LES CHRONIQUES DU CAFÉ
RIVERSIDE
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Le coq à la voix d’argent
De
retour au Café Riverside. Dimanche après-midi langoureux au point que les
motocyclettes de Saïgon valsent dans les rues au son d’une musique capricieuse,
celle du vent qui hésite entre un sud doux et un nord chatouilleux, vent qui
se répand à tout venant comme par charité.
Cette
semaine aura été fraîche. Le soir venu, une petite laine était la bienvenue.
C’est, ne pas l’oublier, l’hiver au Vietnam. Aussi rigoureux dans sa chaleur
que le froid québécois peut l’être quand il s'en donne la peine. Toutefois, ici, pas d'écarts de température.
Les «moins zéro» que l'on connaît chez-nous, quand j’en informe les amis
vietnamiens en surveillant leur réaction, font écarquiller les yeux et l’espace
d’un court instant, ils frissonnent. Inimaginable pour eux.
Depuis
le retour du Cambodge, les trois agréables journées au bord de la mer à Vung
Tau, je me suis mis à la préparation du séjour en Thaïlande prévu pour la fin
du mois de janvier. En plus, la décoration de l’appartement pour la fête du
Têt, le 10 février, alors que le Dragon laissera la place au Serpent (en Chine le Serpent est considéré comme un sage: bonne augure pour 2013?). Déjà la
ville prend des allures festives et les décorations surpasseront celles de Noël
et du Nouvel An. Je vous ferai voir sur vidéo quelques rues arborant leurs
multiples couleurs; le rouge et le jaune restant toujours les principales.
Je
poursuis toujours avec grand plaisir mes balades en vélo matinales suivant un
nouvel horaire mieux adapté que le précédent : départ 7 heures, retour 9
heures. Plus tard, le soleil devient insupportable et les activités des
Vietnamiens les auront éparpillés de gauche à droite, de sorte que le voyeur en moi y perd. À 7 heures – et même
avant - c’est petit déjeuner, premiers bonjours entre voisins, installation des
étals, des stands, des kiosques, les enfants en route vers l’école et…
l’offrande de l’enfant au soleil.
Offrande
de l’enfant? Les Vietnamiens croient que le soleil se fait plus généreux en
vitamine D entre 7 et 8 heures, le matin. C’est à ce moment que les mères ou
les grands-parents, bien assis par terre, installent l’enfant nu sur leurs jambes pour
l’offrir au soleil tout en le massant doucement. Un spectacle d’une très belle
douceur, entièrement zen.
Et
qu’en est-il de ce coq à la voix d’argent? Le quartier où se trouve mon
appartement est à la limite du District 7 et de Nha Bé. Je crois ne pas me
tromper en décrivant Nha Bé comme étant une parcelle de campagne en ville et plus on s'aventure au loin, plus la ruralité se fait omniprésente. C'est à croire que plus on s'éloigne plus on s'approche de l'essentiel. Tout à fait vérifiable quand on applique ce modèle à la grande ville par rapport à la campagne. Au plus loin où je me suis rendu actuellement, j'ai retrouvé un marché, deux ou trois restaurants de rue (ici de route), une coiffeuse et beaucoup de gens autour de ce qui me semblait une tâche collective.
S’il est vrai qu’on trouve des poules qui picorent librement sur les trottoirs du centre-ville de Saïgon, docilement suivies par leurs poussins, on ne peut pas dire que voilà la campagne.
Autour de Cantavil, dans le District 2 où je résidais l’an passé, le concert de cocoricos était particulièrement imbattable. Ça démarrait à 4 heures du matin sous les fenêtres de mon building et il me semble que ça ne s’arrêtait qu’au soleil couchant. Eh bien dans Nha Bé, alors que l’on pourrait s’attendre à une telle frénésie, ce n’est pas du tout semblable. Plus assimilé au milieu, plus dans leur rôle, du moins ce que j'ai toujours cru être le rôle principal du coq, après avoir engrossé les poules, celui de réveiller tout le voisinage en collaboration avec le coq voisin qui transmet le relais et ensuite de suite. J’en croise un tous les matins – je finirai bien un jour par le photographier ou le filmer – toujours au même endroit et toujours ce chant unique, comme s’il était doté d’une voix d’argent. S’il existe une poule aux œufs d’or alors ici, c’est un coq à la voix d’argent.
S’il est vrai qu’on trouve des poules qui picorent librement sur les trottoirs du centre-ville de Saïgon, docilement suivies par leurs poussins, on ne peut pas dire que voilà la campagne.
Autour de Cantavil, dans le District 2 où je résidais l’an passé, le concert de cocoricos était particulièrement imbattable. Ça démarrait à 4 heures du matin sous les fenêtres de mon building et il me semble que ça ne s’arrêtait qu’au soleil couchant. Eh bien dans Nha Bé, alors que l’on pourrait s’attendre à une telle frénésie, ce n’est pas du tout semblable. Plus assimilé au milieu, plus dans leur rôle, du moins ce que j'ai toujours cru être le rôle principal du coq, après avoir engrossé les poules, celui de réveiller tout le voisinage en collaboration avec le coq voisin qui transmet le relais et ensuite de suite. J’en croise un tous les matins – je finirai bien un jour par le photographier ou le filmer – toujours au même endroit et toujours ce chant unique, comme s’il était doté d’une voix d’argent. S’il existe une poule aux œufs d’or alors ici, c’est un coq à la voix d’argent.
Ce
coq m’amène à vous parler ( vous comprendrez «écrire» ) du rapport que les
Vietnamiens entretiennent avec les animaux. À la lecture de plusieurs légendes
vietnamiennes, celles qui meublent l’imaginaire fort poétique des gens de ce
pays, on découvre l’importance des tortues, des dragons et de certaines
créatures aquatiques. Toujours en relation directe avec les humains, ces animaux dotés de pouvoirs fantastiques, plus souvent
qu’autrement sont des alliés, des défenseurs et des modèles.
Sans
être connaisseur en religion et rites bouddhiques, un fait ressort : on respecte les
animaux autant sinon plus que
les représentants du règne végétal. Un vieux dicton rappelle que tuer un animal, c'est s'astreindre à vivre comme lui dans une
prochaine vie.
Ces deux éléments, sans tout expliquer, représentent une piste pour
comprendre cette façon d’être, cette manière d’interagir avec les animaux. Des
plus importants (vaches, buffles, cochons…) aux plus petits (oiseaux, rats,
serpents…) aux plus craints (tigre et l’ours). Et moi qui fais tout un plat avec les
écureuils… suis un peu mal à l’aise quand je remarque l’attitude des
Vietnamiens.
Il
semble que le rat qui circule sans être chassé par quiconque; la chauve-souris
qui prend le relais de l’hirondelle dans la chasse aux moustiques; le chien qui sans aboyer
suit son maître ; les libellules et les papillons qu’on dénombre à
l’infini; ces oiseaux en cage… il semble que toutes ces présences dépassent le statut animal, elles deviennent partie intégrée au décor.
Notre
culture occidentale se doit absolument de légiférer pour protéger les animaux, multiplier les campagnes de sensibilisation ayant pour message l’idée
que l’animal est fait pour vivre près de l’homme, lui apporter son aide, lui
rappeler parfois un principe fondamental de vie, souvent le nourrir,
alors qu’ici, au Cambodge également, la proximité de l’animal va
de soi. Craint-on, peut-être, en agissant de manière incorrecte d’offenser un
être humain réincarné en animal?
Personnellement,
si un jour j'ai à être réincarné en animal, pour sûr je ne souhaite pas devenir un écureuil… je choisirais un coq à la voix
d’argent.
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