Alessandro Bariccoo

. Hâtons-nous; le temps fuit, et nous traîne avec soi: le moment où je parle est déjà loin de moi. Boileau

. Oui, le temps qui coule, inépuisable, inexorable, le temps bouleverse toute chose. Il dévoile ce qui restait caché, il cache ce qui s'était montré, il rend possible l'impossible, il ébranle l'inébranlable. Sophocle

. Ne vous dérangez pas, le temps ne fait que passer. Vassilis Alexakis

. Qu'est-ce que le temps? Si personne ne me le demande, je le sais. Si je veux l'expliquer à qui me le demande, je ne le sais plus. Saint Augustin

. L'Homme est Éternité...
le temps est comme l'Éternité,
l'Éternité comme le temps. Angelus Silesius

. Il est grand temps de rallumer les étoiles. Guillaume Apollinaire

. ... j'ai compris que je ne vivrais pas éternellement. Il faut longtemps pour apprendre ça, mais, une fois qu'on le découvre, le changement intérieur est complet, on ne peut plus jamais redevenir tel qu'on était. Paul Auster


Et j'achèverai par les mots de deux illustres chansons.

La première, Avec le temps de Léo Ferré...


Avec le temps...
Avec le temps, va, tout s'en va
On oublie le visage et l'on oublie la voix
Le coeur, quand ça bat plus, c'est pas la peine d'aller
Chercher plus loin, faut laisser faire et c'est très bien
Avec le temps...
Avec le temps, va, tout s'en va
L'autre qu'on adorait, qu'on cherchait sous la pluie
L'autre qu'on devinait au détour d'un regard
Entre les mots, entre les lignes et sous le fard
D'un serment maquillé qui s'en va faire sa nuit
Avec le temps tout s'évanouit

Avec le temps...
Avec le temps, va, tout s'en va
Mêm' les plus chouett's souv'nirs ça t'a un' de ces gueules
À la Gal'rie j'farfouille dans les rayons d'la mort
Le samedi soir quand la tendresse s'en va tout' seule
Avec le temps...
Avec le temps, va, tout s'en va
L'autre à qui l'on croyait pour un rhume, pour un rien
L'autre à qui l'on donnait du vent et des bijoux
Pour qui l'on eût vendu son âme pour quelques sous
Devant quoi l'on s'traînait comme traînent les chiens
Avec le temps, va, tout va bien

Avec le temps...
Avec le temps, va, tout s'en va
On oublie les passions et l'on oublie les voix
Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens
Ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid
Avec le temps...
Avec le temps, va, tout s'en va
Et l'on se sent blanchi comme un cheval fourbu
Et l'on se sent glacé dans un lit de hasard
Et l'on se sent tout seul peut-être mais peinard
Et l'on se sent floué par les années perdues

Alors vraiment
Avec le temps on n'aime plus.



...la seconde, Dis, quand reviendras-tu? de Barbara.



Voilà combien de jours, voilà combien de nuits
Voilà combien de temps que tu es reparti?
Tu m'as dit cette fois c'est le dernier voyage
Pour nos coeurs déchirés c'est le dernier naufrage
Au printemps tu verras, je serai de retour,
Le printemps c'est joli pour se parler d'amour
Nous irons voir ensemble les jardins refleuris
Et déambulerons dans les rues de Paris.

Dis, quand reviendras-tu
Dis, au moins le sais-tu
Que tout le temps qui passe
Ne se rattrape guère
Que tout le temps perdu
Ne se rattrape plus.

Le printemps s'est enfui depuis longtemps déjà
Craquent les feuilles mortes, brûlent les feux de bois
À voir Paris si beau dans cette fin d'automne
Soudain, je m'alanguis, je rêve, je frisonne
Je tangue, je chavire, et comme la rengaine
Je vais, je viens, je vire, je tourne et me traîne
Ton image me hante et je te parle tout bas
Et j'ai le mal d'amour et j'ai le mal de toi

Dis, quand reviendras-tu
Dis, au moins le sais-tu
Que tout le temps qui passe
Ne se rattrape guère
Que tout le temps perdu
Ne se rattrape plus

J'ai beau t'aimer encore, j'ai beau t'aimer toujours
J'ai beau n'aimer que toi, j'ai beau t'aimer d'amour
Si tu ne comprends pas qu'il te faut revenir
Je ferai de nous deux mes plus beaux souvenirs
Je reprendrai ma route, le monde m'émerveille
J'irai me réchauffer à un autre soleil
Je ne suis pas de celles qui meurent de chagrin
Je n'ai pas la vertu des femmes de marin

Dis, quand reviendras-tu
Dis, au moins le sais-tu
Que tout le temps qui passe
Ne se rattrape guère
Que tout le temps perdu
Ne se rattrape plus.

Au prochain saut

samedi 13 décembre 2008

SAUT: 249




Suite au poème sur la mort (saut 247), le crapaud se dirige maintenant vers un thème que l'on peut placer parmi les «classiques»: le temps. Le poème qui devrait en sortir - d'ici quelques... ou plus ou moins... - abordera la question du temps comme étant cet espace entre la vie et la mort, espace inexorablement en marche.

Voici l'état de mes recherches à ce jour. Ce sont, vous vous en souvenez, des citations, des réflexions puisées à même mes cahiers de lecture. Bon temps!


. Il y a des minutes où l'avenir se présente à un homme sous des couleurs si sombres qu'il craint d'arrêter sur lui le regard de son esprit, qu'il interrompt toute activité cérébrale et s'efforce de se convaincre qu'il n'aura pas d'avenir et qu'il n'eut pas de passé. Léon Tolstoï

. Mais le temps se fout des retardataires, il court sur son cheval, et les impulsions qui arrivent trop tard retombent derrière lui dans leur néant.
Jean Bédard

. Le temps s'occupera d'égaliser, c'est sa plus noble fonction. Jean Bédard

. Mais aujourd'hui, je sais que ni le temps ni l'espace ne parviennent jamais à dissiper nos doutes. Il est inutile de remettre au lendemain ce qui demain me sera toujours aussi difficile ou aussi impossible à réaliser. Fernando Savater

. Prendre conscience de son présent, c'est ne plus rien attendre. Albert Camus

. Passons passons puisque tout passe. Guillaume Apollinaire

. L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive;
il coule et nous passons. Lamartine

. Ce temps qui est un dieu, le seul qui nous reste. Il ne se laisse ni fléchir, ni allonger, ni rapetisser. Éternel pour certains, morts depuis très longtemps pour d'autres, c'est peut-être lui, le temps, cet ange aux bras ouverts, qui nous attend, là-bas. Robert Lalonde

. Le temps humain ne tourne pas en cercle mais avance en ligne droite. C'est pourquoi l'homme ne peut être heureux puisque le bonheur est désir de répétition. Milan Kundera

. Les strates successives de notre vie sont si étroitement superposées que dans l'ultérieur nous trouvons toujours de l'antérieur, non pas aboli et réglé, mais présent et vivant. Bernard Schlink

. Longtemps, on rampe sur cette terre comme une chenille, dans l'attente du papillon splendide et diaphane que l'on porte en soi. Jonathan Little

. C'est toujours une tentation irrésistible pour les gens qui n'ont pas de passé d'essayer d'acheter celui des autres. Han Suyin

. Le temps est l'école où nous apprenons. Joan Didion

. Comment ce qui ne va pas durer peut-il avoir tant de réalité? Pierre Nepveu

. L'homme, dont le berceau est si voisin de la tombe, gaspille son temps en futilités.
Somerset Maughan

. La plupart des vieilles gens ont quelque chose de trompeur, de menteur dans leur façon d'être avec les gens plus jeunes qu'eux; on vit sans crainte à leurs côtés sur la foi de relations sûres, on sait leurs idées favorites, on reçoit incessamment confirmation de la paix, on trouve tout parfaitement naturel, mais qu'il se produise soudain un événement décisif, c'est à ce moment, où l'on devrait récolter les fruits d'une tranquillité si longtemps préparée, qu'on voit les vieillards se dresser comme des étrangers, révéler des idées plus cachées, plus fortes que les précédentes, et déployer enfin au vent leur vrai drapeau, sur lequel on lit avec effroi une devise inattendue. Cet effroi vient surtout du fait qu'ils disent alors des choses beaucoup mieux fondées qu'auparavant, beaucoup plus judicieuses, beaucoup plus évidentes - si l'évidence est susceptible de degrés. L'insurpassable duperie est qu'ils avaient au fond toujours dit la même chose. Kafka

. L'homme n'est pas, il est en train d'être... Alexandro Jodorowsky

. Ceux qu'on appelle les inadaptés, les déchets de la société (les clochards, les drogués, les dépressifs, etc.), sont sûrement des êtres qui n'ont pas eu la grâce ou la culture permettant de survivre à la folie qui menace l'être conscient de l'étrangeté de la vie. Ce sont, en un sens, les êtres les plus conscients et qu'on envoie au front sans armes, un peu comme les Aztèques nourrissaient le temps avec des sacrifices humains pour ne pas qu'il s'épuise. J'ai lu quelque part que la conscience des héroïnomanes, par exemple, est pleine de tmps, que le temps est leur unique objet de pensée. Yvon Rivard

. (BIG BEN sonne) Les cercles de plomb se dissolvent dans l'air. Virginia Wolf

. Quel sens pourrait avoir pour nous un événement qui ne nous écraserait pas? Le futur est fait pour nous immoler. Cioran

. (Yerma- la femme stérile)
- Je ne pense pas à demain, je pense à aujourd'hui. Tu es vieille et tu vois tout comme dans un livre déjà lu. Moi, je pense que j'ai soif et que je n'ai pas de liberté. Je veux avoir un fils dans les bras pour m'endormir tranquille, et écoute-moi bien et ne t'effraye pas de ce que je te dis: même si je savais que mon fils me martyrisera, qu'il me haïra, qu'il me traînera par les cheveux dans les rues, je recevrais sa naissance avec joie, parce qu'il vaut beaucoup mieux pleurer un homme vivant qui nous poignarde que pleurer pour ce fantôme assis, depuis des années, sur mon coeur.
Federico Garcia Lorca


Au prochain saut

mardi 9 décembre 2008

SAUT: 248

Règlons immédiatement la question des prédictions, ensuite on jasera.

1) Le Québec élira un GOUVERNEMENT MAJORITAIRE;
( 1/1, tout va bien jusqu'ici).

2) Le GOUVERNEMENT MAJORITAIRE sera sous la responsabilité du Parti Libéral;
(2/2, mais c'était facile).

3) L'opposition officielle sera confiée au PARTI QUÉBÉCOIS;
(3/3, rien de bien malin).

4) Il n'y aura pas de deuxième opposition et le parti de MARIO DUMONT disparaîtra de la carte politique québécoise;
(3.5/4, pas entièrement mais le chef disparaît).

5) Aucun autre parti politique n'enverra de député à l'Assemblée nationale du Québec.
(3.5/5, Québec Solidaire m'a fait mentir).

Mais il y avait aussi les deux coups fumants. Le premier étant que le crapaud ne voterait pas Vert mais plutôt Serge Mongeau dans Hochelaga-Maisonneuve. Ça s'est fait et le candidat solidaire y a récolté près de 13% du vote.

Le deuxième prévoyait la défaite de Mario Dumont dans Rivière-du-Loup: vrai à moitié; élu, il annonce qu'il quitte son parti.

Bon! Le scénario apocalyptique que le crapaud avait annoncé advenant le vote contre les velléités conservatrices idéologiques du premier ministre ( à quelque 35%) Harper, et le fait que le Québec soit sans gouvernement, cela ne s'est pas produit et la combien....etc. Mikaëlle Jean n'est pas devenue la maîtresse suprême du Canada pendant au moins une soirée. On l'a échappé belle mais avouez que c'était de la très haute voltige politique.

Que s'est-il vraiment passé au Québec le lundi 8 décembre 2008? D'abord, le froid. Voter la «guédille au nez» c'est pas évident. Difficile de dire combien de Québécois(es) ont préféré demeurer à la maison ou au travail ou ailleurs au lieu de se présenter au bureau de vote, d'y recevoir leur bulletin, s'isoler et le colorer à l'endroit de leur choix démocratique et risquer de le voir annulé lors du comptage des votes parce que la «guédille au nez» serait tombée sur le bulletin, le détériorant d'une certaine manière... Lorsqu'on ne connaît pas parfaitement bien la loi électorale on pourrait être porté à croire qu'en salissant un bulletin on risque des représailles de la part du Directeur des Élections.

Donc le froid. Deuxièmement, et ce facteur devrait je crois être pris en considération par le gouvernement: voter le jour de l'Immaculée Conception c'est un peu, beaucoup pour d'autres, une forme de profanation. Pensez aux deux termes: immaculée et conception. Pas évident. Le bulletin (sur fond noir) présentait quelques petits trous blancs (à colorer en noir). Rien d'immaculé et combien profanateur que ce geste, surtout de la part de gens qui sont de moins en moins des profanes dans l'art de voter, l'exercice se répétant assez régulièrement. Cherchons et nous trouverons certainement une journée neutre, sans pluie, sans soleil, sans froid, sans chaleur, sans vent, sans rien... et rendons-là, institutionnalisons-la, journée du vote. Comme dans le village de Babine, le 43 novembre ou le 0 avril à chaque quatre ans bissextiles.

Troisième élément et celui-là, il est de taille. Obligeons les gens à voter. Sinon? Sinon, je ne sais pas: coupons les allocations familiales, les pensions de vieillesse, les rentes et les chèques du bien-être; retenons sur le chèque de paye des travailleurs une journée de salaire; ou encore, pour faire plus moderne, donnons une prime au vote. Un vote = une prime.

Mais afin d'accélérer le processus - si on ne souhaite pas entrer dans mes propositions qui sont un peu des mesures de droite - installons un système qui permettrait à chacun des partis politiques (reconnus , officiels, déclarés, financés, accrédités) de connaître ( par leurs noms, prénoms, surnoms, initiales) tous ceux et toutes celles qui voteront pour eux, ainsi les résultats nous parviendraient beaucoup plus rapidement et dans certains comtés, les électeurs pourraient être dispensés de voter si la majorité est évidente. On téléphone au parti de son choix, on donne son nip personnel et son mot de passe, et vlan! c'est fait. Finis les attentes inutiles. Terminée la course aux pancartes sur chaque poteau de chaque coin de rue. Les partis compareraient leurs listes et le député s'imposerait de lui-même. Comme ça serait simple! Il ne s'agirait que d'ajouter le concept de justice dans la loi électorale pour achever le tout, exigeant qu'à tour de rôle et cela pendant quatre ans, les partis politiques se succèdent au pouvoir. Avouez que cela abrègerait les viles campagnes électorales...

Mais cette prospective politique n'est pas pour demain. D'ici là, réjouissons-nous de l'entrée d'Amir Khadir à l'Assemblée nationale, de la sortie de Mario Dumont, de l'arrivée d'une chef de l'opposition officielle et de l'élection d'un même parti politique formant un gouvernement pour une troisième fois d'affilée.

Tout en cela en attendant les élections fédérales... prévues pour ce printemps!

Au prochain saut

jeudi 4 décembre 2008

SAUT: 247



Le crapaud ne reviendra pas sur le psycho-drame politique canadien... même si la tentation est forte.

Lundi prochain, la situation décrite dans mon préambule aux prédictions électorales ne verra pas le jour... ou le soir. Il y a accalmie, du moins pour le moment. Mais il faut avouer que cela nous change du petit train-train habituel. Le crapaud a presque le goût de souhaiter le re-venue d'un gouvernement minoritaire à Québec, juste pour voir si nous pourrions être aussi théâtraux qu'à Ottawa....

Mais les prédictions sont faites et je n'y reviens pas.

Passons à autre chose de plus sérieux.


Je vous parlais de ce poème sur la mort. Il est présentable et vous l'offre en ce début du mois de décembre.





si mourir avait un sens



si mourir avait un sens
qui le suivrait?
yeux ouverts cœur sur la main âme alerte pied léger estomac vide
et mal de tête


si mourir avait un sens
où cela mènerait-il ?
du nord vers le sud à l’est ou à l’ouest de l’éden
où l’œil des ouragans se noie au centre des circonférences



si mourir avait un sens
qui le saisirait ?
par la peau du cou de chagrin des fesses au mieux la peau de l’autre
que peaufinerait un serpent comme un cadavre à nos pieds


si mourir avait un sens
(et comme mourir n’est pas la mort)

il n’en a pas
pas plus que ces yeux fermés sur un cœur arrêté
pas davantage qu’une âme placée à l’intersection
dirigerait le vent immobile, un pied devant l’autre,
en route vers les mots ne sachant dire le sens délétère de la mort
que par des abstractions chimériques
aussi grandes que des trous noirs à l’intérieur de l’épiderme

si mourir avait un sens
(et puis mourir n’est pas la mort)

il n’en a pas
pas plus que la signalisation-cul-de-sac qui obstrue nos vies
gommée à des panneaux frais peints annonçant le début
de cette marche létale vers des décors factices
puis s’arrêterait, sens dessus dessous,
comme paralysée de peur et de honte,
là où les boussoles déréglées rejoignent le néant




Au prochain saut

Si Nathan avait su (12)

Émile NELLIGAN La grossesse de Jésabelle, débutée en juin, lui permettra de mieux se centrer sur elle-même. Fin août, Daniel conduira Benjam...