Otium # 7
* Thème : libre
* Forme : sonnet
* Date de présentation : 15 / 03 / 21
Quelles sont les règles du sonnet ?
Le sonnet doit respecter plusieurs règles strictes :
2.- entièrement formés d'alexandrins (vers de douze syllabes) ;
3.- une disposition des rimes particulière : ABBA ABBA CCD EDE ;
4.- l'alternance des rimes masculines et féminines.
EXEMPLES
A M. A. T.
Ainsi, mon cher ami, vous allez donc partir !
Adieu ; laissez les sots blâmer votre folie.
Quel que soit le chemin, quel que soit l’avenir,
Le seul guide en ce monde est la main d’une amie.
Vous me laissez pourtant bien seul, moi qui m’ennuie.
Mais qu’importe ? L’espoir de vous voir revenir
Me donnera, malgré les dégoûts de la vie,
Ce courage d’enfant qui consiste à vieillir.
Quelquefois seulement, près de votre maîtresse,
Souvenez-vous d’un coeur qui prouva sa noblesse
Mieux que l’épervier d’or dont mon casque est armé ;
Qui vous a tout de suite et librement aimé,
Dans la force et la fleur de la belle jeunesse,
Et qui dort maintenant à tout jamais fermé.
Alfred de Musset
Le dormeur du val
C'est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Arthur Rimbaud
Le Vaisseau d’or
Ce fut un grand Vaisseau taillé dans l'or massif :
Ses mâts touchaient l'azur, sur des mers inconnues ;
La Cyprine d'amour, cheveux épars, chairs nues,
S'étalait à sa proue, au soleil excessif.
Mais il vint une nuit frapper le grand écueil
Dans l'Océan trompeur où chantait la Sirène,
Et le naufrage horrible inclina sa carène
Aux profondeurs du Gouffre, immuable cercueil.
Ce fut un Vaisseau d'or, dont les flancs diaphanes
Révélaient des trésors que les marins profanes,
Dégoût, Haine et Névrose, entre eux ont disputé.
Que reste-t-il de lui dans la tempête brève ?
Qu'est devenu mon cœur, navire déserté ?
Hélas ! Il a sombré dans l'abîme du Rêve !
Émile Nelligan
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Le temps est un affreux voleur…
Au fond du placard, dans de vieilles boites gisent
Lettres et dessins d’antan, photos de famille
Parmi lesquels d’invisibles mites fourmillent
Faudrait-il tout reclasser dans des valises ?
Images ternies des exploits de jeunesse
Témoignages oubliés des émois premiers
Souvenirs doux à l’âme de l’intéressée
Mais pour ses suivants, quelle en est la richesse ?
Comment disposer de ces vestiges intimes ?
Que pèse la perte de ces traces minimes
Au regard de celle des biens universels?
Guerres, tsunamis, incendies et pandémies
L’homme et la nature ont la main cruelle
Et toute preuve de vie est vouée à l’oubli
Sonnet du XXI e siècle
Je rêve, tel le pape, de mon tour d’Irak.
Pourquoi dès qu’une idée de la tienne diffère
Te faut-il sortir l’artillerie incendiaire ?
Je suis à boutte de ta haine, tabarnak !
Protégé par la cuirasse de ton écran
Tu pistes femmes, filles, jeunes et étrangers
Et aussi ceux qui ont la force d’oser
Pour leur vomir ton fiel et ton ressentiment
Sûr que tous conspirent contre ta libarté
Tu entretiens un cercle d’animosité
Et vos paroles grinçantes minent l’espoir
Épandeur de noirceur, prophète de malheur
Essaie, pour voir, de renouveler tes histoires
Et d’alléger ton cœur de toute sa rancœur
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Sonnet pour un aidant
Suivre avec respect de l’âme les subtils méandres
Et dans ce dédale, toutes les humeurs du cœur
C’est vouloir saisir dans le présent et sans leurre
Toute la complexité de l’être humain, et tendre
À la pleine croissance de soi et à plus d’être
C’est voir la vie, le Soi, comme une si vraie offrande
Accueillir puis voir nos écueils en florilège
Et alors grandir, éprouver le privilège
D’accéder à l’autre, saisir par la relation
Car pour aider autrui, c’est d’abord s’aimer soi
La Nature voulant que chaque humain se pourvoit
De ce Grand Avoir inscrit en soi dès la naissance
Et puisse dans cet intime silence, la paix dans l’âme,
Offrir au divin son humble reconnaissance
Pierre
Matins chauds, midis brûlants, Toi, belle Ville !
Tes filles aux longs cheveux d’ébène soyeux
Tes garçons aux gestes mécaniques, habiles
Sous les regards émerveillés des hommes vieux.
Toi, Ville aux échoppes l’une sur l’autre culbutant
Aux odeurs si changeantes d’heure en heure ;
Tes grands arbres parasols, rieurs sous le vent,
Éclaboussent tout de leurs chatoyantes couleurs.
Tes enfants, pieds nus et revêtus de haillons,
Sur le feu du bitume roulent des ballons
Tout près des vieilles femmes aux mains crevassées
Embarrassant les obstacles de tes longs trottoirs.
Toi, Ville-Fille, ta noirceur de six heures du soir
I love you ! Même si la lune t’a décoiffée...
Jean (mars 2021)
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