Eudore en compagnie de l'oncle Robert et d'une de ses Cadillac. |
On peut lire J.E. Bergeron & Fils |
Eudore
et
Coburn Gore
Quatrième partie
Voilà, c'est tout.
Par ''c'est tout'' je veux dire que le plan tracé au départ, - souligner le 130ième anniversaire de naissance de grand-papa Eudore Bergeron - est exécuté. En fait, l'intention derrière cet exercice soutenait l'idée de nous le rappeler.
J'avais en tête, au départ, deux grandes idées:
la première portait sur ma conversation avec Eudore suite à la réception de mon baccalauréat en pédagogie;
la deuxième, raconter cette semaine hivernale passée en sa compagnie à Coburn Gore. Il fallait faire ressortir le caractère du grand-père, un peu de son cheminement et beaucoup insister sur l'importance que le camp de Coburn Gore revêtait à ses yeux.
Il ne fallait surtout ne pas errer dans les dates. Je devais donc faire corroborer certains détails essentiels à la véracité du texte. Qui de mieux que cousine Danielle pour me renseigner sur ce dont ma vacillante mémoire trop souvent culbutait. Elle aura eu l'immense privilège de cohabiter avec lui et cela dès sa naissance: Eudore, ainsi que Rose-Anna et tante Lucienne. Donc, témoin de première ligne. Nos échanges de courriels ont ravivé je ne sais trop combien de souvenirs. À partir des anecdotes qu'elle m'a racontées, des braises ont repris feu. À tel point que je ne suis plus du tout pressé d'achever cet hommage à
Eudore.
Nous partageons, Danielle et moi - et sans doute plusieurs autres cousins, cousines de la grande famille Bergeron - un attachement profond envers ce grand-père dont je souhaite voir, tout comme elle, sa mémoire demeure vive au coeur de nos vies .
Je souhaitais aussi recevoir des documents de cette époque. Ici, cousin Yves, par ses trésors inestimables que représentent les photos qu'il m'a fait parvenir, fut d'une aide inestimable
Je crois en immortalité, c'est-à-dire tant et aussi longtemps que nous citons le nom d'un être, celui vit toujours. C'est mon souhait: remettre Eudore, sa vie, ses nombreuses oeuvres frais dans nos souvenirs.
Il fut le pivot d'une famille peu ordinaire. Il aura fondé, avec grand-maman
Rose-Anna, un clan (ensemble de familles se groupant autour d'un même chef et ayant un ancêtre commun); une lignée; une filiation spirituelle.
Eudore Bergeron aura été beaucoup plus que le président d'une compagnie exploitant un produit, la margarine. Il aura été un monument dédié à l'honnêteté, la générosité et à l'honneur. Toute sa vie fut consacrée au travail bien fait, à la recherche de l'excellence. Excellence en tout.
Homme de peu d'instruction il fut doté d'une éducation exceptionnelle qui lui a permis d'être respecté à bien des égards: les affaires, la politique, la philantropie et la spiritualité. En effet, Eudore fut un être qui n'a jamais douté. Sa croyance religieuse ne logeait pas dans les bénitiers mais dans l'actualisation quotidienne des préceptes chrétiens qu'il aura suivis à la lettre.
Encore je le revois, lors du chapelet quotidien que grand-maman récitait. Les yeux fermés, il continuait la prière là où grand-maman s'arrêtait, mais je sentais qu'il était plus loin que la mécanique des réponds. Son esprit pragmatique devait sans doute le mener là où nous n'étions pas. Il n'a pas pratiqué une religion de demandes, d'exhortations, de suppliques. Il pouvait par lui-même répondre à ses besoins. Il n'allait certainement pas embêter qui que ce soit avec cela.
Danielle, dans les extraordinaires petits moments qu'elle se rappelle et me relate, fait rejaillir tant et tant de choses.
D'abord, que le chalet de Coburn Gore, on l'a toujours nommé le ''camp''. On allait au camp...
Puis, la présence de l'oncle Napoléon,
frère de grand-maman Rose-Anna. Cette force de la nature me raconta un jour avoir été de l'équipe ayant peinturé le pont Jacques-Cartier à Montréal, au milieu des années 1920, avec pour équipiers des Mohawks de Caughnawaga (aujourd'hui Kahnahwake). On avait retenu sa candidature en raison du fait qu'il ne souffrait pas du vertige.
Le fait qu'Eudore prononçait le nom de la cousine-germaine de grand-maman
Les corvées de bois à Coburn Gore que le grand-père dirigeait avec son ardeur coutumière, la mettant à l'oeuvre très tôt le matin, au risque de réveiller tout le monde. Je me rappelle celle que l'on fit tout près du camp Etcheverry, là où tante Paulette faillit mourir de peur alors qu'un ours noir surgit à quelques mètres d'elle.
Les interminables soirées de cartes (500). Grand-maman adorait et on la taquinait, lui disant qu'elle trichait. Elle s'assoyait toujours à la même place, aimait bien avoir tante Lucienne pour partenaire autant qu'elle raffolait prendre la mise. Je dois avouer qu'elle était une excellente joueuse. Mon père Gérard, grand preneur lui aussi, la forçait continuellement à grimper sa prise, ce qu'elle faisait sans se faire prier.
Puis, au grand déplaisir d'Eudore, elle sortait le ouidja... Tout notre avenir allait être dévoilé.
Que dire aussi de la cueillette des fraises sauvages, des framboises et des bleuets. Eudore connaissait les bons ''spots''. Ça se terminait en de fabuleuses tartes!
Malgré qu'Eudore ne fut pas un marin d'eau douce, il avait acheté un chaland, aujourd'hui nous dirions un ponton. Je ne sais pas si quelqu'un se rappelle l'avoir vu y monter, moi pas. Que cousine Marie-Anne partir en chaloupe afin de voir ce que les castors fabriquaient ou détruisaient. Elle ramait alors que les huards jasaient avec elle.
Danielle me rappelle avoir appris par lui le nom des arbres. Eudore ne parlait que de ce qu'il connaissait, autrement il se taisait. Mais grand Dieu! qu'il écoutait. Tout ce que ce cerveau mathématique emmagasinait relève de la légende. Sa mémoire phénoménale ne lui a jamais fait défaut mais il avait l'habitude, avant d'énoncer quoi que ce soit, de vérifier l'information par des questions concises et précises.
Coburn Gore fut pour Eudore un royaume où il régnait en maître absolu, mais son pied à terre restera toujours en haut de la beurrerie - Danielle dit en haut des ''boilers'' - Il y faisait une de ces chaleurs que seule tante Lucienne savourait. Je me rappelle qu'elle dormait dans sa chambre surchauffée, une couverture électrique sur le dos, poussée au maximum.
Tous se souviennent des réveillons de Noël dans cette maison où nous nous entassions à je ne sais plus combien d'oncles, tantes, cousins et cousines. Des préparatifs en vue des Fêtes, Danielle saurait mieux que moi vous en parler mais je me rappelle que tante Lucienne avait l'immense tâche, disons plutôt la corvée, de monter à Montréal, chez Eaton, acheter les cadeaux pour tout le monde. Elle profitait de la parade du Père Noël pour s'y rendre, accompagnée d'une cousine: le magasinage, c'était pour les filles.
Tante Lucienne n'oubliait jamais personne sauf elle-même j'en suis convaincu. Comme elle dut être heureuse l'année où Eudore décida que ''les enveloppes'' qu'il offrait à ses enfants, gendres et brus, allaient s'étendre aux filleuls.
Dans ma souvenance, les vacances de Noël pour la famille Turcotte débutaient par un voyage en train. Nous partions de Saint-Hyacinthe, nous arrêtions à la gare de Bromptonville située tout juste en face de chez l'oncle Philippe qui nous attendait. Impossible d'oublier notre joie lorsque celui-ci, un homme jovial comme il s'en fait plus, nous accueillait. On ne le disait pas mais tous nous savions qu'il allait devenir le Père Noël quelques heures plus tard.
Je me rappelle également l'année où l'oncle Philippe fit du film. Comme nous nous sentions importants, impatients de voir les résultats. Ils doivent certainement encore exister rangés quelque part.
Ah! quel beau temps ce fut...
J'achève cet hommage en vous invitant à y joindre un souvenir d'Eudore, une anecdote, une photo et je souhaite que de ces quelques pages, IL puisse renaître en nous, là où de toute façon il vivra toujours.
P.S. Comme le dit si bien le dicton: ''toute bonne chose a une fin''... alors je vais l'inverser et dire: ''toute fin amène une bonne chose''. Alors je vais publier en épilogue quelques photos... qui en feront rougir quelques-un(e)s, sourire d'autres mais surtout intéressantes du fait qu'elles furent prises à l'époque d'Eudore. Et là ça sera vraiment la note finale. À la prochaine.
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