mercredi 29 mai 2024

En marche... on ne sait où

 




En marche... on ne sait où

Devant le marcheur s’harmonisent des couleurs tectoniques 

Chacune porte au cou un guidon blanc
duquel  gicle un minuscule point noir… translucide
 
Les rayons d’un soleil absent incrustent
sous ses pas, calquant une écriture fade,
en lettres nerveuses, le mot… peur
 
L’ombre crée une immense girandole,
améthyste dilué tel un gribouillis gris,
où,  lisiblement, se dessine
en apostrophe amortie, le mot… honte
 
Aux couleurs engluées, inventeuses d’ombres,
le marcheur étire son pas, le comprime...
devant lui des apparences inertes le scrutent
le défient à froisser du silence
rapetissé en plus de silence encore
 
Peur et honte, ces artefacts poussiéreux,
camouflent dans leur mutisme
quelques couleurs s’ajoutant à d’autres
sur cette aphone étendue blanche
 
Un point noir gonfle, deux peut-être,
bouscule puis explose avec discrétion
prélude à des échos du silence
 
Peur et honte embrouillent la vue du marcheur
chatouillent convulsivement ses oreilles assourdies
 
Peignant devant lui un kaléidoscope d’odeurs…









vendredi 24 mai 2024

Quand les mots rencontrent d'autres mots... ça donne «l'écriture».

 


    Ça donne également de magnifiques ensembles tels les phrases, les textes, les livres... écrits à partir de mots qui concrétisent la pensée, les idées.

En voici quelques exemples tirés de mes carnets de lecture.





.    L’enjeu n’est pas d’écrire ce que personne n’aurait pu écrire, mais d’écrire ce qu’on est seul à pouvoir écrire.

Auteur inconnu


.    L’idée n’est pas le mot, dit le sage taoïste : elle vit dans le mot, elle s’exprime par le contexte et par la prononciation.

Didier van CAUWELART

.    Nous devons traiter les mots comme des grenades.

Amos OZ


.    … nommer un être, c’est le rendre présent…

Michel TAURIAC


.    Ce sont les mots qu’ils n’ont pas dits qui font les morts si lourds dans leur cercueil.

MONTHERLANT


.    Il existe des livres qui vous distraient, mais ne remuent en rien les destinées profondes. Ensuite, il y a ceux qui vous amènent à douter, ils vous apportent l’espoir, élargissent le monde et vous font peut-être connaître le vertige. Certains livres sont essentiels, d’autres simplement distrayants.

Jon KALMAN STEFANSON


.    En racontant des histoires, vous rendez objective votre propre expérience. Vous la séparez de vous-même. Vous cernez certaines vérités. Vous en inventez d’autres. Vous commencez parfois par un incident qui est réellement arrivé … et vous le projetez en avant en inventant d’autres incidents qui ne se sont pas réellement produits mais qui cependant aident à l’éclaircir et l’expliquer.

Tim O'BRIEN


.    D'un côté, il racontait son histoire avec trop d'imagination, trop d'esprit de suite et de méthode, marques essentielles de la vraisemblance, pour qu'on pût la mettre en doute; de l'autre, il y avait trop de beautés poétiques dans son récit et ces beautés elles-mêmes taisaient naître des soupçons.

TOLSTOÏ


.    Dans le vide on peut tout dire, il y aura toujours un écho.

Boualem SASSAL


.    Mon seul espoir, en entamant ce plongeon, est que l’écriture ravive la mémoire. La littérature se souvient de ce que nous avons oublié : écrire c’est lire en soi.

Frédéric BEIGBEDER


.    L’écriture accomplit un travail dont l’origine est indiscernable.

Roland BARTHES


.    On dit tant de choses dans une vie, et puis ce qu’on a dit s’efface, ça n’est plus rien
du tout.

J. M.G. LE CLÉZIO

.    Écrire les êtres aimés, les inconnus qui déferlent tous les jours dans les rues, témoins inconscients de leurs vies réciproques.Écrire les coins de ciel différents, contradictoires de chaque vie, de chaque conscience.

Écrire les demeures, les nids de bonheur, la ville natale...

Écrire les destins, les drames qui palpitent dans la nuit, sous la pluie, les toits, les lampadaires aux coins des rues.

Écrire les pas qui résonnent à travers la nuit, dans les longues rues vides, écho du silence, lourd cheminement de la pensée. Un cyclo recouvert d’une bâche luisante de pluie passe sans bruit. Un couple s’embrasse dans l’abri d’un poste de gendarme. Un coq chante, incertain, au coin d’une rue. Une rue noire, muette, qui se réveille en sursaut, quand les lampes s’allument vague que vague, comme portées par des rafales de vent. Les feuilles des badamiers tombent sur le sol, craquent. Les feuilles mouillées des pancoviers se poursuivent sur les trottoirs. Kiên se sent alors marcher dans le silence d’une grande symphonie. Dans la nuit de la ville, il se sent vivre. Vivre, un besoin impérieux, pressant, peu importe que ce ne soit que la vie avide, sans mémoire, inerte, sans rêves des gens de la ville. Il faut écrire, écrire !

Bao NINH.


.    Ce procédé (enchâsser une histoire dans d’autres histoires, jongler avec les séquences temporelles pour donner de la profondeur et de la complexité au récit primaire) s’appelle la composition circulaire. Dans cette structure annulaire, le récit semble se perdre dans une digression (l’interruption du fil de l’intrigue principale étant annoncée par une formule toute faite ou une scène convenue), mais cette digression, qui a toutes les apparences d’une divagation, décrit au bout du compte un cercle, puisque le récit reviendra au point précis de l’action dont il s’est écarté, ce retour étant signalé par la répétition de la formule ou de la scène convenue qui avait indiqué l’ouverture de la parenthèse. Ces cercles pouvaient recouvrir une seule et même digression ou une série plus complexe de récits enchevêtrés, imbriqués l’un dans l’autre, à la manière des boîtes chinoises ou des poupées russes.

Daniel MENDELSOHN 


.    Les histoires que j’invente sont tristes ; ceux que j’aime y sont injustement foudroyés, inintelligemment trouvés morts. Ma vie n’est-elle pas l’histoire qui se fait de ce que je veux qu’il m’arrive ? Je veux que les personnages sympathiques de ma vie meurent, tout à coup, sans raison, afin que l’histoire que sera ma vie soit une belle histoire.

Réjean DUCHARME


.    Non, tu n’écris pas de livres et tu n’es pas près de le faire. Mais il semble que notre ami est poète, or les poètes ont besoin de tout savoir. Besoin de tout connaître. La vie doit couler vers eux pour les nourrir de ses histoires et de sa force, quant à nous, le reste des mortels, nous avons le devoir de leur faire part des choses les pus intéressantes de notre existence et de celles des autres. Chacun choisit évidemment à vue de nez ce qu’il raconte, mais une fois qu’on a commencé, on ne doit rien omettre. Gunna dit que nous sommes tous nus devant les écrivains. De la même manière, eux non plus ne doivent rien omettre quand ils écrivent, ils ne doivent faire l’impasse sur aucune ombre, ne contourner aucune difficulté, ne taire aucune douleur.

Jon KALMAN STEFANSON


.    Mes sens travaillent mieux que mon ciboulot. Mes doigts avancent seuls, répudiant aisément le stérile besoin de revenir en arrière, comme celui d’aller à toute allure en avant. Ma mémoire est prodigieuse, je lui fais une confiance absolue. On écrit parce qu’on a lu, mais aussi, surtout, parce qu’on a été et continue d’être un revenant qui se souvient.

Les poètes m’ont appris à faire passer le sang directement de la blessure à la page, la lumière en droite ligne du ciel aux mots.

Robert LALONDE





dimanche 19 mai 2024

L'étendue blanche


L’étendue blanche



L’étendue des champs s’écrit à l’encre blanche.

Les yeux peinent à rejoindre l’horizon,

Vers ce vaste inconnu, qui se hasarde ?
D’où vient cet être nouveau, ce quidam ?

Mains jointes, peu sûr de lui, de ses pas,
de tout ce qui l’accompagne, le convoie.
 
Les savoirs d’auparavant sont calfatés,
regarder derrière soi, tout est renversé.




Les souvenirs dormant dans son cerveau dénué,

maintenant devenus fantômes par contumace,

calculent l’espace chimérique qui s’éternise

alors qu’il vagabonde sous un firmament aubergine.

 

L’écho polyglotte parvenu d’un racon nébuleux

étourdit cet être nouveau, sans but, sans repère,

orientant ses pas vers le titanesque inconnu,

plus incertain de lui encore, de ce qui se révèle…

 

À ses pieds, le salpêtre résistant d’anciens murs

devient, sous ses pas, une poudre malodorante

qui retombe gravement, chute brutale et taciturne

comme si une secousse de bing bang l’eut basculé…

 

Il marche, robot métallisé et désorienté,

tel une toupie centripète et curviligne

dans une direction de plus en plus blanche

une étendue immense grignotant l’espace.

 

Sans nom, encore, entité fragile et vacillante

qui tangue, titube, mollit, hésite, dodeline,

un être nouvellement nouveau dans ce monde

qui semble tout doucement s’ouvrir devant lui…

 

Un point noir éclôt...




mardi 14 mai 2024

Un Être ...

 


Il est très important pour moi de vous présenter mon ami PHUOC, celui sans qui je ne serais pas en vie aujourd'hui.

Je parle de lui dans les billets publiés sous le thème «Un être dépressif». 

Le 13 avril 2021, suite à l'absorption volontaire de médicaments afin de me débarrasser définitivement des souffrances liées aux effets secondaires du changement successif de médicaments ont eu sur ma santé physique puis ma santé mentale, PHUOC m'a attrapé au dernier moment, mené aux urgences et suivi par la suite alors que prenait racine une profonde dépression.

Sans son intervention, son support et sa présence, je ne serais pas en vie maintenant.

PHUOC est un être spirituel qui vit maintenant dans un monastère bouddhique situé au coeur des montagnes de Nha Trang (Vietnam). 

Je peux, parfois, entrer en contact avec lui ; il vient de m'envoyer une photo prise ces dernières heures. Je suis heureux de voir à quel point il rayonne. 

Merci mon Frère PHUOC.



dimanche 12 mai 2024

... i m m o r t e l . . .



.  .  . i m m o r t e l .  .  .

Ne le sera que ce qui fut préservé
de la mémoire oublieuse
et celle des cendres acides
 
L'espace disparu au cours des temps
n’habitera plus jamais là
où nous le cherchons
 
Les traces gazeuses de l’oiseau de proie
ensemencent des trous noirs
vastes comme des zéniths
 
Il faudra lire, relire, écouter car bientôt
le temps raccrochera  des aiguilles
aux horloges qui nous servaient de frontières

Et les traces décolorées des cataclysmes
s'éloigneront des vestiges
d’une génération perdue
 
L’azur du firmament, devenu parme, baissera les yeux
comme s’il cherchait à n’être plus
que l’envers d’une mer turquoise





On réédifiera 
ce dont on ne voulait plus voir
tel un démiurge atteint d’amaurose…
 
On accueillera 
un nouveau soleil, semblable
 à ceux qui, jadis, nous aveuglèrent…
  
On extirpera 
des ruines pour mieux les ensevelir
dans ces cimetières modernes, artificiels…
 
On participera 
aux mêmes aurores blêmes
les yeux curieux de se souvenir encore…
 
 On marchera 
tête baissée vers d’autres maisons
blanches sans doute, aux fenêtres rouges…
 
On s’étonnera 
toujours intrigué d’être là
ancêtre ignorant ceux qui nous précédèrent…
  
On criera 
à l’immortalité tout en semant des roses
puis nous cueillerons des dents-de-lion…
 
 
L’immortel se peint de vertiges rigides et immobiles…

















samedi 4 mai 2024

Qui..

 


Qui …
ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?


Il fait nuit pourtant…
aux branches des arbres
les oiseaux bruissent pianissimo,
celles du majestueux tilleul craquent à peine
bref toussotement suivi de ce silence étouffé…
la foule piétine, yeux rivés aux fenêtres rougeaudes

 

          Qui sont 
               ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?

 

À quel palabre maléfique sont-ils muettement invités ?
Ils avalent leurs mots alors qu’on les encourage à les crier,
leurs voix dérivetées, d’un autre siècle, lâchement s’éteignent…
la route qui les y a menés derrière leurs pas peu à peu s’affaisse…
le groupe ne s’amplifiera plus, le pourtour de la coupe a été atteint,
ceux qui y sont y seront, réunis dans un cénacle unanime et disparate…

 

        Qui sont 
             ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?

 

De ce côté règne un blanc laiteux, de l’autre, un noir aduste,
au centre, demi-teinte neutre, sans nom, celle qui se désagrège
laissant, éparpillés, des cristaux gibbeux aux pieds d’une foule baba ;
chacun, à tour de rôle, surpris d’y reconnaître une immobile similitude ;
certains, certaines, et d’autres aussi, les ayant fréquentés en rêve déjà
béent encore, taisent nerveusement d’immenses et vieux frissons cramoisis…
 
          Qui sont 
                ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?

 

Qui n’attendent rien, ils le savent, les fenêtres rougies parlent
dans la nuit… l’atavique message cochenillé entre eux se déplace
répétant écholaliquement comme un radar sonore, qu’il faut encore
lire ce qu’on a mille fois relu, écouter ce qui fut répété, appréhendé…
décrypter enfin le sens, celui que jadis prononça la prophétesse Sybille
à d’autres gens auparavant regroupés ici, à ceux-là, cette nuit s’achevant…

 

          Qui étaient 
               ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?

 

S’ouvre une porte, mille peurs multicolores s’écrasent piteusement
sur le frêle balcon qui, progressivement, comme un orage s’approchant,
se distancie de la fragile maisonnette blanche, affouillant une crevasse
qui aspire goulûment tout sur son démoniaque passage ; S.O.S. et prières
ne résisteront pas à ce maelstrom dévastateur ; chacun, jadis, en fut instruit…

 

          Qui étaient 
                ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?   

 

Est-ce lui, non c’est plutôt elle qui s’avance vers cet espace vide
les mains décolorées plus que décharnées, l’imperceptible aux yeux ?
Ce quelqu’un transfiguré par lui-même, par elle-même et par eux-mêmes,
héraut réflexe de tous ces regroupés paralysés, ce quelqu’un protagoniste
d’abord tend le bras puis ça sera la main et finalement le doigt vers le nuage
qui, rosacé maintenant a enveloppé la maisonnette blanche en route vers le vide…

 

          Qui étaient 
                ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?

 

C’est la mort harnachant le vide, trônant fièvreusement au-dessus d’une faille.
La mort, aussi vieille qu’elle-même, plus avide qu’elle-même, si tant elle-même
que les regroupés puis disparus ont passé le relais aux autres, ceux qui viendront
devant une autre maisonnette blanche, bâtie à l’identique, avertie de se décolorer
quand passera un oiseau de proie ayant délimité son territoire de chasse, de mort...

 

          Qui seront 
                ces gens regroupés devant la maisonnette blanche ?

 

Et si c’était… nous !





Si Nathan avait su (12)

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