mercredi 18 juin 2025

Une chandelle

 



Avec le temps, certaines métaphores, en poésie, sont devenues clichés, lieux communs et stéréotypes qu'on voit venir à des kilomètres. Permettez-moi de vous en citer quelques unes : 

. la flamme qui bat dans sa poitrine;...
. elle est la lumière qui éclaire mes jours...
. les fenêtres de l'âme...

Toutefois certains auteurs de haute qualité ont utilisé la métaphore pour en confectioner un chef-d'oeuvre. Permettez-moi de vous en citer quelques-uns :

. Charles Baudelaire dans LES FLEURS DU MAL
« La nature est un tremple où de vivants piliers / Laissent parfois sortir de confuses paroles»

. Albert Camus dans LA PESTE utilise la métaphore de la peste pour représenter les fléaux moraux et sociaux : 
«La peste n'est pas seulement un fléau, c'est aussi un miroir.»

. Franz Kafka dans LA MÉTAMORPHOSE alors que son personnage central se réveille un matin  : 
« En un instant , il se trouva dans son lit, en un affreux insecte.»

. Lautréamont dans LES CHANTS DE MALDOROR :
«Je rêve d'une poésie qui soit à la fois la lumière et la nuit.»

Dans le poème que j'offre aujourd'hui, la métaphore de la chandelle - ô combien de fois utilisée pour désigner l'abrégement des heures, des jours, de la vie - je la reprends à quelques jours de mon 78e anniversaire de naissance. C'est beaucoup un message à moi-même.

Il faudrait le lire comme si vous étiez devant cette chandelle, vous amusant comme lors d'un anniversaire on souffle les bougies du gâteau, à la faire chavirer, pas complètement, tout doucement, délicatement.


Chandelle

 

 

la chandelle          doucement          s’éteint
je te regarde la regarder
tu la fixes comme on fixe l’inconnu
                                                     l’éternité peut-être
elle a pleuré toutes ses larmes de cire
agité sa flamme qui te saute aux yeux
tu souris comme tu aimes sourire
sans crainte
 
la suivante attend              déjà
d’un blanc immaculé elle repose dans ta main
elle aura son moment de gloire éphémère
                                                    ou d’éternité peut-être
 
ne restera dans tes yeux tourmentés
que l’idée d’une chandelle blanche, immaculée
mise à feu par tes doigts inquiets
rejoignant la précédente sur un nuage de fumée
                                                   pour l’éternité peut-être
 
elle aura pleuré aussi toutes ses perles de cire
d’une autre couleur toutefois
et ton sourire sera terre à terre
alors qu’il était entre ciel et terre
                                                  au bout de l’éternité ou presque
 
tu es chandelle, te consumes comme elle
qu’importe qu'elle soit immaculée, blanche
c’est en fumée diaphane, toi, que tu te corrodes
dans cette étrange ferveur de la flamme
tantôt timide                     tantôt altière
                                                 à la porte des éternités




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Une chandelle

  Avec le temps, c ertaines métaphores, en poésie, sont devenues clichés, lieux communs et stéréotypes qu' on voit venir à des kilomètre...