Benjamin préfère lire à parler. Écouter également. Lorsque Chelle, accompagnée de sa mère, en janvier dernier alors que Don partit pour l’Ontario avec Taïma, traversa le boisé pour passer quelques heures chez Daniel et Jésabelle, ce fut surtout des occasions pour la fillette de perfectionner son apprentissage de la langue française. Elle l’avait mentionné durant le cercle, remerciant Abigaelle pour son aide, mais elle aurait pu également ajouter les parents de Benjamin qui, de son côté, écoutait.
Depuis son entrée en classe pré-scolaire, c’est devenu une obsession, il n'attend que le moment où il apprendra l'écriture. Sa mère lui rappelle à l’occasion qu’écrire lui permettra d’adresser à la lune des paroles perpétuelles, qu’il pourra au fil des ans relire et ainsi apprécier les progrès enregistrés. Mais là, maintenant, c’est prendre la parole qu’il se doit de faire et s’exprimer sur le printemps, étant le dernier a avoir levé le doigt. L’éducatrice conjugue différents apprentissages dans une même activité dans une approche ouverte et holistique. Par l’exercice du cercle, c’est la notion du temps qu’elle aborde parallèlement : début de la journée appelé avant-midi, durée de vingt minutes sans limite prescrite pour chacun des locuteurs lors des cercles.
- Merci Abigaelle de me donner la parole et à vous tous, les amis, de m’écouter. Je veux d’abord vous dire que parler ce n’est pas ce que j’aime le plus. Chelle a dit que sa maman va donner naissance à une petite sœur ce printemps, eh bien ça sera aussi la même chose pour moi, sauf que ça sera un frère. Et le plus extraordinaire c’est que je vais assister à sa naissance. Un murmure se répandit autour du cercle, des regards surpris s’échangeaient. Abigaelle ramena l’attention sur Benjamin en disant qu’elle commentera ce passage une fois l’intervention terminée. Oui, je sais que c’est à l’hôpital que vous êtes nés, Chelle aussi, mais moi ça été à la maison comme ça le sera pour mon frère. Peut-être qu’au prochain cercle, si Abigaelle le veut, je pourrai raconter comment ça s’est passé. À nouveau les enfants réagirent, mais le regard de l’éducatrice leur rappela qu’on se doit d’écouter. On m’a dit que le printemps c’est souvent le moment des naissances. Mon chien, il s’appelle Walden, c’est un garçon eh bien il ne donnera pas naissance à des chiots. Une autre réaction parmi le groupe et Patrick, le fils de Monsieur le maire se permit de dire : voyons, les garçons ne font pas ça, juste les filles. Abigaelle ferma les yeux, un signe que sa patience s'épuisait. Donc le printemps pour moi sera mon petit frère, également la lune rose. Au mois d’avril la lune est rose quand elle est pleine, parfois on ne peut pas la voir parce que notre vue en est empêchée par les nuages, mais j’espère de tout mon cœur être capable de la voir. Merci de m’avoir écouté.
L’éducatrice demanda aux enfants de fermer les yeux quelques instants avant de retourner chacun à leur place. En avril, il était temps selon elle d'exécuter deux consignes en même. Ce qu’ils firent.
Une fois chacun installé, Abigaelle, dans sa conclusion des échanges qui venaient de se dérouler, prit la parole :
- Je vais nous faire écouter une merveilleuse chanson de l'ami Félix Leclerc, elle s’intitule «L’hymne au printemps». Par la suite j’aurai deux mots à dire pour fermer la boucle de notre cercle d’aujourd’hui.
Depuis son entrée en classe pré-scolaire, c’est devenu une obsession, il n'attend que le moment où il apprendra l'écriture. Sa mère lui rappelle à l’occasion qu’écrire lui permettra d’adresser à la lune des paroles perpétuelles, qu’il pourra au fil des ans relire et ainsi apprécier les progrès enregistrés. Mais là, maintenant, c’est prendre la parole qu’il se doit de faire et s’exprimer sur le printemps, étant le dernier a avoir levé le doigt. L’éducatrice conjugue différents apprentissages dans une même activité dans une approche ouverte et holistique. Par l’exercice du cercle, c’est la notion du temps qu’elle aborde parallèlement : début de la journée appelé avant-midi, durée de vingt minutes sans limite prescrite pour chacun des locuteurs lors des cercles.
- Merci Abigaelle de me donner la parole et à vous tous, les amis, de m’écouter. Je veux d’abord vous dire que parler ce n’est pas ce que j’aime le plus. Chelle a dit que sa maman va donner naissance à une petite sœur ce printemps, eh bien ça sera aussi la même chose pour moi, sauf que ça sera un frère. Et le plus extraordinaire c’est que je vais assister à sa naissance. Un murmure se répandit autour du cercle, des regards surpris s’échangeaient. Abigaelle ramena l’attention sur Benjamin en disant qu’elle commentera ce passage une fois l’intervention terminée. Oui, je sais que c’est à l’hôpital que vous êtes nés, Chelle aussi, mais moi ça été à la maison comme ça le sera pour mon frère. Peut-être qu’au prochain cercle, si Abigaelle le veut, je pourrai raconter comment ça s’est passé. À nouveau les enfants réagirent, mais le regard de l’éducatrice leur rappela qu’on se doit d’écouter. On m’a dit que le printemps c’est souvent le moment des naissances. Mon chien, il s’appelle Walden, c’est un garçon eh bien il ne donnera pas naissance à des chiots. Une autre réaction parmi le groupe et Patrick, le fils de Monsieur le maire se permit de dire : voyons, les garçons ne font pas ça, juste les filles. Abigaelle ferma les yeux, un signe que sa patience s'épuisait. Donc le printemps pour moi sera mon petit frère, également la lune rose. Au mois d’avril la lune est rose quand elle est pleine, parfois on ne peut pas la voir parce que notre vue en est empêchée par les nuages, mais j’espère de tout mon cœur être capable de la voir. Merci de m’avoir écouté.
L’éducatrice demanda aux enfants de fermer les yeux quelques instants avant de retourner chacun à leur place. En avril, il était temps selon elle d'exécuter deux consignes en même. Ce qu’ils firent.
Une fois chacun installé, Abigaelle, dans sa conclusion des échanges qui venaient de se dérouler, prit la parole :
- Je vais nous faire écouter une merveilleuse chanson de l'ami Félix Leclerc, elle s’intitule «L’hymne au printemps». Par la suite j’aurai deux mots à dire pour fermer la boucle de notre cercle d’aujourd’hui.
Elle lança la chanson sur un tourne-disque qui devait certainement dater de quelques années. Le son n’était pas génial, mais tous écoutaient silencieusement.
La musique grattée sur la guitare de Félix se promenait partout dans le local, quelques enfants portaient leur regard vers l’extérieur, par les fenêtres que Monsieur le concierge avait nettoyées maintenant qu’il gagnait du temps depuis la participation au ménage de plusieurs locaux.
Abigaelle pouvait voir sa maison de l’autre côté de la rue, maison qui lui donnait du fil à retordre depuis les neiges et encore maintenant. Elle allait, pour une fois, devoir faire venir Monsieur Gérard, le mari de la secrétaire Henriette, pour tenter de résoudre le mystère qu'elle nommait plaisamment «celui de sa maison hantée».
- Les amis, dans sa présentation Benjamin a mentionné tout comme l’a également fait Chelle, qu’ils auront tous les deux un frère et une sœur. Par la plupart d’entre nous, je m’inclus dans le groupe, nos mamans ont accouché, ce qui veut dire mettre au monde un bébé, dans un hôpital, accompagnées par un médecin et des infirmières. Vous savez, mon papa est gynécologue, ce qui veut dire un médecin qui assiste les mamans lorsqu'elles sont prêtes à donner naissance à leur enfant. Ça ne veut pas dire que c’est la seule façon pour un nouveau-né de venir nous rejoindre. Je connais plusieurs mamans qui mettent au monde à la maison, chez elles, avec l’aide d’une sage-femme. Une sage-femme est une personne dont le métier est d’aider les mamans à accoucher, comme le médecin à l’hôpital. Les deux façons sont aussi bonnes l’une que l’autre, c’est le choix de la maman qui doit être respecté. Benjamin a aussi dit qu’il assistera à la naissance de son petit frère. Moi, je suis tellement heureuse pour lui de vivre cette expérience avec ses parents. Avant, même les papas ne pouvaient être présents dans la salle d’accouchement, maintenant ils le peuvent et c’est tant mieux. Parce que le papa a participé à la venue de son enfant, de manière différente parce qu’il n’a pas tout dans son corps ce qu’il faut pour aider l’enfant à grandir. La maman, elle, a tout ce qu’il faut. C’est pour ça que le chien Walden ne peut pas avoir de petits chiots.
Patrick, le fils de Monsieur le maire, leva son doigt pour intervenir.
- Mes grands-parents ont plusieurs vaches. Certaines vont vêler ce printemps, mais je ne serais pas capable de voir cela. C’est plein de sang et la vache crie très fort.
- Tu sais Patrick, on ne peut pas comparer le vêlage à un accouchement. Il s’agit d’un animal et d’un être humain. Nous, les humains, sommes différents et une naissance n’a pas le même sens que les vaches pour tes grands-parents. Eux, ça fait partie de leur travail, ils doivent les protéger et faire attention à elles car si les vaches n’ont pas de veaux, eh bien elles n’auront pas de lait à donner. Pour les humains, un enfant qui vient au monde n’est pas une partie de notre travail, il est l’image de l’amour d’un papa et d’une maman, d’un homme et d’une femme.
- Je comprends mieux maintenant, dit Chelle dont les yeux s'éclaicirent à la suite de cette explication. Ma chienne Ojibwée est une fille, mais comme elle ne connaît pas de chien garçon, elle ne peut pas devenir une maman.
- Oui Chelle, c'est vrai ce que tu dis. Mais un chien garçon et une chienne fille, ça porte un nom : un mâle pour le chien, femelle pour la chienne.
Les élèves suivaient avec attention les propos de leur éducatrice qui, pour éviter de dépasser une ligne qu’elle jugeait infranchissable compte tenu de leur développement psycho-sexuel, s’arrêta sur ces mots.
Les élèves suivaient avec attention les propos de leur éducatrice qui, pour éviter de dépasser une ligne qu’elle jugeait infranchissable compte tenu de leur développement psycho-sexuel, s’arrêta sur ces mots.
Elle proposa la nouvelle activité ce qui ne l’empêchait pas de réfléchir à cette question qu’inévitablement elle devra aborder dans le cadre de sa thèse doctorale.
Et, en cette fin d'après-midi, la pluie se déchaîna alors que Abigaelle frappait à la porte de Madame Saint-Gelais qui eut à peine le temps de refermer un tiroir de son bureau.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire