mardi 7 mai 2019

Voile et féminisme

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Se lancer dans un débat aussi émotif que celui qu’induit le texte du projet de loi 21 sur la laïcité au Québec, c’est écouter, lire les différentes opinions, les placer dans leur contexte et tenter de les apprécier à partir de leur crédibilité objective. Je l’écrivais dans le premier billet consacré à ce sujet - le 555 du CRAPAUD GÉANT DE FORILLON - Facebook, devenu un des véhicules importants auquel on réfère pour émettre et recevoir des commentaires sur tout (et parfois sur rien), de par son immédiateté, recèle une montagne de "posts" relatifs à cette question. Adopter la ligne du doute m’apparaît celle que l’on doit suivre.

Ce débat suscite l’apparition d'opinions qui, parfois, reposent davantage sur des émotions; il en existerait huit associées par paires opposées: la joie et la tristesse, la peur et la colère, l’espoir et la surprise, le dégoût et la confiance. Les émotions sont des réactions spontanées à des situations. Force est d’admettre que nous les avons toutes vues passer dans les différentes prises de position et cela à des niveaux variables d’intensité.

Aux émotions primaires, ce sont ajoutés les positionnements autant individuelles que corporatives. Il aura été aisé de voir sur cette palette, les tendances gravitant actuellement dans notre société qui, selon plusieurs, vivrait un clivage, une polarisation aussi nettes que lors des référendums sur la souveraineté du Québec en 1980 et en 1995.

De la sphère politique cette polémique (débat par écrit vif ou agressif) se cristallise maintenant autour d'un domaine plus intime, celui du port ou non de signes religieux chez certains employés de l’État québécois, en insistant sur l'aspect vestimentaire. Élargissant la question, il porte sur notre rapport à la religion davantage qu’à celui de la spiritualité.

On a réduit la portée de ce projet de loi - en tournant les coins ronds - en disant qu’il vise strictement les femmes musulmanes portant le voile. Il y a du vrai, mais son étendue me semble plus vaste encore.

J’aimerais apporter mon point de vue en réponse à l’opinion que défende ceux et celles qui avancent l’idée que cela serait une attaque personnelle faite aux femmes et qu’à titre de féministe, il faudrait résolument s’y opposer.

Je veux dire, d’entrée de jeu, que mon analyse de la situation repose sur deux piliers: le premier, la menace islamiste fondamentaliste, le second la menace lié aux changements climatiques. Ces deux éléments, me semble-t-il, jouent un rôle essentiel dans l’imaginaire de l’humain du XXIe siècle, un humain qui vit sous un parapluie réussissant à peine à le mettre à l’abri de conséquences que même nos gouvernements dans leur mouture actuelle ne parviennent pas à éradiquer.

Je soutiens également que les droits collectifs doivent primer sur les droits individuels, car il m’apparaît de l’ordre de l’utopie d’en arriver à satisfaire les attentes de tous et cela dans les différentes sphères des activités usuelles.

Également, et cela me semble central, vivre en société ce n’est pas vivre isolément, c’est s’adapter à la culture ambiante. Comparer la situation en Occident à celle qui prévaut en Orient ne tient pas la route. Tout comme l’idée d’institutionnaliser le multiculturalisme. Ce concept en est un qui doit, selon moi, davantage être compris comme une acceptation de l’autre dans ses différences, non comme une base idéologique pour instrumentaliser notre vivre-ensemble, ce qui relève de l’impossible. Prenons un  exemple qui n’est pas rien en lui-même: doit-on modifier notre système de justice afin d'autoriser la charria afin de régler les conflits entre les individus à la lumière de la doctrine musulmane ? ... de formaliser la loi du Tallion ?...

Qu’en est-il du féminisme comme outil d’analyse du projet de loi 21 ?

Vous savez comme je raffole des définitions. En donner une ici risque d’en froisser plus d’un, mais je m’aventure à proposer celle là: le féminisme est un ensemble de mouvements et d’idées politiques, philosophiques et sociales, qui partagent un but commun: définir, promouvoir et atteindre l’égalité politique, économique, culturelle, personnelle, sociale et juridique entre les femmes et les hommes.

Vous me permettrez de focuser sur cette question: interdire le port de signes religieux aux femmes employées par l’État québécois - toujours dans l’optique que le 21 ait force de loi - est-il une attaque envers ces femmes, contrevenant avec une certaine perception du féminisme.

J’admets que l'interrogation pose problème si on la réduit strictement à une affaire vestimentaire, ce que malheureusement on voit et entend actuellement. Il faut, selon moi, élargir la question et ne pas citer celle-ci ou celle-là portant le voile en exemple, à l’effet que cela brime une liberté individuelle. On ne parle pas du droit de se vêtir ou se dévêtir comme bon nous semble, la véritable question étant: le voile musulman est-il ou pas un signe religieux.

Ce à quoi je réponds "oui" tout de go. Alors, suivant mon raisonnement, il a sa place seulement dans les lieux de culte.

Empêcher une musulmane de le porter n’est aucunement une atteinte voire une attaque à fond de train envers le féminisme. Absolument pas ! Il s’agit, dit bien simplement, d’exiger de toutes le respect inconditionnel de déposer chaque chose au bon endroit. Mener une lutte contre la laïcité (terme auquel je préfère neutralité) en arguant ce type de dialectique m’apparaît faux et sans fondement.

Je ne prendrai pas le temps de répondre aux sous-questions issues du problème, celles qui vont dans le sens suivant: "c’est mon choix"... "je ne me sens pas contrainte à le porter"... "je ne suis pas la messagère de quoi que ce soit"... "je le fais car c’est prescrit par ma religion"... "j’y vois un respect et une affirmation de ma culture propre"... et j’en oublie...

Tout problème, quel qu’en soit son niveau de complexité, ne peut d’aucune manière se résoudre par une réponse simpliste. Il s’agit, selon mon avis, de le situer à la bonne place, le confronter au contexte qui le fait apparaître et y apporter une réponse la plus adéquate possible.

Je conclus en disant que tout signe religieux n’a de place que dans les lieux de culte, qu’il faut le respecter pour ce qu’il est en soi et ne pas servir d’objet prosélytique.

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