mercredi 30 décembre 2009

Le trois cent vingt-troisième saut / Le trois-cent-vingt-troisième saut


Odile, Éthan et Catherine
Comment mettre un terme à cette année, la deux-mille-neuvième (en orthographe nouvelle)? Les bilans, le crapaud s’y lance seulement lorsque le nombre de sauts franchit la centaine… et encore, il faudrait vérifier si au moins une occasion n’aurait pas été ratée… et de toute manière les bilans ça ne fait rien avancer, ça «banalise» parfois les évènements ou encore c’est si intime que cela ne signifie rien pour les autres.

Ça vous donnerait quoi exactement de savoir où en est mon tendon d’Achille et ses multiples complications? Un petit effort d’empathie et ensuite on tourne la page.

Ça changerait quoi dans votre vie et le roulement irréversible de l’univers connu d’apprendre que mon côlon se porte mieux? Un léger bravo échappé du bout des cils.

Ça voudrait dire quoi de précis dans votre capacité intrinsèque d’auto-analyse si je vous disais que l’année 2009 fut celle qui suivait une 2008 plutôt difficile au niveau des émotions et celle d’Éthan qui devrait, au moment où ses lignes seront publiées, faire ses premiers pas? À peine un «j’espère-que-ça-ira-mieux-et-que-la-grâce-ne-te-laisse-pas-d’une-semelle».

En fait, utiliser le «je» est toujours complexe. Je (vous voyez, il revient toujours au moment où on s’y attend le moins) disais à un bon ami que je le trouvais particulièrement patient d’écouter mes histoires de santé, d’examens à l’hôpital, de chirurgie… Ce à quoi il répondait qu’au moins ça évoluait. Évoluer c’est vieillir. Inévitablement.

J’ai fait la douce découverte (d’abord je tiens à mettre sur la table un élément important : je lis actuellement L’ART D’ÊTRE GRAND-PÈRE de Victor Hugo) alors que j’étais chez ma fille Odile (la mère d’Éthan), la douce découverte du vieillissement à partir de la présence d’un enfant de onze mois. Je m’explique.

Les enfants, lorsqu’ils ont maitrisé l’art du sommeil, c’est-à-dire franchir la nuit sans se réveiller, se rendent habituellement jusque vers six ou sept heures le matin (sept heures pouvant être considéré, pour les parents du moins, comme de la grasse matinée). Au réveil, le gazouillis qu’ils émettent et que j’ai entendu de la voix d’Éthan puis retrouvé dans mes souvenirs de père, ce gazouillis est d’une si merveilleuse pureté que cela ressemble presque à une prière. Ce gazouillis m’amène à la douce découverte.

Un gazouillis matinal de l’enfant s’avère un signal, celui de se retrouver; plus encore, celui de la certitude que nous sommes encore là. Là, dans une présence entière, complète, de celle qui se trouve directement au coeur de la sécurité. Un enfant en sécurité émet des sons qui chatouillent l’âme, des musiques intimes… ces sons deviennent des marques personnelles, des empreintes indélébiles.

Entendre gazouiller un enfant, le matin, alors que tout recommence, que tout pourrait être à la fois différent et identique, c’est se rendre compte que l’on vieillit. Au réveil, l’adulte tousse d’une voix rauque, âpre comme s’il tentait de chasser on ne sait trop quoi de coller en lui-même. Le début de sa vieillesse, peut-être. Ou, comme l’écrit le Dr Olivenstein, «la naissance de la vieillesse».

Éthan gazouillait et m’a fait prendre conscience de cette vieillesse qui est avec moi maintenant. D’ailleurs, et je ne veux surtout pas revenir là-dessus trop longtemps, mes dernières histoires de santé en sont de vibrants témoignages. Presque une année complète à faire vérifier ceci ou cela, chirurgie puis vivre avec ses collatéraux alors qu’il y a encore moins de dix ans, le tout aurait été classé parmi les banalités de la vie.

J’accepte de me dire vieux. J’accepte d’être ce que je suis en train de devenir. Un peu comme un enfant qui ne voyait presque pas il y a quelques mois à peine et à qui maintenant on ne peut rien cacher. Comme un enfant qui émet des sons puis des onomatopées et enfin des mots qui prennent du sens. Ensuite, il gazouille le matin. Se traine, se lève et se dirige vers les mains tendues, ces mains qui symbolisent la sécurité et l’encouragement à se déplacer de trois pas vers maman, trois pas vers papa. Après, il courra.

Comme la vie est bien faite, opiniâtre (c’est ma chère belle-sœur Claire qui me le répète souvent), résistante et parlante. Toute en messages, en signes que l’on décode… par après.


Comment mettre fin à l’année deux-mille-neuve? En ouvrant les bras pour la laisser partir et se tourner vers deux-mille-dix, celle qui sera là dans quelques poussières de neige.

Fred Pellerin met cet aphorisme dans la bouche d’un de ses personnages : «J’ai beaucoup de respect pour le passé parce qu’un jour il fut l’avenir.» Quelle belle façon de marquer le temps! De le situer entre enfant et vieillard, entre gazouillis du matin et toux rauque. Une prise de conscience, aussi : pour parler du passé il faut être conscient d’en avoir un. Avoir un passé c’est accepter que l’avenir aura été la somme des présents. Ce que chacun fit de ses présents est une autre question, mais chose certaine, évidente, les présents se sont déroulé en jours et en années qui se chargèrent de les remplir. Maintenant, un enfant reçoit avec la même charge, l’occasion de construire son passé avec les bouts de présent qui marchent vers l’avenir.

Le Dr Olivenstein écrit : «La naissance de la vieillesse, c’est l’entrée dans l’âge où la transmission peut s’accomplir.» Je crois qu’il a raison. Transmettre c’est avant tout reconnaitre ce que nous possédons, juger de sa pertinence et l’installer dans une certaine durabilité, une certaine permanence. On ne peut tout transmettre, que des atomes, des potentialités à charrier vers d’autres sphères qui se transformeront selon et au gré de l’intelligence de chacun en une vie personnelle. «… la vie est une succession d’équilibres instables.» comme le dit si bien Olivenstein.

À l’aube de 2010, à quelques heures de l’entrée dans la première année de la deuxième décennie de ce siècle, j’avoue que le gazouillis d’Éthan, en un merveilleux matin de Noël 2009, m’aura permis cette si douce découverte.


Je ne peux pas le promettre à cent pour cent, mais le crapaud aura peut-être terminé un conte pour le début de l’année et vous l’offrira aux premiers jours de l’année neuve.

Au prochain saut

- Ce saut est écrit en nouvelle orthographe. -

mardi 22 décembre 2009

Le trois cent vingt-deuxième saut / Le trois-cent-vingt-deuxième saut



Allons-y d’une deuxième incursion dans le merveilleux monde de la nouvelle orthographe!

Avez-vous fait quelques vérifications lors de vos derniers textes afin de voir si vous êtes «passé» du côté de la nouveauté et si vous appliquez les rectifications proposées?

Voici cette deuxième incursion :


2)
Dans les noms composés (avec trait d’union) du type pèse-lettre (verbe + nom) ou sans-abri (préposition + nom), le second élément prend la marque du pluriel seulement et toujours lorsque le mot est au pluriel.

Dans l’ancienne orthographe un compte-gouttes devient des compte-gouttes alors que dans la nouvelle orthographe on écrira un compte-goutte et des compte-gouttes;
un ou une après-midi devient des après-midi alors que dans la nouvelle orthographe un ou une après-midi s’écrira des après-midis.

TOUTEFOIS
, restent invariables les mots comme prie-Dieu (à cause de la majuscule) ou trompe-la-mort (à cause de l’article).
On écrit des garde-pêches qu’il s’agisse d’homme ou de choses.
Cette régularisation du pluriel aboutit à une règle simple et unique et supprime des incohérences : ex. dans l’ancienne orthographe on avait un cure-dent et un cure-ongles. Pourquoi?


Voici quelques exemples pratiques de cette règle de la nouvelle orthographe :

un abat-jour, des abat-jours;
un aide-mémoire, des aide-mémoires;
un casse-tête, des casse-têtes;
un gagne-pain, des gagne-pains;
un gratte-ciel, des gratte-ciels;
un pare-feu, des pare-feux;
un rabat-joie, des rabat-joies
.

On a bien saisi, je crois. Et si le cœur vous dit de creuser davantage, voici un lien intéressant, celui de l’Office québécois de langue française :
www.oqlf.gouv.qc.ca



«un carnet d’ivoire avec des mots pâles»


C L O A Q U E (nom masculin)
. lieu destiné à recevoir les immondices;
- bourbier; décharge; égout; sentine.
. lieu malpropre, malsain;
. foyer de corruption (morale ou intellectuelle);
- bas-fond;
. ant. Orifice commun des cavités intestinale, urinaire et génitale de nombreux animaux (oiseaux, reptiles, marsupiaux, amphibiens, certains poissons).


É T R I L L E R (verbe transitif)
. frotter, nettoyer avec l’étrille (instrument formé d’une plaque de fer emmanchée et garnie de petites lames parallèles et dentelées qu’on utilise pour nettoyer la robe des chevaux, des gros animaux);
- (brosser, panser)
. battre, malmener;
. faire payer trop cher
- (estamper).


Je remarque que parfois on utilise que le nom de famille pour identifier un personnage célèbre et cela dans quelque domaine que ce soit. On suppose, j’imagine, que le lecteur saura exactement de qui on parle. Il y a toutefois certains noms auxquels on doit accoler le prénom pour bien établir une distinction : on dira Rimbaud (ça ne pose pas problème, on sait exactement de qui l’on parle) alors que l’on écrira Alexandre Dumas afin de ne pas créer de méprise.

Mais ici se pose un problème puisque j’ai le nom de famille de l’auteur de la citation qui suivra, pas le prénom et en le divulguant, tout comme moi, vous pourriez songer à plusieurs personnes.

Il s’agit de Rubinstein. Lequel? Arthur… Anton… Ida… Olivier… Jonathan…

En interrogeant le texte, on présume que la danseuse Ida Rubinstein, les pianistes Arthur Rubinstein et Anton Rubinstein, ou Olivier Rubinstein, directeur des éditions Denoël s’intéressant à des questions d’ordre politique, n’ont pas commis ce texte. Mon choix se tourne alors vers Jonathan Rubinstein, ingénieur et informaticien américain qui a surtout travaillé chez Apple. Lisez et vous verrez:

« De façon subtile, la représentation de l’expérience douloureuse, de la maladie en général intoxique, gauchit, perturbe, transforme le vécu du malade. L’influence socioculturelle est déterminante dans la perception, le vécu et le langage de la douleur. Les expressions de la douleur sont modelées de façons différentes selon les civilisations, les motivations philosophiques ou les convictions religieuses. En bout de course, le cortex cérébral lui-même, le cerveau conscient (…) joue un rôle dans la perception et la modulation des sensations douloureuses (le cortex frontal est capable de dire non à la douleur). Pourquoi désigner du terme d’acolyte des états émotionnels tels que l’apitoiement sur soi, la culpabilité, la honte, l’inquiétude, la peur, l’anxiété ou l’état dépressif? Tout simplement parce qu’ils vous paralysent. Parce qu’ils inhibent toutes vos énergies au lieu de les rendre disponibles, de sorte que c’est contre vous-même qu’elles se retournent en faisant le jeu de vos algies. »

Ce passage me parle beaucoup actuellement!


Au prochain saut

vendredi 18 décembre 2009

Le trois cent vingt-et-unième saut / Le trois-cent-vingt-et-unième saut



L’an dernier, à l’annonce du début d’une crise économique sans précédent depuis 1929, tous les gouvernements du monde, y compris le Canada… après quelques tergiversations… mirent l’épaule à la roue afin de sauver l’économie mondiale du désastre.

Pourquoi ne fait-on pas la même chose avec le problème du réchauffement de la planète?

Sans doute parce que ce n’est pas vraiment un désastre! Peut-être en raison des « parce que » tellement difficiles à expliquer emballés dans des notions scientifiques relevant d’un certificat d’études secondaires et plus! Ou tout simplement qu’on a le temps. 2050, c’est tellement loin!

Vous savez, dans un abribus de la STM (Société de Transport de Montréal) alors qu’il fait moins 15 degrés Celcius à l’extérieur, parler du réchauffement de la planète n’est pas tout à fait évident! Mais le crapaud l’a fait.

Je posais, à une dame qui elle aussi attendait le 139 (le bus Pie-IX), la question plus haut énoncée. Dans sa sagesse de grand-maman (elle me disait avoir aussi trois arrière-petits-enfants), me regardant droit dans les yeux, elle m’affirma avoir entendu à la télévision un très grand spécialiste de la météo (ou quelque chose du genre a-t-elle précisé) que ce n’était pas si pire que cela. Elle réalisa, alors que j’ajoutais m’inquiéter pour la suite du monde, songeant surtout à mes petits-enfants, d’abord que le bus arrivait et que les réponses définitives ne sont peut-être pas celles qui répondent définitivement aux questions posées.

Nous sommes montés dans le bus, descendus à la station de métro Pie-IX puis séparés car nous empruntions deux directions différentes. Cette image m’a beaucoup frappé. Même abribus… même bus… même station de métro, puis deux directions opposées. Sans doute qu’à Copenhague – certains l’ont rebaptisée Hopenhague – retrouve-t-on ces deux directions opposées. Sans doute, peut-être ou tout simplement faut-il que les grandes questions humaines, cruciales ou pas, se ramènent à deux directions opposées!

Je n’en ai aucune idée mais ce que je sais c’est que samedi dernier alors que LE DEVOIR (qui aura 100 ans, comme les Canadiens, en janvier prochain) publiait un grand dossier sur la conférence de Copenhague et que je lisais attentivement les diverses argumentations, je me suis inquiété… au point de cesser de lire, au point d’avoir honte d’être encore Canadien.

Monsieur Harper a des enfants. Pas de petits-enfants (comme moi) et d’arrière-petits-enfants (comme la dame de l’abribus)… Voilà sans doute, peut-être ou tout simplement une explication nous permettant de comprendre sa position sur la question du réchauffement de la planète, position qui n’a rien à voir avec celle de la Chambre des Communes à Ottawa, d’une assez forte majorité de Canadiens et, semble-t-il, d’une très forte majorité de Québécois.

Je ne sais pas ce que ses enfants en pensent! Sont-ils un peu malheureux, en classe, d’avoir à dessiner une planète telle que la leur prépare leur papa-premier-ministre-du-Canada alors que les autres, désespérément, tentent de mettre un peu de bleu autour de leur croquis?

Éthan, mon dernier petit-fils, a onze mois aujourd’hui. En 2020, il aura onze ans. A-t-on le droit, le droit moral, de lui préparer une planète moins bleue que celle d’il y a trente ans alors que ses parents naissaient? A-t-on le droit, le droit éthique, de lui remettre une planète plus atrophiée que celle dont héritèrent ses grands-parents, il y a soixante ans?

Le crapaud, au nom de tous les Éthan présents et à venir, de tous les Émile, Léa, Arthur, de leurs amis d’ici et d’ailleurs, d’un ailleurs proche, d’un ailleurs éloigné, en leur nom, le crapaud qui continuera de fréquenter les abribus de la STM, de prendre le métro et d’user ses espadrilles, le crapaud demande que nos dirigeants nous dirigent vers la vie et non vers la mort. Que nos dirigeants prennent tous les moyens extrêmes comme ils le firent pour la crise économique, afin d’enlever cette épée de Damoclès qui ne tient plus que par un fil au-dessus de nos têtes.

Je crois que ma grand-maman, arrière-grand-maman, malgré qu’elle ait entendu dire que ce ne soit pas si grave, je crois qu’elle serait d’accord elle aussi et souhaiterait qu’à sa sortie du métro, le ciel fut bleu, l’air pur malgré le moins 15 degrés Celcius.



Bon. Voilà pour le côté éditorial de ce saut. J’achève en vous faisant lire un très court poème de William Ernest Henley. Il l’a écrit en 1875 alors qu’on venait de lui amputer une jambe. Nelson Mandela, dans sa cellule sud-africaine, se le récitait tous les jours pour alimenter l’espoir.

Clint Eastwood a intitulé son dernier film, tout à fait intéressant, du nom de ce poème, INVICTUS qui signifie «invincible».

INVICTUS

Dans la nuit qui m'environne,
Dans les ténèbres qui m'enserrent,
Je loue les Dieux qui me donnent
Une âme, à la fois noble et fière.
Prisonnier de ma situation,
Je ne veux pas me rebeller.
Meurtri par les tribulations,
Je suis debout bien que blessé.
En ce lieu d'opprobres et de pleurs,
Je ne vois qu'horreur et ombres
Les années s'annoncent sombres
Mais je ne connaîtrais pas la peur.
Aussi étroit soit le chemin,
Bien qu'on m'accuse et qu'on me blâme
Je suis le maître de mon destin,
Le capitaine de mon âme

William Ernest Henley (1875)


Au prochain saut


mardi 15 décembre 2009

Le trois cent vingtième saut / Le trois-cent-vingtième saut



Dans le dernier saut, j’ai glissé un peu moins de deux mots sur la question de la nouvelle orthographe, vous promettant d’y revenir à l’occasion. Puisque l’occasion fait le larron… saisissons l’occasion et nous l’aurons…

RENOUVO est un réseau qui réunit des associations privées oeuvrant pour diffuser les rectifications orthographiques proposées et recommandées par les instances francophones compétentes parmi lesquelles on retrouve l’Académie française, le Conseil supérieur de la langue française.

J’ai trouvé sur leur site internet cet article qui expose bien la question de la nouvelle orthographe.

«L’Académie française, comme les instances francophones compétentes (notamment en Belgique et au Québec), a approuvé à l’unanimité un certain nombre de rectifications proposées par le Conseil supérieur de la langue française. Celles-ci ont été publiées au Journal officiel de la République française le 6 décembre 1990.

L’orthographe, si on la compare à un vêtement de la langue, doit s’ajuster à l’évolution. Depuis trois siècles, l’Académie française n’a cessé de s’en occuper.

En 1740, par exemple, dans la troisième édition de son Dictionnaire, elle a modifié la graphie d’un mot sur quatre. Un siècle plus tard, en 1835 (6e édition), l’Académie a réintroduit le «t» dans les pluriels «enfans», «contens» et d’autres; «ai» a remplacé «oi» dans «j’avois», « il étoit», qui sont devenus «j’avais» et «il était».

Les rectifications actuelles touchent quelques milliers de mots; or, près d’un tiers d’entre eux avaient déjà en 1990 une forme dite nouvelle dans un ou plusieurs dictionnaires d’usage courant. Les éditions récentes de ceux-ci enregistrent une très large proportion des formes rectifiées. Les outils informatiques, en particulier les vérificateurs d’orthographe, sont également mis à jour.

Ces rectifications tendent à supprimer des anomalies de l’orthographe française, des exceptions ou des irrégularités (les rectifications ne touchent ni les noms propres ni leurs dérivés). Elles touchent en moyenne moins d’un mot par page d’un livre ordinaire et, souvent, il s’agit d’un accent.

. Par exemple, l’accent circonflexe ne se met plus (à quelques exceptions près, justifiées) sur les lettres «i» et «u» : abime, assidument, connaitre, il apparait, couter.

. L’accentuation de mots tels «allègement», «allègrement», «évènement» correspond maintenant à leur prononciation actuelle.

. Des familles désaccordées sont harmonisées : «bonhommie» s’écrit avec deux «m» comme «homme»; «boursouffler» ressemble à «souffler».

. Les numéraux composés, cardinaux ou ordinaux, sont unis par des traits d’union : «vingt-et-un-mille-deux-cent-cinq», «huit-centième».

Les graphies anciennes restent admises. Quant aux graphies nouvelles, elles ne peuvent que rendre service aux usagers d’aujourd’hui et de demain.»

RENOUVO est l’acronyme de Réseau pour la nouvelle orthographe du français.

Des questions récurrentes quant à la pertinence de la nouvelle orthographe - d’ailleurs Denise Bombardier les mentionnait dans un article publié dans LE DEVOIR il y a une ou deux semaines - les deux suivantes viennent en tête de liste : Va-t-on écrire au son? A-t-on nivelé par le bas?

Voici les réponses que nous offre le Groupe québécois pour la modernisation de la norme du français (GQMNF) :
« Non. La nouvelle orthographe n’est pas une écriture phonétique. Les rectifications de l’orthographe n’ont pas été mises en place dans le but de simplifier bêtement l’écriture et de régler le problème de l’échec scolaire en laissant passer des «fautes», mais bien dans le but de RÉGULARISER une partie du système orthographique du français et ainsi d’ÉLIMINER plusieurs incohérences et anomalies. »



Nous allons dès aujourd’hui aborder une première rectification :

(1) LES NUMÉRAUX COMPOSÉS SONT SYSTÉMATIQUEMENT RELIÉS PAR DES TRAITS D’UNION

« vingt et un » en ancienne orthographe devient dans la nouvelle orthographe « vingt-et-un »;
« deux cents » devient « deux-cents »;
« trente et unième » devient « trente-et-unième ».

Observation : on distinguera désormais soixante et un tiers (60 + 1/3) de soixante-et-un-tiers (61/3). Cette nouvelle règle supprime de nombreuses difficultés et évite des pratiques jusque là largement aléatoires.

Allons-y maintenant d’une application pratique : vous venez de lire le trois-cent-vingtième saut de crapaud, le prochain sera donc le trois-cent-vingt-et-unième…

Au prochain saut

samedi 12 décembre 2009

Le trois cent dix-neuvième saut



Dans le poème – r u i s s e a u – il y a un mot qui ne s’avère pas conforme à la nouvelle orthographe. Il s’agit de (nénuphars) que l’on doit maintenant écrire (nénufars).

Les débats autour de ces modifications nous en font entendre de toutes les couleurs et s’ajoutent à ceux qui s’adressent au cours d’éthique et de culture religieuse. Cela me rappelle le début des discussions entourant la réforme scolaire québécoise… Revenons à la nouvelle orthographe. Personnellement je ne m’y suis pas totalement converti, sans trop savoir pourquoi. Pour me bousculer un peu, j’ajouterai - à l'occasion - sur le crapaud, les grandes lignes de cette réforme qui semblent tant bouleverser notre monde de l’écrit.

Pour aujourd’hui, deux poèmes. Le deuxième est un «cadavre exquis» qui respectera les consignes prescrites au saut 316.



r u i s s e a u


les amarres lâchées n’ont pas atteint
- encore -
le fond du ruisseau
que mille têtes-ogives fouineuses les poursuivent

souffle sur l’eau un grand vent
s’y meuvent des vagues dilettantes
alors qu’une trace rouillée se camoufle
au creux du château liquide

l’immobilité pour mouvement
les galets tentaculés bougent sans bouger
tel une fleur-Ophélie noyée, coupée d’elle-même
un narcisse défiguré nage
les bras attachés aux nénuphars décolorés

ruisseau, porteur de naufrages
ta continuelle route brouille les illusions

ruisseau, ancêtre de fleuves
te voilà pris aux racines anhydres
à enterrer des gouttes d’eau
ensevelies au tombeau des cordages




CADAVRE EXQUIS NUMÉRO 2


un laurier mort
comme un fantôme qui passe
cheval blanc sur fond de montagne
le fantôme diaphane

entre plus tard et partir

l’haleine des mots du silence
sitôt refermés ouvrir les yeux
le bleu dans le gris des nuages
une vieille musique en sourdine

automne, saison des attirances


«un carnet d’ivoire avec des mots pâles»


B I L L E V E S É E (nom féminin)
. parole vide de sens, idée creuse.
- baliverne; sornette; sottise



C A L I C O T (nom masculin)
. toile de coton assez grossière;
Par ext. : bande de calicot portant une inscription (banderole);
. commis de magasin de nouveautés.


Au prochain saut





mercredi 9 décembre 2009

Le trois cent dix-huitième saut



Je remarque que mes cahiers de lecture qui portent les numéros 3 et 4 commencent de manière significative à être expurgés de leur contenu.

En ce matin de première tempête du presque hiver 2009, voici quelques citations tirées de LE PETIT FRÈRE TOMBÉ DU CIEL (Jostein Gaarder)

. J’ai dû oublier pas mal de choses et en inventer certaines autres. C’est souvent ce qui arrive quand on veut rapporter des événements qui ont eu lieu il y a très, très longtemps.

. Jamais une réponse ne mérite qu’on s’incline devant elle. Même si elle semble intelligente et juste, elle ne mérite toujours pas qu’on s’incline devant elle. Une réponse, c’est forcément le chemin qu’on a déjà parcouru. Seules les questions peuvent montrer le chemin qu’il reste à faire.

. Je crois que certaines des rencontres les plus importantes que nous faisons dans notre vie ont lieu pendant que nous dormons. Pendant notre vie, il y a des rêves qui sont si clairs qu’ils paraissent plus réels que la vie en bas, dans toutes les vallées encaissées.

. Il est presque aussi difficile de se rappeler un rêve que d’attraper un oiseau. Mais parfois, on dirait que l’oiseau vient de lui-même se poser sur notre épaule.


Les suivantes, toujours de Jostein Gaarder, proviennent de VITA BREVIS.

. La vie est brève, bien trop brève. Pourtant nous vivons ici et maintenant, mais peut-être seulement ici et maintenant, hinc et nunc.

. La vie est brève, Aurèle. Nous avons le droit d’espérer une vie après celle-ci, mais nous n’avons pas le droit de nous maltraiter et de nous servir les uns des autres comme si nous n’étions que des instruments pour atteindre une existence dont nous savons au fond si peu de choses.


Les prochaines, en vrac…

. La poésie est un aspect de la pensée
La beauté est un aspect de la vérité.
(Martin Heiddegger)

. Celui qui sait ce qu’est le grand désir, lui seul sait ce que je souffre.
(Goethe)

. Dis ce qui t’est le plus personnel, dis-le, il n’y a que cela qui importe, n’en rougis pas : les généralités se lisent dans les journaux.
(Elias Canetti)

. Elle se passe comme ça, la vie, braves gens : entre des morts auxquels on a coupé la parole et des vivants qui se taisent.
(André Hardellet)

. Tous, nous purgeons une condamnation à vie dans le cachot du moi.
(Cyril Connolly)

. Quand nous oublions, c’est que nous avons perdu moins la mémoire que le désir.
(Juan José Saer)

. Nous devrions nous souvenir de chaque mort comme s’il vivait, de chaque vivant comme s’il était mort.
(Ernst Jünger)

. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.
(Voltaire)

. La liberté des autres étend la mienne à l’infini.
(Michel Bakounine)

. Rien à faire, l’homme ne juge pas, il condamne.
(Charles Péguy)

. Sunt lacrimae rerum Il y a des larmes dans les choses.
(Virgile – Énéide)

. Dans l’état d’esprit où l’on observe, on est très au-dessous du niveau où l’on se retrouve quand on crée.
(Marcel Proust)


C’est quand même génial de faire se suivre ces auteurs qui, pour plusieurs, ne se sont ni connus ni lus… La magie des cahiers de lecture!

Au prochain saut

dimanche 6 décembre 2009

Le trois cent dix-septième saut



6 décembre.
Il y a vingt (20) ans.
20 ans, l’âge des possibles, l’âge des plus sérieuses insouciances.

Elles ( Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Haviernick, Barbara Klucznik-Widaieweiz, Maryse Laganière, Maryse Leclair, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle Richard, Annie Saint-Arneault, Annie Turcotte) devaient avoir environ 20 ans chacune… l’âge des plus sérieux possibles!

Lui (Marc Lépine – né Gamil Gharbi) venait d’avoir 25 ans.

Un 6 décembre de neige. Un 6 décembre fatal.

Il y a vingt ans aujourd’hui; pour se souvenir, ne pas oublier, mais aussi pour apprécier le chemin parcouru afin d’abolir le droit à l’arme à feu, se demander si la violence envers les femmes, envers nos filles est toujours un passe-droit que s’accorde certains individus recherchant le monopole du contrôle de leur être sur un autre…

Le crapaud a deux poèmes à nous offrir comme une gerbe de mots, car tous et toutes nous sommes (et seront) parties prenantes des gestes que posent (ou poseront) ceux ou celles qui vivent (et vivront) parmi nous… nous devons en assumer les conséquences, s’en responsabiliser.

Le premier est d’Anne Hébert, le second de Michèle Lalonde.



IL Y A CERTAINEMENT QUELQU’UN

Il y a certainement quelqu’un
Qui m’a tuée
Puis s’en est allé
Sur la pointe des pieds
Sans rompre sa danse parfaite.

A oublié de me coucher
M’a laissée debout
Toute liée
Sur le chemin
Le cœur dans son coffret ancien
Les prunelles pareilles
À leur plus pure image d’eau

A oublié d’effacer la beauté du monde
Autour de moi
A oublié de fermer mes yeux avides
Et permis leur passion perdue.

Anne Hébert


LE SILENCE EFFRITÉ

le silence effrité
aux rives de mes veines
douces grèves léchées de sang
où s’allongent les corps désunis de nos songes

ô tiédeur initiale des jours
quand l’ocre et le froment
partageaient une même allégresse
au seuil de nos lèvres

l’égalité miraculeuse de chaque désir

j’ai pitié de nos mains disjointes
nos paumes désenchantées et disperses
comme des coquilles crevées

nos regards impairs

l’oubli va nous dissoudre

Michèle Lalonde


Parmi celles qui sont décédées, il y a des noms qui résonnent davantage dans mon coeur: Bergeron… Daigneault… Pelletier… Turcotte!

Au prochain crapaud

mardi 1 décembre 2009

Le trois cent seizième saut



On entreprend le mois de décembre par un jeu: celui du «cadavre exquis».
Vous connaissez sans doute, cela vient des surréalistes parisiens qui le créèrent autour des années 1925. Il consiste à «faire composer une phrase, ou un dessin, par plusieurs personnes sans qu’aucune d’entre elles puisse tenir compte de la collaboration ou des collaborations précédentes.»

Le principe étant que chacun écrit, et cela à tour de rôle, une phrase – la première fut : «Le cadavre exquis boira le vin nouveau.» - en respectant scrupuleusement l’ordre sujet/verbe/complément ou tout autre convenu par les participants. Toutefois, et c’est là que réside l’intérêt de ce jeu, personne ne doit connaître ce que le précédent a écrit.

Je me suis amusé à un peu trafiquer le jeu afin de voir ce que cela pouvait donner en bout de ligne. À partir d’un vers des dix (10) premiers poèmes du crapaud publiés sur le blogue, vers cueilli de façon aléatoire, j’ai reconstitué un nouveau poème…

Voici ce que cela donne. Il portera le titre suivant :

CADAVRE EXQUIS NUMÉRO 1

où? se cache le temps
la mer
sur les vagues d’une symphonie bleue
sous des ailes éloignées

tu coules loin
nous déportant, nous, ne sachant nager,
beaucoup trop
alors
sur la vie
sur les pistes
sur la grève engluée
devant la maison enchâssée
aux déchirantes heures de l’espoir
au bout à bout de la vie arc-boutée
il a plongé
il s’est humecté
le cœur il a plissé
avec des morceaux de vent
d’espoirs d’horizons
m’écoutais-tu?
comme une vague perdue que la mer enveloppe d’épaves vermoulues
comme les sons amplectifs du vent déchiquettent les souvenirs disparus

«un carnet d’ivoire avec des mots pâles»


A L E P H (nom masculin)
. première lettre de l’alphabet hébraïque
. en math : nombre cardinal caractérisant la puissance d’un ensemble infini (transfini)


A N A G O G I Q U E (adjectif)
. se dit d’un sens spirituel de l’Écriture fondé sur un type ou un objet figuratif du ciel et de la vie éternelle


Au prochain saut

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