à la Moby Dick
au loin sur l'océan, coulait le sang
l’ivresse de l’inconscient l’étouffait
le long de cet océan, le sang coagulait
impassible sous un soleil païen
sans scrupules s’avançaient les années meurtrières
sans remords s’envolaient sous des nuages silencieux
la nostalgie jusqu’au bout de sa débâcle
sourd aux réalités -ces dominos de l’ennui
il regardait, immuable, les choses maritimes
s'ensevelirent dans une obscure torpeur
rongée par l’infinie couleur blême du ciel
les mêmes perfidies toujours il répétait
comme de vieilles reliques ensevelies
que le nitrate d’argent des songes
s'abrutit inutilement à raviver
la mort, cet indéfectible face à face,
son regard, inexorablement, l'épousait
mais les militaires du temps,
succubes échevelés, cherchaient à la lui cacher
en aval et en amont
coulait le sang
l'océan, catafalque liquide,
inonde de mots abstraits
sa sauvage immuabilité
l’équipage du Péquod l’escortait
1er mars 2015
sirène
la sirène emmêle ses bruits à l'écho
Elle
- on se retourne à son passage -
ne le veut pas assis devant Elle,
Elle, mains gantées,
- obliquement on la regarde -
écoute le bruit des bruits
Il ne saisit pas encore les élans de l’âme
Elle, un foulard rouge au cou
- on guette sa voix –
l’aimait, lui, la dévisageait
regards différents, brumeux, englués
dans de vieilles et pugnaces habitudes
comment aimer quand l’amour est occulte
dans l’écho, la sirène noie ses bruits
près d’un étang ombragé sur l’horizontale rizière
deux hérons en uniforme blanc s’éloignent du jour
Elle, gants enroulés jusqu'à l'épaule
- on dévisage sa main -
Elle sait la force des yeux
lui, la fragilité du regard
dans une salle parfumée aux paroles sèches
on repousse les couleurs noctambules
vers de sourdes présences nocturnes
comment écouter quand il fait nuit
et que la noirceur tait les mots
sans écho, les bruits amortis de la sirène se perdront
Et lui,
dans le joug de ses chaînes, caméléon albinos,
Elle, ombre diaphane
- on fouille son odeur -
rappelle l’oiseau de Junon
un courant d’air soulève l’ao daï garance
leurs yeux appontent au même endroit
un carillon assourdit les rides de la table
où leurs mains tracent des estafilades
comment parler quand les élytres du silence
vous enveloppent
Elle, douce naïade
- imprimée dans nos yeux -
Lui, marqué d’empreintes ocelées
dans l’écho s’emmêlent,
se taisent,
s’étouffent ,
se noient
puis se perdent
9 mars 2015

