mardi 27 décembre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-NEUF (29)



Ça fait tout drôle que de travailler ce saut la nuit. La raison? C'est que je suis à faire le saut entre le jour et la nuit pour mieux me préparer à l'heure asiatique que j'adopterai dans quelques jours. Donc, vous l'avez compris, il s'agit ici du dernier avant le Vietnam. Et il sera un peu spécial du fait que je vous présente deux versions du même poème. Je n'arrivais pas à opter pour une ou pour l'autre, de sorte que voici les deux.


cet homme ne connaît pas...


… la liberté
il vit dans un pays libre de toute liberté
où, contre la noirceur, on érige des maisons blanches
et au bout du champ, on creuse un trou profond

… ne connaît que le mensonge...

cet homme ne connaît pas les mains sans réserves
il vit dans une prison morose aux murs menottés
où chacun cherche dans les recoins biscornus de son espace
les empreintes encore fraîches laissées par le bourreau


… la parole sans drapeau
on le flagelle à bout de bras de paroles et de drapeaux
au centre de leurs coutures roses, une femme aux seins nus
langoureusement l’invite à fertiliser le désert de ses solitudes

… ne connaît que le mensonge…

cet homme ne connaît pas les pieds déliés
il crache de la salive rouillée sur ses entraves endolories
et transporte de la salle des pas perdus à celle des supplices
toutes les saletés quotidiennes que ses espoirs alimentent


… la justice
en déséquilibre précaire entre deux plateaux de balance,
dans son approximative mesure des empires à la dérive
elle rend licite l’illicite combat des océans contre les terres

… ne connaît que le mensonge…

cet homme ne connaît pas les yeux ouverts
on les lui a crevés à la naissance avec le tison de la foi
ses cicatrices oculaires sont de chétives fibroses,
des oiseaux qui recousent les nuages de l’obscurité


… l’amour
on le lui a enseveli sous des tonnes de roc
d’avalanches sordides emprisonnant sa passion
et l’arthrose de la sécheresse grinçait entre ses dents

… ne connaît que le mensonge…
cet homme ne connaît pas les chemins de la peur
ce n’est que de la sueur qui ruisselle sur son âme
transportant des frissons dans une brouette de vent
afin de les repiquer sur les aiguilles du temps


… la mort
une ombre invisiblement plus vaste que lui, le suivait
le suit, le suivra jusqu’au bout de ses torpides noirceurs
seules éternités que la vie éclaire d’une profonde rancoeur

… ne connaît que le mensonge…
cet homme ne connaît pas son corps
endolori à coups de fadaises, endormi à coups de somnifères
et la nuit, toujours il marche, par lui-même affaibli
vers un trou profond au bout d’un champ de névrose


… la haine
elle circule dans son sang à pas de coyotes
ceux qui rongent les roses sous les barbelés
et l’on copie dans de grands cahiers inutiles
ce qui fait de cet homme un homme qui ne connaît

que le mensonge aux espoirs velléitaires







cet homme ne connaît pas... (version 2)


… la liberté

il vit dans un pays libre de toute liberté
où, contre la noirceur, on érige des maisons blanches
et au bout du champ, on creuse un trou profond

… ne connaît que le mensonge...
mains sans réserves
prison morose aux murs menottés
dans les recoins biscornus de l’espace
des empreintes fraîches sont laissées par le bourreau


… la parole sans drapeau

on le flagelle à grands coups de paroles, de drapeaux
au centre de leurs coutures roses, une femme aux seins nus
langoureusement l’invite à fertiliser le désert de ses solitudes

… ne connaît que le mensonge…
pieds liés
salive rouillée sur entraves endolories
de la salle des pas perdus à celle des supplices
toutes les saletés quotidiennes alimentent l’espoir


… la justice

en déséquilibre précaire sur deux plateaux de balance,
dans son approximative mesure des empires,
rend licite l’illicite combat des océans contre les terres

… ne connaît que le mensonge…
yeux fermés
crevés à la naissance avec le tison de la foi
cicatrices oculaires, chétives fibroses,
des oiseaux recousent les nuages de l’obscurité


… l’amour
on le lui a enseveli sous des tonnes de roc
d’avalanches sordides emprisonnant sa passion
et l’arthrose de la sécheresse grince entre ses dents

… ne connaît que le mensonge…
chemins de la peur
sueur qui ruisselle sur l’âme
frissons transportés dans la brouette du vent
et repiqués sur les aiguilles du temps


… la mort

une ombre invisiblement plus vaste que lui le suivait,
le suit, le suivra jusqu’au bout de ses torpides noirceurs
seules éternités que la vie éclaire d’une profonde rancoeur

… ne connaît que le mensonge…
corps endolori à coups de fadaises,
endormi à coups de somnifères
la nuit, affaibli, toujours en marche
vers ce trou profond au bout du champ de la névrose


… la haine

elle circule dans son sang à pas de coyotes
ceux qui rongent les roses sous les barbelés
et l’on copie dans d’inutiles grands cahiers
ce qui fait de cet homme un homme qui ne connaît

que le mensonge aux espoirs velléitaires


Voilà pour 2011... Les prochains proviendront du Vietnam

Au prochain saut et d'ici là, une bonne et heureuse année 2012

mardi 20 décembre 2011

Il semble que mes voeux de Noël et de la nouvelle année n'ont pas été correctement livrés dans les boîtes de courriels de chacun de vous. Sans doute un mauvais tour de la part d'un quelconque génie du temps des Fêtes!

Je les reprends donc aujourd'hui et vous prie de considérer qu'ils vous sont destinés à titre individuel.

Je vous souhaite une période des Fêtes heureuse et toute remplie de petits bonheurs.

J’y ajoute mes meilleurs vœux de Bonne et Heureuse année 2012, qu’elle soit généreuse pour vous et vous permette de réaliser vos plus chers désirs.

Pour ma part, je serai en terre asiatique (Vietnam) pour quelques mois, période recouvrant une bonne partie de l’hiver.

Vous pourrez me suivre en images et en impressions sur le blogue du crapaud. Je vous laisse l’adresse :

http://turcjy.blogspot.com/

Jean

vendredi 16 décembre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-HUIT (28)



Celui-ci, je parle de ce voyage qui me mènera au Vietnam pour une bonne partie de l'hiver, celui-ci, donc, sera le deuxième «long voyage» que je prépare. Le premier, il fut interrompu après trois semaines
en raison des problèmes à la jambe alors qu'il devait s'étaler sur trois mois. Cette fois-ci, j'ose l'espérer, rien ne saura le contrecarrer.

Comment prépare-t-on un long voyage? Je me rends compte que je ne prépare pas un long voyage mais que je me prépare à aller vivre ailleurs pendant un certain temps. Avec mon frère Jacques, le co-voyageur de 2006, tout comme mon ami Jean-Luc, co-voyageur de 2010, nous avions un itinéraire assez précis, des locations pré-enregistrées, des endroits à ne pas manquer, et beaucoup d'ouverture pour les imprévus... imprévus que nous souhaitions nombreux et devant nous éblouir. Ce fut le cas d'ailleurs.

Celui de 2009 - le trois semaines en lieu et place du trois mois - ne comportait que des points de chute et par la suite, place à l'improvisation. Je dois dire que le 2011-2012 ressemble beaucoup à cela. Ce qui est organisé: le départ (28 décembre), la location d'un appartement à Ho Chi Minh (il risque fort que j'utilise souvent Saïgon pour nommer cette ville, ce mot représentant un peu plus pour moi que son actuelle dénomination), quelques séjours à Hué, Saïgon, de même que quelques plages dont les noms viendront plus tard. Sans oublier le guide qui me permettra de ne pas rater des indispensables et m'offrir des surprises géographiques de même que culturelles.

Je serai donc au Vietnam dans moins de deux semaines, entreprenant ma vie en civilisation asiatique avec en tête l'idée que je veux m'intégrer le plus rapidement possible à un nouveau mode de vie.

J'ai entrepris de lire sur le Vietnam: passionnant. Tenté, je dis bien tenté, d'ouvrir mes oreilles à cette langue à la fois chantée et concise: quasi impossible d'apprendre cela. Mais j'ai surtout insisté sur deux choses; la première est ma curiosité à vouloir rencontrer des gens qui ont encore quelques souvenirs de cette guerre horrible menée contre eux par les USA; la deuxième, essayer d'entrer en contact avec la nouvelle poésie vietnamienne, que l'on qualifierait, ici, pour tenter de la définir, de poésie underground. C'est à Saïgon que cela sera possible. Semble-t-il qu'il existerait quelques personnes qui souhaitent parler ou reparler français. On cherchera.

Le retour est prévu pour la fin du mois de mars. Mais il est ouvert: plus tôt ou plus tard. Comme le dit si bien François Legault, on verra...

Dernier point sur ce voyage: le blogue. J'ai une nouvelle adresse pour un blogue strictement consacré au Vietnam. Est-ce que je l'utiliserai ou déposerai sur «le crapaud» photos et impressions? La décision n'est pas encore tout à fait prise mais de toute manière, il y aura un lien, une passerelle de l'un à l'autre.

Je crois bien être en mesure de faire un dernier saut avant le départ: les voeux de Noël et de la nouvelle année.

Au prochain saut

jeudi 8 décembre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-SEPT (27)



Je ne sais pas si cela, déjà, vous est arrivé. Vous lisez. Doucement. Un roman, surtout. Puis, vous tombez sur une phrase, un paragraphe ou une bonne partie d'un chapitre, et vous vous dites: c'est exactement comme cela qu'il faut décrire la chose. On ne peut mieux que cela. Tout y est, mots et images.


En lisant Alessandro Baricco (Océan mer) je viens de vivre un tel moment d'extase. Je vais d'abord vous offrir le texte pour ensuite le commenter. À lire lentement.

« Seul, au milieu de la plage, Bartleboom regardait. Pieds nus, le pantalon roulé pour ne pas le mouiller, un grand cahier sous le bras et un chapeau de laine sur la tête. Légèrement penché en avant, il regardait: le sol. Il examinait l'endroit exact où la vague, brisée dix mètres plus tôt, s'étirait - devenue lac, et miroir, et flaque d'huile -, remontant la douce inclinaison de la plage pour finalement s'arrêter - sa frange ourlée d'un perlage délicat -, et hésiter un instant avant d'esquisser, vaincue, une élégante retraite, et se laisser glisser en arrière, sur le chemin d'un retour en apparence facile, mais en réalité proie idéale pour l'avidité spongieuse d'un sable qui, jusque là pacifique, se réveillait soudain et - cette course de l'eau en déroute - l'évaporait dans le néant.
Bartleboom regardait.
Dans le cercle imparfait de son univers visuel, la perfection de ce mouvement oscillatoire formait des promesses que l'unicité singulière de chacune de ces vagues condamnait à n'être pas tenues. Il était impossible d'arrêter cette continuelle alternance de création et de destruction. Ses yeux cherchaient la vérité, descriptible et mesurable, d'une image complète et sûre: et ils se retrouvaient en fait courir derrière l'incertitude mouvante de ce va-et-vient qui berçait et bafouait tout regard scientifique.
C'était agaçant. Il fallait agir d'une manière ou d'une autre. Bartleboom stoppa ses yeux. Il les dirigea juste devant ses pieds, encadrant une portion de plage muette et immobile. Et il décida d'attendre. Il fallait qu'il cesse de courir après cet épuisant balancier. Si Mahomet ne va pas à la montagne, et cetera, et cetera, se dit-il. Tôt ou tard viendrait - dans le cadre délimité par ce regard qu'il trouvait mémorable de froideur scientifique - s'inscrire le profil exact, ourlé d'écume, de la vague qu'il attendait. Et là, il se fixerait, comme une empreinte, dans son cerveau. Et lui, il comprendrait. Tel était le plan. Avec une abnégation totale, Bartleboom se cala dans une immobilité dépourvue d'affects, se transmuant, si l'on peut dire, en instrument d'optique neutre et infaillible. Il respirait à peine. Dans le cercle fixe découpé par son regard, un silence irréel tomba, un silence de laboratoire. Bartleboom était semblable à un piège, imperturbable et patient. Il attendait sa proie. Et la proie, lentement, arriva. Deux chaussures de femme. Grandes, mais de femme.»

Combien de fois, je ne saurais le dire, et plus particulièrement en marchant sur la plage de Varadero à Cuba, mon regard était subjugué par le travail de la vague, son continuel et si différent aller-retour. Je me suis toujours dit que celui qui écrit doit d'abord et avant tout être capable de bien décrire. En lisant ce passage de Baricco, si extraordinairement bien é et décrit... je suis certain que l'on ne peut trouver mieux pour dire le geste et le sentiment, les mots au service de l'image. On ne peut décrire correctement les sentiments, les émotions sans, au préalable, être en mesure de bien le faire avec les choses, puis le choc des choses, puis le résultat du choc des choses. Il doit y avoir dans cette manière d'écrire une certaine rigueur scientifique un peu comme ce Bartleboom qui cherche à décrire là où finit la mer... Admirable. Et j'achève ce saut, en me disant que dans vingt (20) jours ça sera le grand départ vers le Vietnam. J'en reparle bientôt et plus en détails.

Au prochain saut






lundi 28 novembre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-SIX (26)





Je ne sais pas si vous êtes comme moi; parfois, avant que n'arrive un événement bousculant la quotidienne réalité, j'ai besoin de revenir à mes éveilleurs de conscience préférés. Y chercher ou y retrouver des réflexions qui permettent d'éclairer l'obscur que je ne vois pas. À un mois - 28 novembre au 28 décembre - de mon départ pour un hiver au Vietnam, c'est un peu le besoin que je ressens. Voici ce que j'ai trouvé.


. Il y a des sentiments illisibles tant le coeur y dit de choses en même temps! Jean Bédard

. Nous nous prenons pour des étoiles alors que nous ne sommes que des étincelles. J.B.

. Le coeur ne fait jamais l'unanimité, et l'amour pour une personne exige de trahir un peu les autres. J.B.



. Le bien impose le choix et le choix déchire les hommes. Mais, à l'inverse, là où le bien prime, même le mal engendre le bien. Les malfaisants ne réussissent qu'à rendre les hommes bons encore meilleurs. J.B.

. ... c'est la qualité de nos décisions qui importe et non leur quantité. J.B.

. Le rêve est le lieu des causes. Ce que nous appelons bien prétentieusement «la réalité» n'est que le lieu des effets. J.B.

. Il y a des absences dont on ne prend pas immédiatement conscience et qui pourtant agissent sur nous. J.B.




. Le concept philosophique le plus sérieux qui s'oppose ou qui relativise la liberté humaine, c'est le destin. Lorsque l'être humain regarde devant lui, vers le futur, pour évaluer les différentes possibilités qui s'offrent à lui et pour planifier son choix, il croit à la liberté; mais lorsqu'il se retourne en arrière et qu'il observe sa vie, non plus comme un projet, mais comme un résultat, il a l'impression que tout s'est produit de façon fataliste, en accord avec une conception préétablie et nécessaire. Le destin c'est ce que l'on n'a pas choisi et qui choisit à notre place... à travers nos choix apparents. Et même si nous ne croyons pas au concept général de destin, selon lequel tous les événements sont prédestinés ( comme l'ont pensé entre autres les stoïques ), il semble inévitable de croire au moins à un destin plus limité mais inexorable: la mort. Fernando Savater



. Agir c'est essentiellement choisir et choisir c'est conjuguer de façon adéquate la connaissance, l'imagination et la décision dans le champ de ce qu'il est possible de faire. F.S.


. Les rencontres ne sont possibles que dans un certain vide. Yvon Rivard

. Le silence est fait de paroles qui se taisent. Y.R.

. S'habituer! On ne s'habitue qu'à des rêves avortés. Y,R.

. Il faut toujours purifier la question de toutes les réponses qui l'obscurcissent. Y.R.


. ... ma trop bruyante solitude m'avait un peu tourné la tête... Bohumil Hrabal



. Adossé au comptoir de la Brasserie-Noire, je bois un demi; à partir d'aujourd'hui, te voilà seul, mon bonhomme, tu dois faire face tout seul, te forcer à voir du monde, t'amuser, te jouer la comédie aussi longtemps que tu t'accrocheras à cette terre; à partir d'aujourd'hui ne tourbillonnent plus que des cercles mélancoliques... En allant de l'avant tu retournes en arrière, oui: progressus ad originum et regressus ad futurum, c'est la même chose, ton cerveau n'est rien qu'un paquet d'idées écrasées à la presse mécanique. B.H.

. ... il me suffit de fermer les yeux pour voir tout plus nettement que dans la réalité... B.H.

. Comme vous avez dit, c'était magnifique et parce que c'était magnifique, c'était aussi dangereux et puisque c'était dangereux, c'était ce que j'aime, ce qu'il me faut. B.H.


. Il savait bien que ceux qui se vantent de leur bonheur ou de leur vertu, le font, le plus souvent, sans motif... Hermann Hesse

. On peut se permettre d'observer les hommes, de rire de leur sottise ou d'en avoir pitié, mais il faut les laisser libres de suivre leur chemin. H.H.

. Tout être humain a une âme neuve. H.H.

On reviendra bientôt sur ce voyage hivernal, surtout sur ce qu'il impliquera pour les sauts du crapaud.

Au prochain saut





vendredi 18 novembre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-CINQ (25)



Éclectique

En vrac
Et
Échevelé

. Le gouvernement fédéral canadien, vous savez, celui est majoritaire et majoritairement conservateur, celui-là, lance un programme pour la protection de l'ours blanc dans le grand nord du Canada. Doit-on s'en féliciter? S'en surprendre alors que systématiquement il refuse de collaborer à la protection d'une autre espèce en voie de disparition: l'homme. Aurait-il pris exemple sur la compagnie Coca-Cola qui incite les consommateurs de cette boisson gazeuse à donner généreusement pour cette cause?


. Vous vous souvenez qu'en mars dernier en voulait la tête de Charra pour avoir frappé Pacioretty à la tête. Aujourd'hui, alors qu'aucune accusation ne sera portée contre le défenseur des Bruins de Boston, eh! bien (je le sais, c'est une faute, mais je préfère l'écrire ainsi) on n'en parle même pas. Les amateurs, grands connaisseurs de hockey et partisans un petit peu chauvins des Canadiens ont certainement la tête ailleurs!


. Nos ministres québécois vont et viennent à Ottawa afin de plaider leur cause dans deux dossiers relevant de la justice: la loi sur les jeunes contrevenants et le registre des armes à feu. Nos deux ministres sont revenus bredouilles. C'est vrai qu'un gouvernement majoritaire n'a pas de comptes à rendre à personne. Je vous l'avais bien dit en d'autres circonstances, que le meilleur des mondes reste toujours celui d'un gouvernement minoritaire, autant à Ottawa qu'à Québec. Mais on m'écoute pas. On ne prend pas le crapaud au sérieux. Le PQ, l'ADQ, la CAQ, le QS, aucun de ces partis politiques québécois ne sont montés aux barricades pour défendre notre façon de réhabiliter les jeunes contrevenants, de protéger la population contre les armes à feu. Aucun n'a fait ses choux gras et laisse les conservateurs majoritaires nous déclarer qu'ils sont les seuls à véritablement prendre partie pour la sécurité de la population et se ranger du côté des victimes. Que répondrait-on à cette simple question : qui serait du côté du jeune devenu contrevenant parce que victime d'une agression criminelle dans son enfance?


. Les indignés, ceux de New York actuellement, d'Espagne auparavant, et d'un peu partout maintenant, ces indignés commencent à se rendre compte que changer d'un iota la situation financière actuelle réside en une forme historique de révolution qui, malheureusement, ne se concrétisera que dans... x années. Le plus comique de toute cette histoire: la crise a été causée par les banquiers et pour la régler on place les banquiers à la tête des gouvernements. Non, rien de comique, seulement un réflexe d'autodéfense...


. J'aime bien les nouvelles publicités de Benetton. Il y avait longtemps que cette maison ne nous avait pas provoqués. Ça commençait à être le temps.


. François Legault: on verra. On verra bien qu'il n'y a absolument rien dans cette bulle rétrograde. On verra surtout que le courant qui exige un changement dans la manière de faire de la politique ne se retrouve pas là. De la vieille politique avec de vieux politiciens ressuscitant des vieilles idées que même nos vieilles oreilles ne veulent plus entendre. À éviter.


. Je vous avais dit que j'allais bientôt vous annoncer - en primeur - le nom du prochain chef fédéral du NPD. Tout comme moi, vous ne connaissez que Thomas Mulcair. Les autres, d'illustres inconnus. Alors je vous prédis que le NPD qui a commis la grave erreur de ne pas, et cela rapidement, avoir créé un parti provincial québécois, je vous prédis l'élection d'un chef, et ce chef ne proviendra pas du Québec. Et au prochain scrutin fédéral, quand nous aurons la possibilité de battre ce gouvernement majoritaire et conservateur, alors là, allons-y vers un gouvernement minoritaire néo-démocrate. Tout un flair politique que ce crapaud!

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jeudi 10 novembre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-QUATRE (24)



Les citations que vous lirez aujourd'hui - deux pour chacun des auteurs, sauf Colette et Benjamin Kunkel - sont le fruit du hasard. Et vous constaterez que le hasard fait souvent bien les choses...

. Le
goût qu'il avait des créatures sordides, l'amour ignoble qu'il leur vouait, cette dégradante et répugnante ardeur qu'elles faisaient bouillonner en lui, le poussaient à se prendre pour un être anormal de la plus basse espèce.
Francis Carco

. Ils savaient mieux que personne que certains actes doivent être commis par certains êtres sans que ceux-ci puissent s'y soustraire ou tenter de s'y refuser.
Francis Carco


. Il avait conservé, de la très petite enfance, cette aberration douce, cette paisible sauvagerie qui garde l'enfant tout jeune contre la peur de la mort et du sang.
Colette


. Après tout, Van m'avait connu aboulique, et les gens qui vous connaissent bien se débrouillent toujours pour vous assujettir à vos antécédents.
Benjamin Kunkel


. Une chose que j'aime chez mon père c'est qu'il ne tient pas trop compte des règles, il dit qu'il faut toujours jouer avec et non pas selon les règles parce qu'une vie sans danger ce n'est pas une vie.
Nancy Houston

. Quand on pleure chaque raison de pleurer en entraîne une autre et on a du mal à s'arrêter...
Nancy Houston


. Ceux qui tuent sont des hommes, comme ceux qui sont tués, c'est cela qui est terrible.
Jonathan Little

. C'était cela que je ne parvenais pas à saisir: la béance, l'inadéquation absolue entre la facilité avec laquelle on peut tuer et la grande difficulté qu'il doit y avoir à mourir.
Jonathan Little


. Tel est le problème avec ceux qui ne s'expriment jamais qu'en toute franchise: ils sont persuadés que chacun agit comme eux.
Khaled Hosseini


. La vie ne vous accorde un bonheur intense que lorsqu'elle s'apprête à vous retirer quelque chose.
Khaled Hosseini


. Le drame de certaines bonnes intentions est qu'elles n'ont ni le courage de leurs engagements ni de suite dans les idées.
Yasmina Khadra

. Quelle que soit l'ampleur des dégâts, aucun cataclysme n'empêchera la Terre de tourner.
Yasmina Khadra


. Ce n'est pas la tête, mais le coeur, qui est à la base de tout! C'est là l'endroit chez où il ne poussera jamais rien d'autre.
Maxime Gorki

. Tout le monde n'a pas les yeux bouchés, il y en a qui se les ferment eux-mêmes...
Maxime Gorki


. Ça ne sert à rien de penser, d'agiter des idées. On n'agit pas selon ses idées, on agit toujours sans réfléchir, selon les impulsions du moment.
Hermann Hesse

. Seules les montagnes ne se rencontrent pas.
Hermann Hesse





«un carnet d'ivoire avec des mots pâles»


C A T É N A I R E (adjectif)
. relatif à une chaîne de ganglions;
. qui se reproduit en chaîne.



C A U T E L E U X (adjectif)
. qui agit d’une manière hypocrite et habile;

hypocrite; sournois.

. Air cauteleux, manières cauteleuses : patelin, mielleux.



Au prochain saut


jeudi 3 novembre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-TROIS (23)



Une autre manière de regarder le temps passer: les oies blanches vues au printemps dernier ont dessiné tout l'avant-midi de magnifiques figures géométriques sans noms, incomplètes et mobiles. Le tout enrobé d'une multitude de sons identiques et sans écho. Je les avais remarquées, les oies blanches, à mon arrivée en campagne. Elles ne frayaient pas avec les bernaches. Les unes sur la rivière, les autres dans le grand champ. Aujourd'hui, un scénario différent. Elles s'en allaient tout simplement vers le sud. Nous sommes assurément à l'automne tout comme nous étions au printemps. Entre les deux, quelques mois dans la vie d'un crapaud qui a modifié son environnement. Et qui se prépare à un autre changement. L'hiver au Vietnam. Au chaud. On en reparlera!



Je ne sais pas d'où vient le premier coup d'oeil qui apporta avec lui les images de ce poème. C'était un enfant jouant seul à saute-mouton... avec l'espoir pour tremplin et le néant pour arrivée. Cela a donné ce qui suit.



l’enfant



quelques miettes de pain demeurées sur la table desservie
les yeux ouverts plus grands encore que ceux de l’oiseau
l’enfant à qui l’on a menti et n’en retient que la promesse
regarde, imagine que ces trésors lui appartenaient


l’enfant allonge la main sous la nappe salie
recueille dans un cérémonial ludique
les ailes raidies d’un papillon
chrysalide encore


combien de tables ornées de ces candélabres éteints
d’un bout à l’autre des grands villages devenus villes
présentaient un buffet puis un banquet puis une noce
à l’enfant jouant à saute-mouton avec l’espoir


l’enfant se perd dans un vaste champ d’avoine
il cesse de courir derrière le vent tiède
qui l’amène, témoin volage
vers d’autres conscrits


et les grands, ceux qui étaient plus grands que les petits
ceux qui savaient savoir sans que les autres ne sachent
ceux qui dans leurs mains plus fortes que les pluies d’été
ces ankylosés de certitudes acquises se moquaient


l’enfant abruptement coupé de sa fuite horizontale
cherche derrière son âme blessée
les mots qui rassurent
et trouve le néant


l’enfant ne se nourrit pas de miettes de pain
encore moins de fausses promesses puisées
à l’envers de la vérité
l’enfant ne marche pas dans les pas des grands de ceux
qui avant lui ont battu les champs d’avoine à grands coups
de silences convenus et de mensonges répétés
l’enfant à saute-mouton sur la vie cherche à fuir
noces banquets buffets villes villages maisons
pour retrouver son âme blessée aux portes du néant





«un carnet d'ivoire avec des mots pâles»



F U L I G I N E U X (adjectif)
. qui rappelle la suie, qui donne de la suie, qui en a la couleur;
moirâtre.
. d’une obscurité épaisse;
- fumeux, obscur, incompréhensible.



H O U R V A R I (nom masculin)
. cri des chasseurs, sonnerie de trompe pour ramener des chiens tombés en défaut;
. ruse d’une bête traquée qui revient à son point de départ pour mettre les chiens en défaut;
. grand tumulte
- tapage, charivari, ramdam.


Au prochain saut

mercredi 26 octobre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-DEUX (22)



Autant sur les écrans de télévision que sur je ne sais combien de sites internet, les cadavres inertes de Kadhafi et de son fils nous ont été présentés, enveloppés dans une couverture que l'on croirait provenir de chez Walmart alors qu'une foule défile... Parmi elle, certains silencieux, d'autres armés d'un portable afin de photographier le dictature déchu s'assurant ainsi que c'est bel et bien lui; plusieurs, la main sur la bouche pour étouffer soit l'odeur ambiante dans ce conteneur réfrigéré, soit l'émotion qu'ils ne peuvent encore nommer tout à fait... Un homme les invite à circuler sans doute pour permettre au maximum de gens de passer...

Deux hommes... pour plusieurs ils avaient perdu leur essence humaine et cela longtemps avant de mourir. Un chef d'État puissant, autoritaire, despotique... il y a encore quelques jours. Un père, près de lui un de ses fils... les autres sont toujours en cavale... devenus de lugubres macchabées au centre d'un quasi dépotoir et devant lesquels des centaines et des centaines de personnes déambulent comme pour se délivrer d'un passé douloureux, une catharsis que l'on souhaiterait la plus libératrice possible.

Ils auraient été exécutés sans autre forme de procès que celui mené par un groupe d'hommes, déchaînés, ayant la libération totale de leur pays pour noble cause, celle-ci passant inexorablement par la mort de ce Kadhafi qui pendant plus de quarante ans les a humiliés, interrompus dans leur marche personnelle vers l'avenir. Il aurait tout pris, ne leur aurait rien laissé.

Ces hommes l'ont pris sans lui laisser le temps ni de réagir ni de rugir. Kadhafi ne saura jamais que près de lui, sous une couverture, a été placé son fils, mort dans des circonstances inconnues. Il ne pourra plus jamais ni crier ni hurler et encore moins commander des attentats contre son peuple ou contre d'autres humains.

Ces deux cadavres, aujourd'hui anonymement enterrés, auront été fauchés par ce que l'on appelle le «printemps arabe», version libyenne. Deux cadavres que le vent désertique continuera, et cela pendant des siècles, à ensevelir, seules et uniques funérailles qui leur auront été autorisées.

Quelles questions cette histoire invite-t-elle à nous poser?

La première, certainement la plus évidente, est en lien avec le concept d'humanité. Est-ce qu'un être humain reconnu responsable et même coupable d'actes inhumains, de quelque nature qu'ils soient, conserve toujours le titre d'être humain? Ayant délibérément failli à ses devoirs d'être humain, devient-il forcément un être inhumain, à classer dans une catégorie à part, avec des lois autres et différentes? Doit-on le considérer exclu de nos sociétés civilisées et traiter en paria? Les gestes deviennent-ils plus importants que sa nature propre?

La deuxième porte sur la justice. Où se situe la barrière entre justice et vengeance? Pour faire ou rendre justice doit-on obligatoirement juger selon certaines lois, locales ou universelles? Est-ce rendre justice que d'oublier les victimes d'actes qui, en plus d'avoir été dégradants, peuvent être considérés comme immoraux? Dans le cas de Kadhafi, tout comme dans celui de certains dictateurs connus du XXIième siècle et d'avant, le jugement peut-il servir d'exemple et ainsi éviter que de semblables situations se répètent? La peine de mort à la Ceausescu, à la Saddam Hussein, pour ne citer que ces deux cas, est-elle la solution, est-elle une solution? Si oui, à quoi? Si non, que faire?

La troisième interroge la mémoire. Vous et moi avons combien de fois entendu cette phrase relative à l'histoire: c'est en scrutant notre histoire qu'on apprend à ne pas répéter les erreurs du passé. Est-ce exact? Combien de guerres, combien de génocides encore maintenant et cela après tout ce que l'histoire nous a enseigné? Notre mémoire possède la faculté d'être sélective et je m'aperçois que cela pourrait bien être une de ses plus grandes qualités. Cela nous permet d'oublier certaines souffrances malgré le fait que ce que l'on cherche à oublier revient immédiatement quand un événement similaire le réhabilite. Cela nous permet de faire des liens entre le maintenant et l'avant mais il semble que ça n'agit pas très efficacement sur l'après. Il y a toujours de bonnes raisons, des excuses intelligentes et des circonstances atténuantes. Dans quelques années, que restera-t-il dans nos mémoires de ce Kadhafi étendu sur le sol froid près de son fils? L'image d'un homme qui fut père, qui mourut violemment, beaucoup comme il a vécu et fait vivre autour de lui, et qui, mort, tournait le dos à son fils?

Il y aurait certainement d'autres interrogations d'ordre politique, religieux, historique sur lesquelles se pencher. Faire de la prospective sur la suite des choses... Envisager un scénario identique en Syrie ou au Yémen... De mon côté, ces événements qui, il y a moins d'un an, auraient sans doute été classés parmi la science-fiction, m'auront inspiré ceci:



les larmes sur un drapeau


les larmes coulaient des yeux
vagues perdues derrière un tsunami
torrentiel mouvement
les portant vers la rive
qu’elles n’ont pas eu le temps de rejoindre

le sang des larmes
s’arrachait comme des lambeaux séchés
se distribuant lui-même
torrentiel ressac
aux mains tendues, déchirées de leur peau

les larmes sur un drapeau poussiéreux
le désert les aura promptement séchées
torrentielle course
traçant en d’indélébiles lettres de feu
le mot liberté


Au prochain saut

mercredi 19 octobre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT-ET-UN (21)



Afin d'embaumer le début de cette bizarre de forme de fatigue automnale (ça en fait des «de» en peu de mots), donc pour embaumer cela, je vous offre ce matin une période de «chiâlage», de «rouspètage»... période digne des plus belles époques au cours desquelles le crapaud y allait avec ses 4 E: Éclectique En vrac Et Échevelé...

Vous me voyez venir...

Les INDIGNÉS... La CONSTRUCTION...

Les JUGES UNILINGUES À LA COUR SUPRÊME DU CANADA...

DEUX DÉPUTÉS FÉDÉRAUX DE PLUS POUR LE QUÉBEC...

La DÉCONFITURE D'OBAMA...

Le RETOUR À LA MAISON D'UN SOLDAT JUIF ET DE 477 PALESTINIENS...

L'AFFAIRE DSK...

Les SUITES DU PRINTEMPS ARABE... KHADAFI... La DETTE GRECQUE...

FRANÇOIS LEGAULT... Le PQ ET LE BLOC QUÉBÉCOIS...

Le GAZ DE CHISTE...

Les PONTS DE MONTRÉAL...

La JEUNE CHINOISE FRAPPÉE DANS LA RUE ET LAISSÉE POUR COMPTE...

Le RETOUR DE STAR ACADÉMIE...

Les SUDOKU DU JOURNAL LE DEVOIR DE PLUS EN PLUS DIFFICILE...

Le PIÈTRE DÉBUT DE SAISON DES CANADIENS DE MONTRÉAL...

Les RECORDS D'ANTONY CALVILLO...

Le PROJET DE LOI 204 DEVENU LOI ET L'AMITIÉ QUÉBEC/QUÉBÉCOR...

Le CANCER DE LA PROSTATE ET LA VITAMINE «E»...

La COURSE AU LEADERSHIP DU NPD...

La VICTOIRE DE FRANÇOIS HOLLANDE EN FRANCE...

La MORT DE STEVE JOBS...

et j'en oublie!

Vous voyez un peu mieux, suite à cette énumération fort peu exhaustive des événements plus ou moins récents, que notre monde vivant sur notre planète de moins en moins bleue, vous voyez à quel point tout roule de manière chaotique.

Ce que l'on entend et que je tente de décoder ressemble à une redéfinition des bases sur lesquelles tentent de se tenir en équilibre nos sociétés dites démocratiques et celles qui souhaitent cheminer vers la démocratie. Cela m'amène à plusieurs questions. Permettez-moi de vous en suggérer quelques-unes en lien direct ou pas avec les énoncés plus haut mentionnés.

La période des questions:

1) Avez-vous vérifier la signification des mots suivants: indigné; indigne; indignation ?

2) Est-ce que le retard mis par le gouvernement à établir une commission d'enquête sur la construction au Québec aura permis que l'on déconstruise tout ce qui a été commis?

3) Pourquoi deux députés fédéraux de plus au Québec? N'y en a-t-il pas déjà 75 de trop?

4) Assistons-nous présentement à l'été arabe?

5) Près de 1000 Palestiens en échange d'un seul Juif: qui aura été le plus radin dans cette affaire?

6) Seriez-vous en mesure de faire de l'ironie avec l'acronyme DSK?

7) Êtes d'accord pour dire que la Grèce est vraiment en ruines?

8) Que feriez-vous si on vous annonçait qu'une importante réserve de gaz de schiste se cachait sous votre terrain?

9) Que pensent actuellement tous ceux qui ont pris régulièrement de la vitamine E dans le but de se protéger contre le cancer?

10) Qui sera le prochain chef du NPD? (Ne cherchez plus, le crapaud répondra bientôt cette question).

11) Ne trouvez-vous pas cocasse que Hollande puisse devenir président de la France?

12) Seriez-vous d'accord pour que l'on arrête George W. Bush lors de sa prochaine venue au Canada, qu'il soit traduit devant la Cour Internationale de Justice afin de répondre à des accusations de crimes contre l'Humanité?

13) Avez-vous déjà été sollicité pour répondre officiellement à un sondage?

14) Connaissez-vous le test des trois passoires?


Voilà. Je me demande si vraiment j'ai chiâlé ou rouspété...

Ça fait tout de même un bien énorme! Essayez et vous verrez.



Au prochain saut


mardi 11 octobre 2011

QUATRE (4) CENT-VINGT (20)



J'imagine Maryse et Gérard, dans leur coin de paradis à Weedon...
Jean-Luc et Lucie, à bord de leur bateau sur le lac Champlain...
Madeleine, sur la galerie de Gentilly...

J'essaie d'imaginer ceux et celles qui au matin, loin des bruits urbains, voient le soleil se lever dans le silence du vent, se rappelant combien est merveilleux l'arrivée du jour.

C'est beaucoup dans cet esprit qu'est né ce poème que je vous offre en le dédiant à la campagne.



l’orchestre matinal



le violoncelle de l’aurore joue un prélude de Bach
les oiseaux dansent
barbouillant les nuages d’icônes multicolores

un peu en retard, une voix enrouée l’accompagne
la rosée chante
sur laquelle s’octavient huit gouttes de nuit

à l’est du soleil, aux branches endormies
le vent s’entortille
et les notes blanches du matin doucement s’harmonisent



le violoncelle de l’aurore joue un prélude de Bach
les hommes marchent
redressant à peine leur tête engourdie

entre sol et si, un cri désespérant
reste , immobile dans l’herbe dorée,
à demi enfoui sous les feuilles d’un capharnaüm

la sonate en fleur majeure improvise
un air de jazz délicatement orchestré
par les musiciens de l’orphéon disparu



le violoncelle de l’aurore joue un prélude de Bach
alors que le ciel bleu harnache le brouillard
qui enrobe le clocher de l’église

de fines pellicules de pluie pianotent finement
sur la brise matinale
puis s’évaporent tels de légers coups de cymbale

au coin de la rue longue comme un air d’opéra
une triste chanson triste
s’inscrit dans le livret du jour

Au prochain saut

mercredi 5 octobre 2011

QUATRE (4) CENT-DIX-NEUF (19)



Aujourd'hui, je vous offre deux citations d'auteurs choisis au hasard dans un cahier qui tout doucement s'épure. Pour démontrer que le hasard peut bien faire les choses.

. L'océan - ce n'est pas moi qui l'observe de ma fenêtre, c'est plutôt lui qui me regarde de ses mille yeux d'écume - conserve encore dans sa houle la terrible ténacité de la tempête.
Pablo Neruda

. Le poète n'a rien à craindre du peuple. La vie, me semble-t-il, me faisait une remarque et me donnait à jamais une leçon: la leçon de l'honneur caché, de la fraternité que nous ne connaissons pas, de la beauté qui fleurit dans l'obscurité.
Pablo Neruda

. Il se trouve dans la vie que parfois deux individus, peu faits pour se comprendre, se sentent malignement attirés l'un vers l'autre par un irrésistible courant de sympathie.
Francis Carco

. Comme toujours. Chacun a ses idées. On voit les choses d'après soi-même.
Francis Carco

. Il y a des âmes capables de cacher longtemps leur blessure, et leur tremblante complaisance pour l'idée du péché.
Colette

. Elle contemplait le coupable, par-dessous l'abîme qui sépare une grande personne de l'enfant.
Colette

. L'apprentissage de la condition minoritaire, reçu presque d'entrée, m'aura fait pressentir, au fur et à mesure que je grandissais, qu'un destin original peut véritablement s'accomplir face aux grandes mystiques collectives que chacun de nous est toujours, plus ou moins tenté de rejoindre.
Dr Olievenstein

. ... les prises de conscience cheminent lentement...
Dr Olievenstein

. La prière, c'est un peu comme une conversation privée entre soi et Dieu sauf qu'on entend pas les réponses, il faut juste y croire.
Nancy Houston

. ... les gens intelligents ont besoin de connaître la stupidité du monde...
Nancy Huston

. ... il avait toujours l'air de savoir ce qu'il faisait, même quand il ne faisait rien.
Jonathan Little

. ... les hommes grossiers et ignorants se punissent eux-mêmes.
Jonathan Little

. Je remplirais ma chair d'âme. Je réconcilierais en moi, enfin, ces deux ennemies séculaires.
Nikos Kazantzaki

. ... l'éternité est chacune des minutes qui passent.
Nikos Kazantzaki

. Oui, en vérité, il était bien difficile d'apprécier la valeur d'un acte, autant que celle d'une intention.
Roger Peyrefitte

. Chaque être avait un double qui ne lui ressemblait pas, chaque chose impliquait une contradiction ou cachait un mystère.
Roger Peyrefitte

. Seul l'amour rend immortelles les choses périssables.
Han Suyin

. ... l'humanité semble progresser non pas par la tolérance mais par le fanatisme.
Han Suyin

. La justice ne veut rien de toi. Elle te prend quand tu viens et te laisse quand tu t'en vas.
Kafka

. ... la raison d'un succès ou d'un échec prête toujours à mille interprétations...
Kafka

. Les mères, on ne les plaint pas.
Maxime Gorki

. Il y a des affections qui empêchent un homme de vivre...
Maxime Gorki

. Quand la vérité n'est absolument que la vérité, elle est quelque chose d'antinaturel, c'est une abstraction qui ne ressemble à rien du monde réel.
Aldous Huxley

. Les pensées et les sentiments sont nombreux et divers, mais il n'y a qu'un petit nombre de gestes, et le masque n'a qu'une demi-douzaine de grimaces pour exprimer mille choses.
Aldous Huxley

. Voici que la nuit tombe sur la ville, et que la ville tombe dans l'engourdissement de la peur.
Atiq Rahini

. Ton souffle est suspendu au récit de mes secrets.
Atiq Rahini

. Ma liberté neuve m'emprisonne et me paralyse.
Albertine Sarrazin

. Et tout ce que je sais des hommes, je l'emploierai contre eux.
Albertine Sarrazin

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jeudi 29 septembre 2011

QUATRE (4) CENT-DIX-HUIT (18)


















Et bien voilà, les parents se sont rejoints en terre maskoutaine le samedi 24 septembre 2011.

Gérard nous avait quittés en juillet 1995 ( un 8) et Fleurette (un 8 également) en août 2009.

Entourés des six enfants, conjoint/conjointes, ex-conjointe, petits-enfants et arrière-petits-enfants, de même que ceux qui y étaient en pensée, les cendres des parents, une fois qu'elles eurent circulé entre les bras de tous et chacun pour un dernier adieu intime, reposent réunies à jamais.

Voici le texte lu par l'aînée de la famille, Françoise - notre lumière - après l'audition de l'AVE MARIA chantée par la Callas que Fleurette aimait tant et le CAPRICE VIENNOIS de Kreisler, le coup de coeur classique de Gérard.



L’AVE MARIA de la Callas et le CAPRICE VIENNOIS de Kreisler s’entremêlent.
Deux musiques, proches et lointaines, l’une dans la cuisine, boulevard Laurier, où l’odeur de renversé à l’ananas se repend, l’autre dans le bureau vert… deux musiques se rejoignent comme des signatures de parents.



GÉRARD, nous disions, en juillet 1995, que tu étais homme de deux familles; blanche et bleue. Nous l’avons dit, l’avons écrit de la main gauche.

FLEURETTE, nous avons dit, en août 2009, que tu étais notre petite fleur accrochée à la boutonnière.

Aujourd’hui, un symbolique 24, celui de septembre 2011, nous t’accompagnons GÉRARD, ici, loin des chênes d’Arthabaska et toi, FLEURETTE, loin de tes si nombreux voyages; nous vous accompagnons en terre connue, celle qui vous permettra d’être définitivement réunis.

Les cendres que nous laissons descendre dans cette terre connue, ces cendres resteront chaudes et allumées pour les six orphelins que nous sommes devenus : six points scintillants qui ceinturent aujourd’hui cette terre connue. Elles permettent maintenant de nous souvenir des images de ce qui, pendant si longtemps, de manière à la fois différente et constamment renouvelée au rythme des époques de notre vie blanche Maintenant, ici, dans cette terre connue, bleue, blanche et fleurie, cette terre ne vous emporte pas, elle vous portera.

On n’aime jamais partir seul. Vous nous avez quittés l’un après l’autre et l’un et l’autre nous avez quittés de manière si noble que vous réunir aujourd’hui, ici, dans cette terre connue revêt un sens profond : celui d’une famille unique et d’une communauté élargie.

Vous avez été deux personnes de famille. Des créateurs de familles. De ceux qui ont fait autrement les choses et nous incitèrent à en faire autant.

Vous avez donné à la famille une dimension nouvelle, au-delà d’une prise de racines, un élan vers la continuité. Comment ne pas le redire encore une fois aujourd’hui, ici, ceinturant cette terre connue.

Vous avez été deux personnes de communauté. Des inventeurs modernes. De ceux qui crurent et partagèrent cette croyance autour d’eux - les six nous d’abord - puis tant et tant d’autres qui se rappelleront de vous comme des précurseurs.

Nous laissons à cette terre connue, un père, une mère, GÉRARD et FLEURETTE, TURCOTTE et BERGERON à jamais réunis, pour toujours aimés.

Vos orphelins proches vous remettent un scintillant bouquet d’adieux blancs et bleus.
Vos orphelins éloignés sauront venir sur cette terre connue et l’arroser.
Et la merveilleuse magie de la vie, sous cette dalle de pierre, en terre connue… se perpétuera.



Les photos de ce saut ont été prises par Roger Mongeau, Claire, Louise et Sylvie.

lundi 19 septembre 2011

QUATRE (4) CENT-DIX-SEPT (17)



Il se dégage des poèmes écrits en campagne une autre dynamique. Elle se démarque des ruelles montréalaises par un côté plus aérien, plus «vent», davantage «brise».... Si je tente d'interpréter ce qui ne l'est pas, je dirais que le concept réel/irréel/entre-réel... se fait plus... visible.

L'environnement, peut-être parce qu'il est encore à apprivoiser, se faufile par des éléments imagés différents. Également le fait que ce soit ici que boris eut achevé sa course et prît une forme définitive, me parle beaucoup.

Le bureau à Montréal donnait sur un arbre (vous vous souvenez sans doute du bouleau - maintenant coupé - surnommé Garcia Lorca en raison de sa forme ressemblant à un poignard) tout comme celui de la campagne face à une série d'arbres qui servent de platebande au clocher de l'église, les deux orientés vers l'ouest, voilà peut-être pour le réel.

Pour l'irréel, c'est assurément les couleurs beaucoup plus variées, les odeurs complètement différentes et aussi une atmosphère de quiétude que je ne retrouvais pas sur l'île.

L'entre-réel, une façon de manier l'image issue du réel ou de l'irréel afin de situer le geste poétique dans une zone de flottaison, en campagne se voit «malaxer» par une énergie plus aérienne oui, mais aussi une énergie réconciliatrice, plus ouverte sur un appel à l'action.

C'est du moins ce que je vois pour le moment. Et le poème d'aujourd'hui en est peut-être une illustration.

Bonne lecture.


combien



combien de voix perdues
contre un seul cri
celui qui, inlassablement étouffé dans la gorge,
remonte le cours du temps
puis se lance impétueusement
dans l’espace silencieux des mots errants

combien de pas égarés
contre un seul sentier
celui qui promène péniblement
tel un bouleau centenaire
l’orée des forêts parallèles vers ces routes fermées
menant inévitablement au pied des potences

combien de mains tendues
contre un seul adieu
celui qui, inexorablement, achemine au bout de soi,
au recommencement des années,
là où elles achèvent frileusement
de prolonger les plantes vertes de l’oubli

combien de cœurs ouverts
contre une seule haine
celle qui, inévitablement, transfigure les hommes du Yémen
de Lybie de Syrie d’Algérie de Tunisie
marchant en colonnes sur des chemins ensanglantées
vers une incertaine liberté

combien de regards fermés
contre un seul espoir
celui qui annonce, fragilement, au-delà des saisons passagères
le début d’un renouveau au cœur des icebergs
qui se vengeront à coup d’ours polaires
de ces traîtres engoncés dans leurs principes surannés

combien de temps nous faudra-t-il
contre un siècle sourd
pour qu’armés des pinceaux de l’urgence
sur les murs, les socles et les piédestaux
l’irrémédiable cri des mouettes se noyant
hurle aux océans leur cruelle indifférence



«un carnet d'ivoire avec des mots pâles»



C É L A D O N (nom masculin et adjectif invariable)
. vert pâle;
. porcelaine chinoise recouverte d’émail craquelé, le plus couvent vert pâle.


C A U T È R E (nom masculin)
. instrument dont la pointe, chauffée au rouge, sert à brûler les tissus;

thermocautère; moxa.

. locution «un cautère» : un remède inefficace, un expédient inutile



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mercredi 14 septembre 2011

QUATRE (4) CENT-SEIZE (16)


Didier van Cauwelaert

Je me suis levé, ce matin, avec en tête deux histoires de Didier van Cauweleart: L'ÉVANGILE SELON JIMMY et VINGT ANS ET DES POUSSIÈRES. Me rappelais que j'avais autant apprécié la première que la seconde, lue deux fois. Dans mes cahiers de lecture, voici ce qu'en 2008 j'y avais transcrit.

De L'Évangile...

- Me faire mal avec notre histoire, c'est mon seul moyen d'être encore avec elle.

- On ne souffre pas, quand on ne sait pas ce qu'on perd.

- Le grand progrès de la médecine, c'est que les médecins sont de mieux en mieux protégés contre les malades.

- Un grand amour ne se guérit que dans un amour encore plus fort. Si on veut guérir. Si on ne craint pas la rechute.

- On se sent seul quand on a perdu l'unique personne sur Terre pour qui l'on était quelqu'un de bien.

- ... la croyance fige, l'élan du coeur est la seule vérité.

- Comme toujours dans la vie, chacun poursuivait son but personnel, au travers d'un enjeu qui n'était qu'un prétexte.

- C'est fou le pouvoir d'un éclat de rire.

- Expier, ce n'est pas se délivrer d'une faute par la pénitence, c'est l'assumer, l'apprivoiser, la mener à terme. C'est une grossesse de l'âme.

- Sans orgueil on ne fait rien, sans humilité on le fait mal.

- Les pensées sont des actes que les autres commettent.


De Vingt ans...

- On a la solitude qu'on mérite...

- ... mais peu de gens aujourd'hui se souviennent que la joie de vivre est une politesse.

- Le jardin reflète ses états d'âme. Quand il est mélancolique, il lui sème des soucis.

- Ils ont peur l'un de l'autre parce qu'ils se rendent heureux.

- Il faut en avoir lourd sur le coeur pour protéger ses roses en les camouflant.

- Tu vois, dit-il après réflexion, celui qui a de l'amour et qui n'en est pas digne, ce qu'il y gagne, c'est la solitude. Seulement la solitude, ça t'enrichit. Et après, là, tu deviens digne.

- L'homme seul qui n'a plus sa raison de vivre, il est encore quelqu'un s'il lui reste une raison de souffrir.

- C'est vrai, de savoir des choses, ça aide quand on souffre, mais celui qui ne sait rien, il a moins l'idée de souffrir.

- Il a planté un décor dans ma vie, et c'est une toile d'araignée où elle est prise.

- Parce qu'au fond, on n'apprend les choses que tout seul.

- Seuls les pêcheurs donnent aux poissons.

- C'est difficile de savoir si on se tait parce qu'on se comprend, ou parce qu'on s'est tout dit.

- C'est le sort des solitaires de se fuir pour ne pas se perdre, de croire qu'un jour ils se retrouveront.



Et pourquoi ces deux histoires, ce matin?

Tout simplement parce qu'elles sont tirées de deux livres que j'ai trouvés; le premier dans une vente de garage (un vide-grenier comme le disent les Français) et l'autre, par terre dans une ruelle de Montréal.



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samedi 10 septembre 2011

QUATRE (4) CENT-QUINZE (15)



Dire combien je suis soulagé de voir boris arrivé à destination serait un euphémisme. Une longue aventure qui dura sept ans... fallait le faire!

Maintenant que le voici sur le blogue, je suis à travailler (à partir de boris) un autre texte qui incorporera le poème à une plus longue histoire. Est-ce que cela s'étendra sur sept ans, je ne saurais ni le garantir ni le dire mais ce que je sais va dans le sens suivant: ça développera l'idée des trois réalités (le réel, l'irréel et l'entre-réel) que l'on retrouve dans boris.

Comme je suis un peu assujetti à ce rythme des sept ans (le joyeux septennat) il est envisageable que le texte se retrouve sur le blogue... en 2018. Il a toutefois un titre: LE PARADOXE DE ZÉNON.


D'ici là et pendant ce temps-là, je me rends compte que l'air de la campagne m'est tout à fait propice pour écrire. Il est assez rare que j'aie deux poèmes sur le chantier... c'est actuellement le cas. Sans oublier le dernier regard, la dernière retouche et le lancement de boris. L'inspiration semble faire de l'équitation sur le vent. Je veux dire par là qu'il existe ici, en campagne, un satané petit vent tout à fait délicieux - je le nomme le «vent-facteur» - qui charrie avec lui de ces odeurs (certains diront des odeurs campagnardes), personnellement je les reçois selon les heures du jour et de la nuit comme autant de cadeaux, de signes ou de messages. Avec lui, sa douceur et sa fraîcheur, emmêlé à des silences réparateurs, que d'images me parviennent qui cherchent à se métamorphoser en poèmes... Je les cueille avec humilité et avec un plaisir renouvelé...


L'inspiration que mon ami ROBERT définit ainsi - sorte de souffle émanant d'un être surnaturel, qui apporterait aux hommes des conseils, des révélations; état mystique de l'âme sans cette inspiration - est fragile. J'ajouterais en me référant au dernier ouvrage de Daniel Mendelshon SI BEAU SI FRAGILE, que l'inspiration est belle et fragile. Je suis convaincu du fait suivant: si ma plume pouvait écrire exactement ce que je vois de beau, si je parvenais à décrire, à saisir la fragilité du moment, de l'instant fugace qui permet à une image de se fusionner en soi, si j'arrivais réellement à mettre tout cela en mots, en mots précis, ciselés à la perfection, alors je pourrais dire que je suis au service de l'inspiration devenue un souffle nourrissant l'âme.


Alors que je participais, il y a quelques mois, à un site français pour poètes amateurs, j'ai pu constater que pour la majorité des gens qui venaient y déposer leurs poèmes, l'inspiration provenait essentiellement de deux sources: l'amour et la perte de l'amour. Est-ce plus facile d'écrire un poème sur un amour naissant ou sur celui qui s'en va? Dans les deux cas, du moins pour ce que j'en retiens, sans être complètement à l'opposé du spectre, ces deux extrémités du même concept présentent des points communs - pour certains ça devient des lieux communs - dont celui de chercher à tracer une figure géométrique universelle, celle ayant la forme du coeur.


Ce n'est pas mon propos d'aujourd'hui mais cette digression me permet de faire un lien entre boris et les poèmes qui l'ont précédé, ceux qui l'ont suivi alors qu'il macérait dans je ne sais quel élixir...

J'ai réuni - ô merveille du traitement de textes - l'ensemble de mes poèmes dans un dossier intitulé à travailler et dans un deuxième temps, les ai classés à partir de thèmes qui me semblaient être un dénominateur commun (le temps; la mer/le fleuve; le corps / la marionnette; la poésie; le fantôme... ceux qui n'y trouvaient pas leur place sont encore sous un grand titre... général. Il me restera dans un troisième temps à les (re)corriger et tenter de faire ressortir les grandes lignes qui permettraient d'établir des liens entre eux ou tout simplement des chevauchements. Il ne faut pas oublier que les poèmes ne sont pas datés. Vous connaissez mon histoire personnelle avec le temps!


Je laisse ce saut en vous proposant quelques définitions de la poésie ou du poète tirées d'auteurs québécois.



André Brochu dans ADÉODAT: * Si je n'étais pas poète, je n'éprouverais pas, chaque jour que le bon Dieu amène, le besoin de me purger des merveilles entrevues aux vitres de la journée qui précède.

Roch Carrier dans DE L'AMOUR DANS LA FERRAILLE: * La poésie c'est de la pensée en train de naître...


François Hertel dans LE BEAU RISQUE: * La poésie n'est pas toujours un phénomèe objectif. Plus souvent, elle s'élabore presque complètement à l'intérieur, quittant l'objet qui l'a fait naître, pour se perdre dans les associations imaginaires.

Wifrid Lemoine dans LE DÉROULEMENT: * Quand le poète a besoin d'un appui, il se construit un poème. Le poème est la communication d'un homme avec lui-même.

Claude Péloquin
dans METS TES RAQUETTES: * ... être poète, c'est faire un tour de passe-passe sans continuer de tourner en rond.


Au prochain saut

(La photo du clocher de l'église a été prise un matin de brouillard à partir de la fenêtre de mon bureau.)











vendredi 2 septembre 2011

QUATRE (4) CENT-QUATROZE (14)

boris


peut-on?
aux portes d’un fleuve en partance vers le Japon,
installer le silence

doit-on?
lui exiger une couleur particulière
y glisser un enfant de cire
qui se numérotait le corps en binaire pour devenir universel
pour être celui qu’il n’est plus
celui qui parlait aux marionnettes
boris
le prénom qu’il lui avait donné



…une marionnette révélée
incognito sur les photos des autres épinglées dans la chambre noire
leurs mots collés sur papier émeri

autant de nous sur mille je

retrouvés aux pieds de sa figure de plâtre



un camelot mort,
,piétiné,
camelot de cire aux chiffres tatoués sur le corps

boris le nommait d’aucun substantif
celui qui le tirait par les fils

sophia
éthérée, voilée
traversant les chemins des nuages
des remuages
pour que le temps ait un sens
au cœur des colonnes grecques
l’attendra



boris,
,déjà,
n’a plus la figure in
couleur pierrot
ne défonce plus les rues avec son carrosse
qui cache
,le soir,
deux places publiques et comateuses
à rendre fou la foule

il virevolte, drille aveugle
angle mort à portée de main
couvrant d’ébène les ombres effacées
par les sabots du contretemps



à vouloir devenir
cheval de bois
atrabilaire insane jobard
nourri à la vésanie des nuits
assailli par mille succubes enfermés dans leur course infernale
déchiffrant un enfant mort



boris
marionnette déséquilibrée,
cavalier sur cheval de bois
,cruellement,
comme un jésuite nocturne marmonne des onomatopées incompréhensibles
grises et maussades
s’asphaltait s’engluait
dans la vitesse impuissante
où un fleuve l’attendait



alors tomba le camelot
calfeutré de feuilles mortes
sous les abris de l’automne
une sacoche rouge au flanc opposé
pleine encore des journaux matinaux



quelqu’un sur lui se pencha
bavant des insanités
attendues recopiées semblables

alors mourût le camelot

sur le miroir d’un grand fleuve orientalement en marche
on le déposera
lugubre cérémonie souffrante

à peine entré dans la vie il mourait
une marionnette au regard fixe
plus loin que les lents demains
enfilée à la main gauche

sophia
hautement vêtue dans les nues azurées
touchera du bout de ses doigts invisibles
le regard mathématiquement chiffré d’un enfant se raidissant

le transportera

au-delà des fils actionnés

au-dedans du delà fantoche

l’imprégnant d’une couleur origan



un camelot flottant entre huit idées perdues

flottant
entre et sur les os
,inconnu,
en route vers, sur et par les eaux glacées d’un pays clos
où se cachent des marionnettes intemporelles

flottait
cet enfant mort
cadavre ossuaire

il flottait
de l’immuable à l’imperméable
nouveau pensionnaire du guignol



boris
,au poignet,
sophia,
,l’inconnue,
au cœur



le camelot de cire
comme un Icare sans ailes
repose là
tout à côté
tout juste là
dans le silence des cieux

le ciel,
échiffre de ses yeux



- boris, je te suivais dans le peu de pas que la vie m’a donnés et tu me suivais dans le peu de mouvements que ma main te donnait -je te vêtais des mêmes habits semblables à ceux de tes premiers jours, de mes derniers jours, - nous nous suivions dans des allées incertaines, dans des avenues dessinées à même les nuits, à même les matins, toujours les mêmes, où je me fatiguais à me lever, à reprendre dans ma main tes fils flasques et partir vers les enclos de ma ville, toujours et toujours la même sacoche rouge accrochée au bras, regard bleu vers un soleil timide, sourire malade de ces souffrances grouillant dans mes os - je me racontais sans écoute, tu m’écoutais boris, leucomes dans tes pupilles agrandies et noires et immobiles et inertes, regard dilaté

- je te parlais avec des mots-images imaginaires cueillis à l’ a b é c é d a i r e de mes incertitudes



comme les kilomètres sont courts derrière des chevaux de bois
à entendre les marionnettes se taire



et sophia
dans de grands mouvements espagnols et musicaux
racontera en un langage inconnu
tel celui des médecins ne connaissant des maladies que les mots
si peu les souffrances enfantines



comme les kilomètres sont courts

quand sophia
exhalant des étrangetés innommées
dira la mort à la vie qui s’en va



- sophia, je te parlais à toi dont je ne connaissais ni le nom ni la provenance, te disant ma souffrance parce qu’une mère, parce qu’un père ne peuvent la recevoir, trop encore emprisonnés dans les filets de leur angoisse, me disaient de te parler à toi sophia, te dire je ne sais quoi avec des mots en cire, ceux d’un enfant qui meurt, te dire le mal qui chatouillait mes os et se préparait à me catapulter hors de moi-même, me versant comme le feraient trois notes de violon sur de longues remontées vers là où je ne croyais pas si rapidement aller, une marionnette entourée à mon poignet - dans ce si froid matin automnal, les chiffres d’un matin mauve que l’on reconnaît bien lorsqu’il se lève du même côté, toujours le même côté, où je sentais l’entre réalité entrer, les chiffres parlant entre eux, tout est entre tout



la mort est un immense courant d’air
que des fenêtres asymétriques sur la patine des ruelles
calfeutrent
le voyant venir
à la tête d’un cortège sifflant
la mort s’enroba au camelot de cire
à la marionnette flasque
effilée
qui révulsait vers nulle part
des yeux desquels tombèrent des morceaux d'âme



- je ne sais ce qu'est une âme, jamais on ne me l'a dit, jamais tu ne me l'as dit boris, tu ne parlais pas, tu ne me parlais pas boris, c'est moi qui parlais, que moi qui te parlais boris - je ne sais pas c'est quoi la mort, ce satellite bleu - je sais encore moins sophia, ce conte dans lequel les anges, ces éclairs de brouillard placardés sur le vent, récupèrent les morceaux d’âme - suis-je? toujours un morceau d'âme - je suis où je ne sais pas il y a entre boris et moi, dans une gestuelle parlée indéchiffrable, d’éternelles incompréhensions : une clôture barbelée comme les murs d’une prison; une ruelle sans fin comme la prise stérile de la glace sur les eaux hybrides du fleuve; des regards ternes comme des huit inversés; verticalement perdus, des poteaux délimitant les mécaniques mouvements de mon bras; des géants peureux; des grouillements gutturaux de chats; des couinements monocordes d’écureuils; des tournoiements interminables d’oiseaux durcis autour de croûtes sulfurées; des ordres et des mots d’ordre; l’ordre uniforme du bien souillant le mal dans l’obscure clarté du matin triangulant les axes et les parallèles d’un quadrilatère sphérique



sont-ce? les sons qui font les mots
y donnent leur sens
comment? ici la mort peut-elle s’inscrire
et, ailleurs si proche, absente
devenir une ombre qui se blafarde dans les yeux
d’une marionnette triste maintenant
une goutte de néant à son doigt



- boris, t’en souvient-il? Comment ne peux-tu plus t’en souvenir? Nous passions de blanc à noir et tu t’accrochais au noir, ébène sans doute, telle une chambre noire continuellement enfermée sur moi et je te gardais précieusement - j’avais peur… et ton silence me protégeait de ce que je ne savais pas - j’avais mal… et ta présence mettait du silence sur mes os et des eaux à mes yeux que l’on séchait en pleurant, ne sachant trop qui devait moins souffrir - boris, j’ai appris à avoir mal avant toute autre chose et les autres choses ne sont jamais venues à moi dans la clarté artificielle de ma vie, de mes jours, de mes nuits… - j’ai appris que les mots n’ont pas de sens, que des sons… que les mots sont les squelettes de la réalité… que je ne saisissais rien de rien, rien à rien, ni les uns ni les autres… des musiques évanescentes au bout des corridors-prisons sur lesquels se désarticulaient de longues envolées d’oiseaux libres… et des chiffres, des chiffres encore et nombre de chiffres sur des gens inconnus d’eux-mêmes qui me regardaient piteusement de leurs regards rayons-x qui parlaient toujours autour de moi avec des mots dont je ne saisissais pas les symptômes… puis s’en allaient, quittaient, revenaient pour ensuite encore me quitter à la vitesse de la couleur… - j’ai ainsi appris à compter les gens, les couleurs blanches, les murs d’oiseaux et les musiques, celles bourrées de notes blanches… avec toi, boris, ma seule présence



mon colostrum…



sur le fleuve les horizons s’évanouissent
les couleurs se noient entre elles
quelque part entre blanc et gris et le gris-blanc

sait-on? distinguer l’eau d’un fleuve des autres eaux
plus loin, encore et toujours plus loin que couleurs et musiques



sophia
trace du blanc
puis du gris



- je n’arrive plus à voir même si je regarde dans la direction horizontale, celle que l’on m’a indiquée, la verticale étant réservée à d’autres, ceux qui n’ont pas ma cataracte, ceux qui peuvent lamentablement se traîner vers ce qui me sera interdit. Enfermé dans ma camisole isolante, baptisé par l’eau du silence, secouru des limbes, je ne vis ma souffrance que laciniée davantage et définitivement enroulée à mon poignet, à ma cheville. Je pris dès lors partie pour le mutisme, pour un mutisme intégral, obstiné. Je ne parlerai plus que par les yeux. Secs. Sans eaux. Je serai un ensemble d’os. Et par des sons sans sons, je n’exigerai qu’une marionnette. Sans fils. Sans regard. Noire. Pour mon poignet, le jour. Ma cheville, la nuit. boris. Je te savais déjà dans ma vie, autant que je savais sophia, hors de ma vie. Autant ma vie, déjà, sortait de moi, pour s’installer entre les chiffres, confortablement régularisée et prête à attendre. Qu’attendre. Attendre l’attente et lui demander à son tour d’attendre aussi. Et regarder par les yeux de boris, ceux dont on voit qu’ils ne bougeront jamais, cristal sous la roche. Au coin de toutes les ruelles. Sombres et sales. Je verrai qu’attendre n’a de sens que si rien ne vient.



de formidables bruits de sabots se précipitent
hors des catacombes des océans
personne ne les reconnaît
seul ne les entend
qu’un camelot naissant dans la cire du sans rien dire
tel un soliflore
il penche sa tête de côté
tend une main blanche
ouverte
à l’immuabilité
à une marionnette
noire
fermée



une sacoche rouge tranche sur le blanc du lit

les architectes universels dessinent
avec des crayons de cire
sur un corps immobile
toute une série de chiffres nubiles



- je pris la décision de ne plus ressentir mes souffrances, de ne les reconnaître que par les yeux des autres, les insensibiliser et les nommer boris. Et on racontait… me racontait… et je n’écoutais pas, je n’écoutais plus déjà. Je regardais au-delà des murs et jetais mes yeux dans les eaux du fleuve, fleuve que personne ne voyait, ne s’attardant, ne s’intéressant qu’à ma bizarrerie. Mes parents-architectes s’immobilisaient devant moi… ne reconnaissant plus mes odeurs ils sentaient que j’allais dès ce moment devenir cet être de ruelles aux gestes mécaniques, amoureux fébrile d’une marionnette noire qui rêve d’un cheval de bois.


Merci d'avoir si longtemps attendu!

Au prochain saut


















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