mercredi 30 juillet 2025

Projet entre nostalgie et fantaisie... (26)

 




les eaux

 

le reflet des eaux de la rivière frétille autour de la blancheur des cigognes
à contre-courant elles remontent vers le quai où valsent des bateaux
 
entre les jacinthes d’eau les enfants nagent
 
les vagues tourbillonnent
s’accrochent au dos du vent
les taches de verdure
devenues icebergs
cherchent un point d’appui
parmi les multiples sillons
 
du haut des piliers rouillés les enfants plongent
 
les eaux de la rivière disparues dans le fleuve
prennent le goût du sel une fois qu’elles s’y emmêlent
- là où nous ne sommes jamais allés semble tellement loin
alors que c’est tout à côté, lorsqu’on en revient -
 
les enfants crient, l’écume les fouette
 
les eaux s’ennuient du cri des oiseaux dans les arbres
des couleurs feu sur l’horizon brasillé
les nuages s’enfuient comme des moutons poursuivis
 
les enfants crient, plongent et nagent
 
les eaux de la rivière
noyées dans le fleuve
renaîtront en cris d’enfants
alors qu’une eau de pluie
grise comme larmes de deuil
pianotant un bien triste lied
sur le quai vide
guidera les eaux vers leur source
 
 19 février 2013


                                      
   

 

il n’y a d’eau…

 

… que ces gouttes de pluie, frissons de varicelle sur rivière,
culbutant de bâbord à tribord sur des rêves aquatiques
pour s’accrocher au pont,  monstre au masque rouillé
 
-          il n’y d’eau que pour ceux qui ont peur
 
… que ce sourire ivre de l’homme remplissant un verre
comme s’il arrachait à la rivière des cris inhumains
pour rejoindre les disparus, ces asséchés qui l’attendent
 
-          il n’y a d’eau que pour ceux qui boivent
 
… qu’encore plus loin, sur une dernière vague,
celle qui charria tous les faux espoirs
pagayant à s’en arracher les mains
 
-          il n’y a d’eau que pour ceux qu’elle nourrit
 
si l’homme dans son ivresse d’aquarium
se collait au mur puis à l’autre
comme oiseau en cage
 
-     il n'y aurait d’eau que pour oiseaux crieurs
      puisqu’en cage on ne chante pas
 
 
21 mars 2013






lundi 28 juillet 2025

Si Nathan avait su... (42)



MISE À JOUR
… avant la Partie 2
 
 
    Trois merveilleuses journées (et nuitées) au chalet de ma fille Catherine et son conjoint Steve au pied du Mont Orford, en Estrie. Objectif : révision-correction de la première partie de SI NATHAN AVAIT SU…  Objectif atteint.
 
Tout près de l’abbaye de Saint-Benoît-du-Lac, là où se développe en concentré le silence, j’ai ressenti ce sentiment particulier d’une entière solitude enveloppée par une absence totale de tohu-bohu citadin ; que des bruissements du vent dans les hauts pins entourant le chalet ; le bourdonnement furtif d’un insecte cherchant à entrer me saluer.
 
Et le soleil cherchant un chemin entre les branches des arbres pour m’envoyer des clins d’oeil coquins que les grandes fenêtres filtraient, ces grandes fenêtres comme des tableaux réalistes se laissant admirer tout en se transformant  selon l’heure du jour… et de la nuit.
 
Les odeurs… celles qui parlent, qui interrogent, fascinent. Un mélange fleurs/arbustes, le fascinant pétrichor - ce que sent la terre après la pluie - qui embaume courtement mais profondément.
 
Et la musique… une station-radio consacrée à la musique de chambre, musique d’ambiance devenue décor, aussi reposante que la présence d’une bulle souteneuse d’enchantement.
 
Dans ce décor bucolique, confortablement installé à la table de cuisine, j’ai ouvert, page par page, l’histoire que mon blogue reçoit et qui en est à la fin de la première partie.

Corriger était mon devoir, mais ce fut une expérience thaumaturgique au point qu’il s’en est produit un, comme si je le tricotais moi-même. Vivre et de jour et de nuit, au rythme qu’imposait les pages à revoir, à retoucher, à modifier souvent. Cela peut paraître une corvée alors que ce fut un acte d’humilité, un acte de foi dans ce que l’on crée. Sans doute pour cela que le miracle s’est produit...
 
 
Alors, qu’en est-il sorti de cette retraite fructueuse ? Afin de bien vous en informer, je vais y aller par personnages d’abord, par intrigues ensuite.
 
N’oublions pas que l’action se déroule en 1975, au Québec, dans le village des Saints-Innocents situé à environ 100km de Montréal (la grande ville)
 
1)      La famille de Benjamin
2)     La famille ojie-crie
3)     Les personnages gravitant autour d’eux
4)  L’intrigue ayant poussé Don à partir vers Sault-Sainte-Marie avec sa mère
5)     L’intrigue autour de la maison louée par Abigaelle
6)  L’intrigue autour de l’agression du père d’Herman Delage
7)  L’intrigue Madame Saint-Gelais / son jeune frère Benoît

Vous entreverrez dans ce schéma ce qui meublera la deuxième (2e) partie de SI NATHAN AVAIT SU… à partir du mois d’août.
 
 
A)     LA FAMILLE DE BENJAMIN

. Benjamin est né en mars 1970. Dès l’âge de 3 ans il apprend à lire et s’amourache de la poésie des poètes québécois.

. Nathan est son frère né en avril 1975. Présent de façon sporadique dans cette première partie, bientôt il deviendra un personnage majeur.

. Jésabelle Proulx, la mère des deux garçons. Après une période hippie elle se retrouve en campagne et compte bien conserver les valeurs cultivées avant de s’y installer.

. Daniel Cloutier, père de Benjamin et Nathan, époux de Jésabelle, se démarque des agriculteurs du village des Saints-Innocents en s’adonnant aux céréales.

. Le chien Walden.

 
B) LA FAMILLE OJIE-CRIE

Installée au fin fond d’un rang, la famille de Gordon en provenance de Sault-Sainte-Marie en Ontario, vit en retrait d’une population qui ne l’accepte pas vraiment.

. Gordon, l’ancêtre décède, la famille l’incinère puis l’enterre dans le petit bois adjacent à la maison, au pied d’un bouleau blanc.

. L’ancêtre féminine, mère de deux garçons Gord et Don, s’avère et cela dès son arrivée dans le village des Saints-Innocents une intégriste des valeurs ojibwées. Nous ne connaissons pas encore son nom.

. Gord est reparti vers l’Ontario sans qu’on sache exactement pourquoi.

. Don, sous l’impulsion de son père, a suivi des cours de langue et obtenu un certificat lui permettant de devenir garde-forestier, garde-chasse et garde-pêche employé par le Ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

. L’épouse de Don qui, selon une coutume ancestrale, devra s’attribuer un nom à la suite de son deuxième accouchement prévu pour avril.

. Chelle, la fillette de la famille qui entrera en classe du pré-scolaire cette année, au même moment que Benjamin.

. La chienne Ojibwée.
  

C) LES PERSONNAGES GRAVITANT AUTOUR D’EUX

. Abigaelle Thompson, nouvelle arrivée à l’école primaire des Saints-Innocents, spécialisée dans l’enseignement au pré-scolaire. Elle poursuit simultanément un doctorat dans ce domaine à l’Université Laval de Québec. Déjà elle bouscule quelques vieilles habitudes profondément incrustées.

. Madame Germaine Saint-Gelais, la directrice de l’école primaire. Victime d’un sérieux accident quelques années auparavant, elle se déplace maintenant en fauteuil roulant. Son style de gestion ressemble au caporalisme et elle manœuvre fort bien auprès des autorités autant municipales que celles de la commission scolaire afin d’asseoir son autorité.

. Herman Delage, le fils des propriétaires du supermarché (Steinberg) que l’on a très peu aperçu dans la première partie, mais il sera beaucoup plus actif en deuxième.

. La secrétaire de l’école primaire, Henriette, ainsi que la maîtresse de poste, Angelina, complices de Abigaelle, lui éviteront bien des soucis.

. Benoît Saint-Gelais, le jeune frère de la directrice de l’école, celui qui la voyage dans sa camionnette bleue, véhicule un peu intriguant tout comme le personnage lui-même.

. Quelques secondaires : Monsieur le maire, Monsieur le curé décédé, Monsieur Clotaire, le chauffeur du bus scolaire, Monsieur Nicéphore, employé municipal, Patrick, le jeune fils du maire, Raphaël Létourneau des services à l’enfance.

 
D) L’INTRIGUE AYANT POUSSÉ DON À PARTIR EN ONTARIO AVEC SA MÈRE

Cette intrigue tourne autour de l’ours blessé atteint d’une flèche à la cuisse puis retrouvé mort près de la rivière Croche. Elle se complique alors que le coyote qui traversait assez souvent la cour de la famille ojie-crie est retrouvé mort à son tour, atteint d’une flèche lui aussi. De la même flèche. Ce qui trouble Don et par ricochet sa fillette Chelle et son épouse. Il reconnaît la flèche et part pour Sault-Sainte-Marie avec sa mère, l’ancêtre, afin d’éclaircir la situation.

 
E) L’INTRIGUE ENTOURANT LA MAISON LOUÉE PAR ABIGAELLE

Cette maison située tout juste en face de l’école primaire des Saints-Innocents appartient à Monsieur Champigny. Construite sur le même modèle que celle où habite la famille de Daniel et Jésabelle, et par le même propriétaire, mystérieusement disparu, est inhabitée depuis des lustres mais bien entretenue. Énigmatique, objet de silences soutenus par les villageois, qu’en est-il vraiment ?

 
F) L’INTRIGUE AUTOUR DE L’AGRESSION DU PÈRE D’HERMAN DELAGE

Cet homme, propriétaire du supermarché Steinberg, rue Principale, village des Saint-Innocents doit consommer du haschisch fourni par Daniel et Jésabelle en raison de souffrances l’empêchant de dormir. Que lui est-il arrivé ?
 

G) L’INTRIGUE MADAME SAINT-GELAIS ET SON JEUNE FRÈRE BENOÎT

Depuis son accident survenu lors de son retour d’une journée passée à l’Expo’67, Madame Saint-Gelais n’est plus la même. Elle aurait joué du coude pour déloger la directrice de l’école primaire des Saints-Innocents afin de lui ravir son poste. Depuis sa nomination, un régime de terreur prévaut. Son frère Benoît, plus jeune qu’elle, la reconduit à l’école et la reprend en fin de journée pour la ramener chez elle, cela au volant de sa camionnette bleue. Ce n’est pas tout à fait clair surtout que Abigaelle a failli se faire renverser par elle à trois reprises. Que se cache-t-il derrière cette fratrie malicieuse ?
 
 
À la suite de cette mise à jour et remise en contexte, SI NATHAN AVAIT SU… dans sa deuxième partie peut reprendre.
 
Aux intéressé(e)s de se lancer dans la lecture ou relecture de la PARTIE 1, il suffit de rechercher sur le blogue à partir de ceci:
 
Si Nathan avait su…(1) Revu et corrigé
jusqu’à
Si Nathan avait su… (41) Revu et corrigé


            

lundi 21 juillet 2025

Projet entre nostalgie et fantaisie... (25)

 

 

 

le bruit des pas feutrés...

 

le bruit des pas feutrés traverse la pièce
l’écho sur les murs
c’est ce que nous entendons
 
le bruit feutré des pas
c’est seulement à cause de l’écho
que nous l’entendons
 
sans écho…        pas de bruit
sans pas…           pas de pièce
sans pièce…       pas de bruit
 
et nous nous réunirons à mille
à mille et un
afin que saccadent  nos bruits de pas
feutrés dans une même pièce
 
huit tambours majeurs pour chaque coin
retentissant du plus formidable silence
celui de ceux qui n’ont rien à dire
de ceux qui ont tout dit
ne craignent plus les rabâchages
mille fois mille et une fois repiqués
sur les vagues de l’histoire
 
et que feront les vents de la liberté    
et que feront les vents de l’espoir
les vents d’ailleurs qu’ici nous avons reçus

les capteurs de vents
les récepteurs d’envies
s’abreuveront-ils aux sons des tambours…
craindront-ils les avis taciturnes des castrateurs…
mêleront-ils leurs voix enrouées à celles des stentors…
 
ou se perdront-ils dans l’écho des tambours
dans l’écho qui n’aura pas su réfléchir  
le bruit feutré des pas 
traversant une pièce
toujours vide
 
7 octobre 2012
441


                                          l’automne pleut

 
l’automne pleut des larmes couperosées 
elles roulent des arbres, rouillent le sol tiède
 
flaques d’eau devenues miroirs pour oiseaux de passage
 
l’automne pleut le chaud et le froid  
que la nuit démolit à coups de brouillard
 
masques diaphanes pour sentiers nuiteux
 
l’automne pleut sur les vitres embuées 
des enfants les maquillent rêvant de neige
 
au cœur du pays endormi les fantômes réveillent nos hantises
 
l’automne pleut de l’oubli sur nos souvenirs enfouis 
les feuilles mortes s’amoncellent sous la nostalgie
et
frileusement l’automne neige des couleurs pourpres
qui fondent aux pieds des enfants chagrinés
ensevelissant leurs légendes d’été
 
 
28 octobre 2012
443


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Ces deux poèmes sont les derniers de l'an 2012, écrits à mon premier retour du Vietnam.

Les suivants - 2013 et après - seront davantage teintés de l'atmosphère saigonnaise.

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mercredi 16 juillet 2025

ROMPRE LE SILENCE... de Nathan

                     


DEUX MOTS EN PASSANT, QUESTION DE ROMPRE 
LE SILENCE ENTOURANT NATHAN...


LE CRAPAUD ACHÈVE LA CORRECTION DES BILLETS 
QUI CONTIENNENT LA PREMIÈRE PARTIE 
DE L'HISTOIRE DE NATHAN.


POUR CEUX ET CELLES QUI SOUHAITENT 
S'Y REMETTRE, APPRÉCIER LES CORRECTIONS QUI, 
JE L'AVOUE BIEN HUMBLEMENT, 
DONNENT AU TEXTE UNE AUTRE DIMENSION, 


EH BIEN ! JE VOUS INVITE À TAPER :

SI  NATHAN  AVAIT  SU...  (1)  REVU  ET  CORRIGÉ
                   
ET SUIVANTS.

POUR CE QUI EST DE LA SUITE, 
LA 2E PARTIE, 
ÇA IRA EN AOÛT PROCHAIN.




jeudi 10 juillet 2025

Puisque vous me le demandez... encore !

Le Crapaud  a cessé depuis des lustres de numéroter les billets qu'il dépose sur son blogue, ce qu'il faisait depuis le début en 2005 - bientôt 20 ans, en septembre, le 5 pour être précis  - pour les grouper selon une thématique particulière, mais je remarque qu'ouvrir mes cahiers de lecture afin de vous présenter des citations provenant de mes auteurs favoris est fort apprécié. En voici quelques unes pour meubler ce beau juillet 2025.


 

 

. L’instruction n’a d’autre raison d’être que de nous prouver que la connaissance dont nous rêvons tant ne peut s’obtenir.
Anthony Burgess

 
. Il paraît que l’intelligence se mesure à la quantité d’incertitudes qu’un esprit peut supporter.
Philippe Labro


. Il se peut que quelque chose de fondamental nous échappe dans le domaine de la conscience et du fonctionnement cérébral.
Professeur Jean-Bernard

 
. Si j’ai perdu la mémoire à l’âge adulte, c’est peut-être que déjà très jeune, je n’avais plus confiance en la réalité.
Frédéric Beigbeder


La mémoire, quand elle explose, ne connaît pas de retenue, mais elle s’alourdit aussi de tous les efforts qu’on fait pour la refouler, la maîtriser.
Boa Ninh


. Les enfants regardent dans le futur, la vieillesse dans le passé alors que les ancêtres vivaient dans le présent.
Boucar Diouf


. Le brouillard nous maintenait dans un état de confiance. On ne voyait rien des gouffres. C’était préférable. L’homme ne ferme-t-il pas les yeux devant le danger ? Allégorie politique : les princes cultivent la cécité générale pour éviter les paniques ! Le brouillard est un brouillage. Yvan Tourguiviev  aux frères Goncourt : “.. Pour nous autres, le brouillard slave a quelque chose de bon... il a le mérite de nous dérober à la logique de nos idées... chez moi, l’idée de la mort disparaît.” Après tout, s’épargner les inquiétudes en demeurant des œillères n’avait rien d’absurde. Les romans, la foi, l’amour et les campagnes électorales : nous vivions tous dans les chimères. C’était cela aussi la traversée du Blanc : danser au bord du vertige en prenant soin de ne pas regarder derrière les parapets. Aujourd’hui Du Lac et moi nous nous félicitions de ne rien savoir des gueules entre lesquelles nous slalomions.
SylvainTesson


. L’avenir est de toute façon porteur de mort, le passé aussi, seul l’instant présent porte la vie, comme un grain de raisin porte le soleil et l’ivresse.
Amin Malouf


. Il y a tant de manières d’envisager la réalité et le point de vue de chacun définit ce qu’il abrite en son for intérieur. Dites-moi comment vous voyez le monde, je vous dirai qui vous êtes.
Jon Kalman Stefansson


. Qui sommes-nous ? Ce qui a été déposé en nous, désirs, espoirs, frousses, envols, dégringolades, recommencements.
Robert Lalonde

. Si les générations se renouvelaient comme le feuillage des forêts, si elles s’éteignaient l’une après l’autre comme le chant des oiseaux dans les bois, traversaient le monde, comme le navire, l’océan, ou le vent, le désert, acte aveugle et stérile; si l’éternel oubli toujours affamé ne trouvait pas de puissance assez forte pour lui arracher la proie qu’il épie, quelle vanité et quelle désolation serait la vie !
Kierkegaard




lundi 7 juillet 2025

LES SENTIERS DE NEIGE, de Kev Lambert

 


Je me suis royalement ennuyé à la lecture de QUE NOTRE JOIE DEMEURE de Kev Lambert, l’auteur de celui-ci LES ENTIERS DE NEIGE qui, à l’opposé, m’a entièrement ravi. Je questionnais mon for intérieur sur mes aptitudes à  bien lire, bien décoder un roman alors que les prix tombaient sur ce roman archi-textural autant de ce côté de l’Atlantique que de l’autre. Toujours je donne à l’auteur cinquante pages pour me retenir ou le remercier lui disant à une autre fois…

Une amie ayant difficilement traversé la limite que je m’impose avant de choisir de continuer ou d’arrêter, me dit : «Pu capabe. Le veux-tu ? Moi j’arrête. » Je ne dis jamais non à un livre surtout si l’auteur(e) est québécois (e). 

J’entreprends la lecture pour tout de suite tomber sous le charme. Voguant au rythme d’une centaine de pages par jour, je traverse ce qui me rappelle le continent Réjean-Ducharme en raison des personnages, ceux des enfants essentiellement : Émie-Anne et Zoey. Des vrais prénoms pas comme Ducharme. Des enfants d’à peine 8/9 ans, un peu comme chez l’auteur de L’avalée des avalés. Aussi rebelles, un peu moins peut-être, mais aussi accrochés à une réalité qu'ils se forgent. Leur propre réalité. Nous, les adultes, on dirait que tout ça c’est de l’imaginaire enfantin. Point final. Ça va passer comme la neige fond au printemps. Mais l’hiver c'est long et il en tombe de la neige. Ça se ramasse en tas devant la maison. Ça invite à y creuser des tunnels. Oui, mais nous, les adultes, on n’y voit que les dangers possibles. Les enfants y découvrent des mondes.

Puis, j’aborde le continent Marie-Claire-Blais en raison des monstres. Ici, ils sont issus des jeux électroniques (ex. Zelda) activés par je ne sais trop quel Playmobil. C’est vrai que nous sommes avec Lambert en 2004, fin 2004, à la porte de 2005. Période des Fêtes de Noël et du Jour de l’An. Fêtes familiales quelque part au Lac Saint-Jean, tout près de Dolbeau. Puis à Québec. Les lieux importent peu puisque la magie se téléporte sans problème. Ne faut que de la neige. En masse. Les monstres ont des noms bioniques, cybernétiques, difficiles à prononcer, à y découvrir un sens caché, ce qui importe très peu à nos deux cousins - on pourrait ici écrire… cousines, mais ça sera peut-être pour plus tard… après les Rois - qui cherchent à rejoindre Skyd pour le délivrer d’un masque qui le conduit lamentablement vers une mort certaine. Skyd (mot danois qui signifie «ciel» et «tirer». Mais ce bizarre, très bizarre personnage de jeu électronique est déjà apparu à l’école de Zoey, alors que celui-ci découvre son Dôme… Sauf que Skyd doit être tiré non pas du ciel mais de sous-sols regorgeant de tout ce qu’on peut imaginer et que Lambert nous garroche en pleine face comme si depuis des lunes - non pas celle qui s’apprête à s’écraser sur la terre si on lui donne un petit coup de pouce - nous soyons hyper familiers avec ce monde des jeux électroniques où l’on doit s’évader une fois qu’on s’y est fait prendre, que l’on doit découvrir je ne sais trop combien de clés magiques ouvrant des portes camouflées dans les murs.

Je ne vous raconte pas l’histoire que certains décriront comme étant tordue, évitant le plaisir de lire un conte d’hiver devenant page après page un roman sur l’imaginaire enfantin oui, mais principalement sur la véritable identité. L’auteur nous amène doucement, je dirais délicatement, vers la problématique qui envahit Zoey, à savoir s’il est «il» ou «elle». Il y parvient par des descriptions tout à fait grandioses illustrant l’inconfort d’être exactement là où on ne doit pas être, que les modèles offerts, parfois de manière caricaturale, ne correspondent pas à ce qui grouille en-dedans de soi comme une bibitte kafkéenne vous dévorant chaque jour de plus en plus.

Est-ce un conte sur la réalité trans-genre ? Je ne crois pas, mais un roman qui interroge la genèse de l’implantation de l’identité chez l’enfant. Les conflits qui surgissent autant entre parents, enseignants, en fin de compte tout le système des valeurs qui cherche à socialiser l’enfant à partir de stéréotypes fortement incrustés dans la famille, à l’école. Tout, ici, n’est pas bousculé, mais plutôt questionné adéquatement.

LES SENTIERS DE NEIGE est un roman fort bien écrit, il me réconcilie avec un auteur que j’ai un peu trop rapidement évacué de mon palmarès. Je compte bien y remédier... avant la fin de mon enfance.




Kev LAMBERT

dimanche 6 juillet 2025

Si Nathan avait su (41) TIRÉ À PART

 


Tiré à part


Lorsque à partir d’un texte qui répondait au défi que nous nous étions donné mon frère Pierre et ma belle-sœur Claire, à savoir d’écrire sur un thème précis dans le cadre de notre activité appelée «Otium», le mien s’intitulait SI NATHAN AVAIT SU. Une courte histoire aurait pu demeurer là, mais elle a germé dans mon imaginaire m’incitant à lui donner une suite, un continuum. Je me suis donc lancé tête première dans ce qui, aujourd’hui, arrive à la fin de sa première partie.
 
Un verre de Morgon en main, de l’autre un tapotement sur les touches du clavier, voici qu’à la première semaine de juillet 2025 - la première partie démarre sur le blogue le 27 juillet 2024 - j’en suis à une étape essentielle dans tout travail un tant soit peu littéraire, la révision-correction.
 
Avant d’entreprendre la deuxième partie - un prologue la lancera - je dois absolument tout revoir, tout relire afin de corriger les erreurs qui s’y glissent, les coquilles ou encore les méprises installées autour des personnages ou des événements.
 
Rappelons le décor : nous sommes en 1975, dans un Québec se relevant à peine de la crise d’octobre ‘70, à l’aube de l’arrivée au pouvoir - le 15 novembre 1976 - du Parti Québécois dont le but ultime est de mener le Québec à la souveraineté politique.
 
Époque charnière s’il en est une dans l’histoire nationale de cette province qui, en 1980, fut à quelques points de pourcentage de parvenir à son indépendance, mais toujours profondément déchirée entre les tenants du OUI et ceux du NON, entre la volonté d’arriver à contrôler son propre avenir et celle de demeurer dans la fédération canadienne. Les familles, comme jamais auparavant, sont brisées, à la limite de la discorde voire de la zizanie.
 
L’urbain et le rural dans un face-à-face de plus en plus appuyé s’accusent d’une part de freiner l’évolution de la société - de moins en moins hiératique - vers la modernité ou de s’éloigner des valeurs traditionnelles qui depuis la bataille des Plaines d’Abraham ont fait que cette province, difficilement, cruellement même, réussit tant bien que mal à se maintenir à flot.
 
Le village des Saints-Innocents, là où se déroule la majeure partie des intrigues, se voit bousculé par des problématiques nouvelles - l’arrivée et l’installation de nouveaux venus, qu’ils soient autochtones ontariens, retour d’un fils hippie accompagné de sa conjointe qui s’émerveille face à un fiston amoureux de poésie, d’une enseignante doctorante qui frisonne devant l’organisation scolaire de sa première école où l’application du Rapport Parent sur l’éducation au Québec résiste comme les bons vieux gaulois d’Astérix et Obélix aux élans pédagogiques contemporains - problématiques nouvelles qui, indirectement, réveilleront de vieux stigmates ayant perturbé la vie des villageois à une certaine époque et dont les fantômes semblent resurgir des cicatrices imprimées sur la collectivité.
 
Au centre de cette histoire des personnages importants - le seront-ils toujours en deuxième partie ? - Certains encore énigmatiques, d’autres devenus acteurs principaux. Quels sentiments les animeront au fur et à mesure que parleront, étrangement, les murs d’un silence enfoui au plus profond des âmes, mais dont les turpitudes lentement suinteront.

 

J’ai tenté de conserver un certain rythme dans la publication sur le blogue - 41 billets en près de 52 semaines. Je compte maintenir la cadence et cela dès le mois d’août prochain alors que s’enclenchera la deuxième partie de SI NATHAN AVAIT SU

 
À bientôt et merci de l’intérêt que vous portez à cette histoire.


 
PS        Non, il n’est absolument pas question que je parte à la recherche d’un éditeur pour ce qui devient de plus en plus un roman.

LE CRAPAUD GÉANT DE FORILLON qui soulignera ses 20 ans de présence sur Blogger en septembre prochain demeura l’unique écrin dans lequel ces épisodes seront déposées.



vendredi 4 juillet 2025

Si Nathan avait su... (40) Revu et corrigé






Don ne cesse de marcher dans la cuisine de la maison, sa femme assise devant une table circulaire. C’est une habitude chez Don que de marcher de long en large lorsque quelque chose de sérieux exige de lui une bonne décision.  S’arrêtant il annonce:
- Je me rends chez Daniel et Jésabelle, leur demander s’ils peuvent jeter un œil de temps en temps sur vous qui resterez ici pendant mon voyage.
- Tu nous laisses en compagnie de ta mère ?
- Non, elle m’accompagne.

Un cri démoniaque traverse la porte de la chambre du rez-de-chaussée, là où l’ancêtre grand-mère semble tenue captive depuis la découverte par son fils de la flèche assassine sur le flanc du coyote, bête sauvage qui s’acclimatait de plus en plus à leur environnement. Elle n'était pas devenue une amie d'Ojibwée qui s'en tenait éloignée, la laissant toutefois traverser sans réagir la cour familiale en chemin vers le cimetière où repose l’ancêtre grand-père.

- Est-ce nécessaire de garder la porte barrée ? demande la femme sans nom, les deux mains plaquées sur son ventre gonflé.   

- Oui, jusqu’à ce que je parte, demain matin.
- Elle reviendra de ce voyage ?
- On sait toujours quand on part mais jamais quand on revient, répond Don qui enveloppait la flèche maudite dans un tissu que sa famille avait préservé de l'ensevelissement de l’ancêtre grand-père.
- La nouvelle année approche…
- Je sais ma femme, mais cette fois tu n’iras pas à Sault-Sainte-Marie. Notre deuxième fille t’en empêche. Je vois que c’est difficile pour toi, surtout sans aide de ma mère.
- Elle me déteste. 

 

Ce fut les dernières paroles qu’ils échangèrent avant que Don referme derrière lui la porte de la maison laissant pénétrer un courant d'air froid et sec poussant la femme enceinte à s’entourer d’un chandail de laine.

Bien installé dans sa camionnette, il se met en route vers l’autre rang sans nom, sans numéro, sans asphalte... et sans entretien. Il aurait très bien pu s’y rendre en traversant le boisé commun, chaussé de ses raquettes, mais depuis qu’il a enterré le coyote, il le considère comme profane ; pour un oji-cri chez qui l’aspect spirituel de la vie est essentiel, cela signifie beaucoup.

Le soleil du jour permet à la neige de fondre légèrement, rendant ainsi la route facilement praticable. Quelques minutes plus tard Don stationne sa camionnette dans la cour de la famille de Benjamin, au passage il caresse Walden qui profite de la température idéale pour rester dehors.

- Salut Don, tu prends un café avec nous, lança un Daniel fort heureux de cette visite impromptue.
- Avec plaisir, mais ce n’est pas le but de ma venue chez toi et ta famille.
- On entre pour jaser.

Les deux hommes s’installent dans la grande pièce que l’autochtone voit pour une première fois. Jésabelle, à pas feutrés, les rejoint une théière en main.  Je n'ai pas de café que de la tisane, dit-elle.

- Sans souci. J’ai un important service à vous demander.
- Vas-y Don, à moins que ce ne soit pas de notre ressort nous pourrons certainement t’être utiles.
- Je pars demain matin pour l’Ontario. Avec ma mère. Pourriez-vous garder un œil sur ma femme et Chelle durant mon absence ? Deux ou trois jours au maximum.

- Ça sera avec plaisir, répondit Jésabelle voyant là une superbe occasion pour Benjamin d’inviter son amie et pour elle d’entrer en contact avec cette femme énigmatique qui, une fois seule, pourrait peut-être s’ouvrir davantage.

Était-il à propos de s’informer si un lien direct ou indirect pouvait s’établir entre ce voyage et l’affaire de la flèche perdue ? À peine avancée sur cette piste que déjà Don entreprend le récit de l’histoire dont les parents de Benjamin n’avaient connaissance que d’une partie.

Il aura fallu au moins quatre tasses de tisane avant que tous les faits leur fussent exposés. Avant d'entrer dans l’interprétation de ceux-ci, Don crut nécessaire d’ajouter quelques éléments qui, selon lui, ne dédouanaient personne, n’accusaient personne non plus, mais permettaient tout au moins d’expliquer les raisons de ce départ improvisé vers l’Ontario.

- Chacune des tribus amérindiennes se caractérisent par divers éléments. Pour nous les ojis-cris, deux principes importants : le spirituel et des mœurs que vous les Blancs ne pourriez accepter, je parle au niveau culturel. Que nous ayons, à sa demande d’ailleurs, incinéré nous-mêmes mon père et enterré dans le petit bois en face de chez-nous, sous un bouleau blanc, est une coutume qui lentement disparaît, mais demeure primordiale chez les ancêtres. 

Ma mère, celle qui part avec moi demain, tient beaucoup à cette tradition, exigeant qu’à son décès, on l’incinère et la dépose dos à son mari. Lorsque le coyote, celui qu’on vient de découvrir mort, une flèche plantée dans la cuisse, ayant péri au bout de son sang tout juste à côté du bouleau blanc sous lequel mon père dort à jamais, lorsque pour la première fois il a traversé notre cour après avoir contourné le tipi, avoir été poursuivi par Ojibwée, ma mère y a vu un signe. On peut ignorer les signes qui apparaissent à nos yeux prétextant ne pas les avoir vus, mais pour nous ils sont révélateurs, on doit les écouter, les interpréter puis agir en conséquence. C’est surtout vrai pour les anciens de certaines familles ojibwées. Mes deux parents y sont attachés pour une simple raison… ma mère.

Lorsque mon père Gordon a décidé de quitter Sault-Sainte-Marie pour s’établir ici, ma mère a changé du tout au tout. D’abord, elle n’a plus accepté son mari dans le lit conjugal, puis elle s’est donné une mission, celle de perpétuer les traditions ojibwées, mais à chaque fois que cela menait à un désaccord, mon père la plaçait en retrait, l'isolait dans la chambre du rez-de-chaussée. Elle connaît cette pièce, vous ne pouvez pas imaginer à quel point.

Une autre crise, majeure celle-là, lorsque mon père m’a envoyé à Sault-Sainte-Marie pour rencontrer la jeune fille qui allait, au grand désespoir de ma mère, devenir mon épouse. La famille de ... vous savez qu’une tradition veut que l’épouse d’un oji-cri adopte un prénom qui l’accompagnera pour le reste de sa vie, cela à la suite d’un deuxième accouchement… pour ma femme ça sera en avril prochain… Sa famille je la situerais parmi les mieux adaptées à la vie avec les Blancs. Vous comprenez alors la rage de ma mère.

Revenus de notre terre natale, presque tout de suite, ma femme se prépare à la naissance de Chelle. Toute la grossesse aura été un ensemble de moments que je pourrais définir comme… contre nature. En plus de ne recevoir aucune aide, ma femme subissait les remontrances quotidiennes de sa belle-mère, tellement outrageantes que cela affecta mon père sur qui s’abattait une maladie après l'autre, maladies attribuées selon ma mère à la civilisation blanche.

Imaginez un instant sa stupeur lorsque j’ai décidé que notre fille allait naître à l’hôpital des Blancs. Époque au cours de laquelle je faisais tout pour favoriser notre intégration dans la région, encouragé par mon paternel qui faiblissait de mois en mois. Il n’était pas question qu’un médecin approche son mari, de sorte qu’elle prit en charge sa santé… malheureusement ça n’a donné que du pire.

À la naissance de Chelle, ma femme fit une dépression que ma mère qualifia de vengeance de la part des esprits ojibwés. Elle s’est intéressé à Chelle une fois qu’elle dut admettre que notre fille survivrait à tous les maléfices reçus des esprits du Mal qui, c’est bizarre mais c’est ce que je pense, semblaient être guidés par les invocations de ma mère. Rien de négatif ne s’est produit jusqu’à…

Don reprit son souffle. Ses yeux plissaient, à la limite de la crainte et de la libération apportée par la parole. Son public manifestait un intégral respect, une écoute sans reproche. Se tissaient entre les trois adultes, tout comme ce fut le cas lors du souper avec Abigaelle, un lien très fort, une chaîne se solidifiant confidence après confidence.

- La deuxième grossesse est aussi pénible sinon davantage que la première pour mon épouse qui aura, en plus, à choisir un nouveau nom qu’elle portera jusqu’à la fin de ses jours. Elle a avancé cette suggestion : Aanzheni. On peut traduire par «Ange». Ce qu’elle est réellement. Supporter ce qu’elle subit quand je suis absent relève d’une force intérieure formidable. Ce qui augmente ses fatigues, c’est l’influence que ma mère cherche à imposer sur le cerveau de notre fille. On doit continuellement rectifier le tir. Ça épuise.

Mais vous vous demandez certainement pourquoi je pars avec elle pour l’Ontario, si cela a un rapport avec l’histoire de la flèche criminelle. Eh bien! oui. Et de très près, plus que les accusations sans preuves que la population du village alimente à mon égard : puisque personne ne chasse à l’arc, donc pas de flèches, alors on se retourne vers la seule personne qui pourrait en faire usage… moi.

J’ai expliqué au responsable régional du Ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche que je n’avais rien à voir avec cette affaire et qu’on devait poursuivre l’enquête. Ce à quoi il a répondu que l’histoire de l’ours, bien qu’elle pourrait avoir indirectement occasionné le décès de Monsieur le curé, semblait maintenant évaporée de l’esprit des gens et qu’il comptait investiguer sans trop y consacrer beaucoup de son temps.

Par la même occasion je lui ai demandé trois jours de congé pour conduire ma mère dans sa réserve ojie-crie en Ontario, sa santé déclinant. Je mentais, mais je savais exactement que c’est cela que je dois faire. Il m’a souhaité bon voyage, rappelant que le temps des trappeurs commençait exigeant une présence accrue de la part d’un garde- forestier responsable.

Ça sera demain le départ. La fameuse flèche sera du voyage. Je crois savoir sans aucun doute à quelle famille elle appartient…







FIN   DE   LA   PARTIE  1

Si Nathan avait su... (Partie 2) - 2

       Les deux fils de Gordon et Taïma, nés à deux ans d’intervalle, même date, un 1er juin, reçurent chacun une partie du prénom du père, ...