samedi 31 janvier 2015

La Birmanie, Bagan maintenant.

Le crapaud et le thanakah



                                                         De Rangoun à Bagan


Le trajet Rangoun-Bagan se fera en bus de nuit. Les bus vietnamiens ont des couchettes sur deux étages adoptant la forme d’une chaise longue, les birmans, un fauteuil de grand confort. Toutefois, c’est quand même plus de huit heures à se faire trimbaler par des rues obscures et à bonne vitesse. Comme il y a beaucoup moins de motocyclettes en Birmanie qu'au Vietnam, les coups de klaxon, ces éternels cris qui emplissent le Vietnam jour et nuit, sont ici moins présents. 

Laissons donc derrière nous l’odeur du curry emplissant les rues, les salades de feuilles de thé dont on raffole, le riz légèrement épicé, l’internet épisodique, le froid d’après le coucher du soleil et surtout l’ivresse d’avoir pu être là, au restaurant Royal Rose, à quelques pas de Aung San Suu Kyi pour se retrouver, vers cinq heures du matin 6 janvier 2015, à Bagan située à 290 km au sud-ouest de Mandalay et 700 km au nord de Rangoun . 



Du IXe siècle au XIIIe siècle, plus de 10 000 temples, pagodes et monastères bouddhistes ont été construits dans les plaines de Bagan. 2200 temples et pagodes survivent encore aujourd'hui suite au passage du tremblement de terre dévastateur de 1975. Le fleuve Ayeyarwady côtoie ses rives.

Il fait encore nuit alors qu’un genre de touk-touk nous conduit vers l’hôtel, 











Les chauffeurs nous proposent déjà des excursions guidées aux différents temples, le tout en ''horse car'' ou encore confortablement installés dans le touk-touk. Nous allons préférer le vélo que l’hôtel met à notre disposition.

L’hôtel est correct, sans plus, mais on y vient principalement pour ces temples qui remplissent le paysage, le rendant mystique. Les touristes qui y séjournent sont là pour cela. Qu’ils soient installés dans le Vieux Bagan ou le Nouveau Bagan, on les rencontrera à pied, à vélo ou encore sur des motocyclettes électriques. La ville s’enorgueillit d’être zone libre de plastique et ça se voit à son aspect écologique.



Très propre, Bagan respire calmement et son aspect zen rappele Vientiane au Laos.













Déjà, au premier jour, s’arrêtant dans un temple qui semble désert, nous y croisons un Birman fort sympathique. Il nous le fera visiter nous expliquant que la grande majorité des temples sont sous la protection de quelqu’un qui voit à le maintenir 
propre et en vie. Si vous vous rendez sur ma chaîne You Tube vous pourrez apprécier la beauté des lieux et surtout l’environnement. Du haut de ce temple on voit tout autour ces temples qui remplissent les quatre points cardinaux. Unique!




Depuis notre arrivée en Birmanie, nous avons croisé et discuté avec des touristes français, italiens, danois et québécois. Chacun est enchanté de son séjour et Bagan, nous pouvons le constater à notre tour, revêt un cachet particulier. Tout comme pour Rangoun, rien n’est organisé en fonction du tourisme mais plutôt comme une offrande à l’étranger des trésors dont ils seraient les mandataires, les gardiens, les protecteurs












La majorité de ces touristes, et nous le constaterons rapidement, visitent les temples de Bagan à différentes heures de la journée, persuadés que l’énergie qui s’en dégage se transforme selon les couleurs, selon l’heure. Le soir -principalement autour du coucher de soleil - tout revêt une dimension que les mots semblent bien pauvres à décrire.



Nous avions remarqué à Rangoun cette espèce de coloration sur le visage des Birmans. Dans notre profonde ignorance on croyait que cela avait un lien direct avec le bouddhisme. C’est ici que l’on saura qu’il s’agit du thanakah, une pâte obtenue à partir de l’écorce d’un arbre mélangée à quelques gouttes d’eau. On s’en enduit le visage afin de se protéger du soleil ou encore pour corriger quelques imperfections cutanées.



On fume beaucoup en Birmanie. Les cigarettes Red Ruby sont les plus populaires. On fume et on consomme également bière et whisky (Jack’s Daniel). Toutefois, et c’est populaire principalement chez les hommes, on consomme le bétel. Ce stimulant fait partie de la vie quotidienne. Il se présente sous forme de feuilles à mastiquer, de cigares et jaunit les dents et la bouche. Il en résulte une habitude à cracher ce qui répand sur le sol d’immenses plaques jaunes.

Les jours passés à Bagan se déroulent sous le règne de la tranquillité. Il aura fallu d'un coucher du soleil et de la noirceur s’en suivant pour vivre une petite aventure et qu’un ange gardien nous vienne en aide : un chauffeur de ''horse car''du nom de Toto.

Une fois le soleil couché, tout devient d’une noirceur d’encre. Aucune lumière n’éclaire les rues, circuler à vélo se révèle périlleux et les chances de se perdre, inévitables. C’est l’obscurité complète. Étions-nous sur la route nous ramenant vers l’hôtel ou encore roulant dans la mauvaise direction, la carte devenue invisible ne nous était d’aucun secours? Les informations durement arrachées et aussi fausses les unes que les autres firent que plein sud ou plein nord s’avérait pour les égarés que nous devenions au fur et à mesure que péniblement on roulait vers l’inconnu, aggravaient notre situation.

Dans la noirceur de 7 heures équivalant à celle de la nuit la plus complète  en Occident, on entendit le bruit des sabots d’un cheval sur le pavé, on ne pouvait trop savoir à quelle distance de nous. Les conducteurs de ces charrettes tirées par un cheval sont munis d’une lampe de poche qui projette un faisceau de lumière devant elles. Les bras dans les airs, par chance le chauffeur nous voit et s’arrête. On réussit tant bien que mal dans un anglais qu’il comprend en-dessous de très peu, à lui expliquer notre situation de naufragés des ténèbres. Il nous fait comprendre, après s’être présenté fort poliment comme le veut la coutume birmane, qu’il lui est impossible de nous faire grimper avec lui ainsi que les deux vélos. Il appelle sur son portable, n’obtient aucune réponse. On décide donc de le suivre à la queue leu leu, une lueur de lumière devant son cheval.

Alors que nous devions nous rendre en direction du Vieux Bagan, nous nous retrouvions dans la direction opposée. Une bonne vingtaine de minutes plus tard, nous voici arrivés chez un ami de Toto, propriétaire d’une camionnette pouvant y recevoir les vélos et les désorientés que nous étions. Une autre vingtaine de minutes plus tard, nous rentrions à l’hôtel. Le plus étonnant dans cette histoire, c’est que Toto ne travaille pas dans le secteur où nous logons, beaucoup trop éloigné de sa demeure. Ce qui n’a pas empêché le lendemain après-midi, après une autre promenade dans le marché du Vieux Bagan, à pied cette fois, de le retrouver. Il nous raccompagnera à l’hôtel afin de nous préparer pour le retour sur Rangoun. 

Semble-t-il qu’en Birmanie si tu ne peux pas bénéficier de la présence d’un ange gardien, de son secours et son soutien, tu risques de te retrouver dans de forts mauvais draps! 


Lorsque nous avons acheté les billets de bus de nuit pour rentrer à Rangoun, la concierge de l’hôtel nous avait signalé qu’une navette nous conduirait au terminus. Quelle ne fut pas notre surprise de voir s’arrêter dans la cour du AungMingalar le même type de camionnette que celle nous ayant ramenés la veille, sauf que cette fois nous serions plus de dix passagers et leurs bagages à y prendre place! Vaut mieux parfois en rire mais cette fois le comique était consommé. 


Nous quittions Bagan, une certitude de retour profondément collée à l'esprit. Intuition née sans doute du fait que ce pays à la fois mystérieux, poussiéreux, intriguant et prêt à bondir vers on ne sait quoi, ce pays nous a interpellé l’âme… et une partie du cœur y demeure accrochée.



À suivre  (en photos)



























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