lundi 17 avril 2006

Le cent seizième saut de crapaud



Du soleil imprimé sur le corps, le crapaud est de retour de Cuba suite à une semaine « outrageusement » belle. Le soleil y était, dans toute sa chaleur, sa beauté et sa clarté.

Et la mer cubaine, cette jeune fille aux couleurs changeantes, aux allures de princesse caraïbe ; cette mer à la fois bleue, turquoise et verte nous recevait le matin en s’ébrouant des mille moutons plus blancs que les nuages qui se collaient à elle ; cette mer qui ne nous a pas dit si elle connaissait celle de l’Anse-au-Griffon ou de Cap-des-Rosiers mais, narquoise, nous glissait à l’oreille d’espagnoles sérénades. Elle savait, entre chaud et tiède, se mêler au sable blanc s’étendant plus loin que les traces dorées des rayons du soleil au bout de la plage. On s’y avançait, pieds nus, empreintes aussitôt remplies et à jamais perdues, en route vers rien. Une plongée de la berge vers le soleil déjà chaud, en lutte contre cette humidité dont l’odeur est si personnelle.

Une île au loin, dans son écrin brumeux ; un rocher plus noir que les couleurs de la nuit ; des coquillages vomis qui se bousculent à nos pieds ; un marcheur ; une promeneuse ; trois enfants qui pleurent le château de sable délavé ; et ce bruit à la fois léger et lointain mourant dans nos matins engourdis.

Puis, tout doucement, comme sortant d’un cocon diaphane, le jour se levait. Il allait, lui et les autres, être beau. Paresseux. Se cherchant des longueurs infinies. S’enrobant de chaleur, celle qui donne des frissons.

Une semaine en-dehors du temps... Ne penser qu’à ne pas penser... Se laisser aller au rythme des heures insulaires... Ne regarder que là où le regard courbe, au loin, si loin que la distance n’a plus d’espace pour s’imprégner d'instants que l’on souhaiterait éternels.

Goûter au sel marin que les vagues aspergent sur le corps. Laisser le sable dessiner sur nos pieds et nos mains, de naïves toiles éphémères. Arrêter les rythmes fous en les inondant de rhum sucré et froid. Sourire à ces visages inconnus hier, amis aujourd’hui. Ne dire rien d’autre que des hommages intimes au bien-être d’être là, où sans doute, un jour, une main magistrale dans un élan d’une pureté inachevée aura déposé la beauté d’une splendeur sans pareille.

On ne compte pas les heures et les jours de la même manière lorsque c’est les vacances. Ils deviennent des instants de bonheur, de plénitude... une recharge d’énergie !

Cuba est une île qui sait encore le demeurer, qui sait encore se protéger des invasions délétères d’attaques sauvages contre sa beauté. Elle respire bon et permet à son peuple fier et bon-enfant de vivre comme si ailleurs n’existait pas, ne pouvait l’atteindre dans son intrinsèque volonté à demeurer pure. Elle se protège. Elle conserve cette conscience de la mer, du soleil et de la plage. Du vent qui arrache aux palmiers les plus délicates volutes.


Le crapaud revient de Cuba l’âme et le cœur renouvelés, vous conviant à reprendre là où nous avions laissé le flot de ses petites histoires et de sa poésie. Il a su mieux comprendre ce Francis-poète, lorsque celui-ci disait à notre grand-père que l’extérieur est la porte d’entrée vers l’intérieur. Ne pouvant pas s’éloigner de la mer, il lui a ouvert encore davantage son esprit, lui laissant toute la place nécessaire afin que l'imagination continue sa route.
La mer c’est le lointain s’approchant, charriant avec elle, les retenant sur ses vagues complices, mille et une paroles d’un langage qui ne demande qu’à s’éclabousser. Le ressac que l’on retient entre nos doigts ouverts.

Bon retour au crapaud et surtout, bon retour à ses pages de plus en plus indispensables.


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