J'aborde ce billet par un biais... celui de l'affection, non, davantage, l'amour qui est au centre de ce livre, celui d'une fille pour son père, d'un père pour sa fille. La relation - qui s'étend aussi à la famille - sur laquelle se fonde les pages que Loïse consacre, magnifiquement, respectueusement, elle nous la fait vivre d'un très jeune âge jusqu'au décès de Jean, son papa, le grand-papa de ses enfants et l'arrière-grand-papa de ceux qui nous unissent Loïse et moi, tel un pont générationnel.
Chacune des pages et elles sont fort bien écrites, fort bien documentées, chacune nous permet à la fois de suivre cet amour filial et l'évolution autant de la ville de Montréal que celle du Québec. Beaucoup de choses changent, ont changé depuis la naissance de la fille de cet homme qui mourra dans ses bras. Beaucoup. Et la chronologie du texte permet de suivre les différents mouvements qui furent la genèse d'un Québec avide d'ouverture. Déjà, Loïse, et elle nous le décrit à merveille, se retrouve immergée dans cette dynamique, la comprenant parfaitement puis l'intégrant dans ses actions futures, autant au pays qu'à l'étranger.
Nous avons été habitués à suivre des auteurs masculins, sans aucun doute fort pertinents, mais qui ne voient le monde qu'à-travers le spectre de leur genre. Le texte de Loïse sur la part manquante des évangiles m'apparaît comme un essentiel rappel que la place des femmes dans nos sociétés, en plus d'avoir été occultée et réduite qu'à l'application servile des cours d'enseignement ménager, doit s'élargir au-delà de ce que l'on nommait, l'émancipation. C'est ici qu'apparaît la louve.
Oui. Et cet élément - il faut absolument en prendre connaissance si l'on veut goûter cette ode au père - l'élément de la louve, celui qui nous a permis, Loïse et moi, de connecter profondément, provient de la pianiste et écrivain Hélène Grimaud. Il faut s'y attarder un peu et ce peu deviendra gigantesque de fascination et sans aucun doute servira de clé de lecture à ce dernier livre de Loïse.
Poétesse, romancière, il me serait plus économe d'écrire auteure multi-genres, résolument ancrée en Outaouais malgré que Montréal lui soit encore tatouée sur tout le corps, nous épate par toute une série d'épisodes de la vie tumultueuse de cet homme qui imprimera sur sa fille, un peu comme on trace une carte topographique, le mot rebelle.
Je m'attarde sur ce mot, un mot qui en «mène large» qu'il soit utilisé comme nom ou adjectif, il réfère à cette volonté de ne pas suivre une route, une orientation, un système tout cela préétabli par un ordre quelconque et supérieur. L'esprit rebelle de Loïse, je le compare à celui d'une formidable écrivain vietnamienne Dương Thu Hương qui n'a jamais hésité à défendre les droits de la femme dans un pays particulièrement machiste, une culture chancelant entre esprit traditionnel et révolutionnaire, au point d'être exclue du Parti communiste et exilée en France.
Ces deux femmes prennent la plume, disent ce qu'elles ont vu, ce qu'elles voient et beaucoup comment elles voient l'avenir, les yeux ouverts autant sur le rétroviseur que droit devant comme toute conscience éveillée.
Voilà mon appréciation du récit de Loïse, le dernier et certainement pas le dernier des derniers.
Bonne lecture à tous et toutes.
2 commentaires:
Mon cher Jean, si tu as connu ma mère et moi la tienne, ton père et le mien étaient déjà partis pour le grand voyage quand nos chemins se sont croisés. Que répondre à cette esquisse que tu faites de mon écriture et, par là même occasion, de ma personne ? Ce partage sensible de tes impressions me touche beaucoup. Merci du temps que tu as pris pour me l'écrire.
Oui, nous sommes à jamais liés par ces merveilleux petits-enfants qui nous enrichissent et nous prolongent à la fois, ainsi que par les chemins de traverses de nous avons tous les deux empruntés.
Avec La fille à son père, je pense avoir mis un point final à l'écriture.
Mais puisse la vie nous garder encore quelques années en son sein, afin de nous permettre de savourer tous les moments qui passent.
Nos parents nous marquent, souvent nous les reconnaissons dans un geste inhabituel ou inconscient mais profondément ancré dans notre histoire personnelle que subitement il rejaillit, retrouve son sens. Celle que tu racontes m'a tellement rappelé de souvenirs, ici et là, mais tout au long de ton récit. L'histoire d'un autre nous amène à la nôtre et quel merveilleux plaisir que de croiser au fil de plusieurs événements un peu de nous. Ce sentiment m'a habité tout au long de la lecture de LA FILLE À SON PÈRE... quel titre fabuleux ! Non, tu ne peux mettre un point final à l'écriure, elle fait beaucoup trop partie de toi pour cela. À l'édition... je comprendrais.
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