lundi 29 décembre 2025

LE BONHEUR, poème de Daniel Cyr

 


Lorsque, généreusement, mon Ami Daniel Cyr accède à ma demande de publier un de ses textes, le bonheur m'envahit; il se multiplie à l'idée que d'autres lecteurs, ceux du CRAPAUD entre autres, pourront s'en délecter.

Daniel est plus qu'un poète, je le définis comme étant cet «éclaireur» qui, du haut de sa rotonde, scrute les mouvements du temps extérieur, les décortique avec cette sensibilité flegmatique qui caractérise autant ses mots que ses idées. 

Ses yeux observateurs dénichent dans nos temps intérieurs l'endroit précis où un besoin de «rassurance» cherche quelques issues. De son âme philosophe, une vieille âme, de celles qui ont su capter  l'invisible, Daniel rend le visible plus clair, mieux accessible et... davantage intelligible.

Ce poème qu'en son nom je nous offre, LE BONHEUR, est beaucoup plus qu'un voeu à l'occasion de la nouvelle année, c'est un psaume en ces heures fragiles.


                                           Le Bonheur

    Le bonheur n’a point de trône,
    il ne règne pas.
    Il passe.
    Il est de ces hôtes invisibles
    que la vie envoie sans prévenir,
    comme un rayon d’aube
    qui fend la nuit sans la combattre,
    comme une clarté furtive
    posée sur le front des hommes fatigués.

    Il entre en nous
    à pas d’ange.
    Il ne frappe point aux portes orgueilleuses ;
    il glisse par les fissures du cœur,
    là où la douleur a laissé place au silence,
    là où l’homme a cessé de réclamer
    et commence à comprendre.

    Ô bonheur !
    Tu n’es ni richesse ni victoire,
    ni l’éclat tapageur des heures comblées.
    Tu es l’instant accordé
    où l’âme cesse de se débattre
    et consent enfin à respirer.

    Tu viens apaiser les tempêtes intérieures,
    non en les niant,
    mais en leur donnant un sens.
    Sous ton souffle,
    les larmes deviennent semence,
    la fatigue devient sagesse,
    et les jours les plus sombres
    apprennent à porter leur propre étoile.

    Mais tu es libre,
    farouchement libre.
    Tu refuses la chaîne,
    tu fuis la cage,
    tu te dérobes à la main qui veut te saisir.
    Car demeurer serait te trahir :
    tu deviendrais habitude,
    et l’habitude est une nuit sans mémoire.
    Lorsque tu t’éloignes,
    l’homme te croit perdu.
    Il se trompe.

    Tu ne pars jamais sans laisser
    un frémissement de lumière
    au fond de la conscience,
    comme un rappel secret
    que la joie existe
    et qu’elle a déjà été vécue.

    Tu te caches alors,
    non par indifférence,
    mais par miséricorde.
    Tu laisses l’homme marcher seul,
    chuter, se relever,
    apprendre la gravité du monde,
    afin que ton retour
    ne soit pas banal,
    mais reconnu.

    Et lorsque tu reviens — car tu reviens toujours —
    tu ne reviens pas le même.

    Tu reviens plus profond,
    plus vrai,
    plus humble.

    Tu trouves une âme moins avide,
    une espérance plus lente,
    un regard capable de gratitude.
    Alors, le bonheur cesse d’être désir :
    il devient accord.
    Il n’est plus promesse,
    il est présence.
    Il ne crie pas,
    il éclaire.

    Et l’homme comprend enfin
    que le bonheur n’était pas à atteindre,
    mais à accueillir ;
    non à retenir,
    mais à honorer dans son passage.

    Car le bonheur n’est pas l’éternité,
    mais il en est la preuve.
    Hommes, souvenez-vous !
    Ne maudissez point l’heure où le bonheur s’éloigne,
    car ce n’est pas un abandon,
    c’est une leçon.
    Ne confondez pas l’absence avec le néant,
    ni le silence avec la fin.

    Ce qui fut vrai un instant
    demeure vrai pour toujours
    dans la mémoire de l’âme.
    Respectez le bonheur comme on respecte la lumière :
    on ne la retient pas,
    on s’en éclaire.

    Qui veut le posséder le détruit ;
    qui sait l’attendre le mérite.
    Marchez donc sans amertume,
    car chaque pas porté avec droiture
    prépare son retour.

    Vivez avec assez d’humilité
    pour reconnaître l’instant,
    et assez de courage
    pour le laisser passer.
    Car le bonheur n’est pas une récompense,
    il est un signe.
    Il ne couronne pas les vies parfaites,
    il visite les consciences éveillées.
    Et lorsque, dans la nuit des jours,
    il reviendra frapper à votre cœur,
    ouvrez sans peur.
    Non pour le garder,
    mais pour lui dire merci.

    Car avoir connu le bonheur,
    fût-ce une seule fois,
    c’est déjà ne plus jamais être tout à fait perdu.

    - Daniel Cyr

LE BONHEUR, poème de Daniel Cyr

  Lorsque, généreusement, mon Ami Daniel Cyr accède à ma demande de publier un de ses textes, le bonheur m'envahit; il se multiplie à l...