samedi 18 avril 2020

Il ne faut pas parler de corde dans la maison du pendu - 1 -

Coronavirus: What it does to the body - BBC News

Il ne faut pas parler de corde 
dans la maison du pendu.
                                          

La période dans laquelle nous sommes tous plongés, Occidentaux comme Orientaux, est morbide. Le discours ambiant le manifeste de façon continue.

Dans le langage des Beaux-Arts, la “ morbidesse “ se définit comme de la mollesse, de la délicatesse dans le modelé, à propos, surtout, des figures de femmes et d’enfants.

Par son étymologie latine, on entend désordre physique ou malaise général, alors que de l’italien (morbido
la référence s’établit avec le beau, l’harmonieux, le délicat.

Michel Leiris, dans son livre L’ÂGE D’HOMME, écrit :

 Enfant, j’ai vu la Salomé de Strauss deux fois, à l’Opéra. La première fois avec la cantatrice italienne Gemmina Bellincioni qui en dégageait assez bien le côté morbide. “

Bien sûr, l’auteur use du figuré en l’associant à Salomé, dont le sens hébreu signifie “ paix “, n’est pas sans nous ramener à nos confinements.

Les mots sont tout.
Sans ceux, plus rien n’existe,
même les virus.

Dans certains endroits le confinement s’appelle l’isolation,
ailleurs, le couvre-feu,
partout c’est le même concept qui s’applique 
et il est de taille.

Les spécialistes décortiquent autant les causes que les conséquences du ralentissement du monde, de cette distanciation sociale qu’on mesure en mètres ou en énormes pertes, dont celles qui affectent les familles celles qui nous font souffrir plus que d’autres, surtout lorsqu’il s’agit du décès d’êtres chers qui ferment définitivement les yeux dans la plus grande réclusion.

Plusieurs questions ressortent des diverses expériences de confinement, mot qui, dans sa forme vieillotte, était associé à l’isolement des prisonniers.

Elles évoluent au fur et à mesure de la marche inaliénable du coronavirus, 
franchissant les frontières sans vergogne,
frappant tout un chacun sans égard à son statut social,
tuant de manière inéluctable.

Elles furent, au début de cette épidémie qui changea de robe pour devenir pandémie, de l’ordre du temps.
Combien de temps nous faudra-t-il pour fourbir l’arme de destruction massive qui nous en libérera ?
Vite un vaccin... mais c’est long !
Alors, un médicament pouvant, au moins, atténuer sa progression !
Sinon, la prière afin d’offrir à un être supérieur nos lamentations, nos supplications devant cette... punition !
Nous étions prêts à porter le cilice afin d’exiger la fin de ces cruelles mortifications !

Cela n’a eu aucun effet.
Les malades mourraient  
les aides autant humaines qu’hospitalières s’épuisaient.
Aucun bouclier pour faire rebondir l’invisible 
et si l’armure, devenue efficace, 
sur qui son ricochet aurait-il rebondi ?

Il aura fallu un certain temps pour admettre notre défaite et notre incompétence à combattre un ennemi qui savait s’infiltrer exactement à l’endroit vulnérable, notre souffle.

Et nous nous sommes essoufflés.
Il fallait se cacher,
se retrancher dans notre plus intime empire : chez soi.
Restons à la maison,
ne bougeons plus
et attendons.


Mais attendre quoi ?
L’esprit humain a la fâcheuse habitude de rarement s’arrêter de penser.
Il cherche des explications,
des raisonnements,
beaucoup d’informations,
tout comme il s’attend à être sécurisé.

C’est dans la sécurité qu’il échafaude les meilleures idées.

On a perdu un temps fou à trouver des responsables,
des coupables
ou le fameux patient zéro.
Comme si cela pouvait ralentir le rouleau dévastateur 
qui écrasait des milliers de gens.

On voulait savoir combien de morts
quotidiennement,
hebdomadairement,
depuis le début
et combien, selon tel ou tel scénario, allaient se retrouver, pour les plus chanceux, dans un cercueil au lieu de pourrir dans les rues vides, mais remplies de cadavres abandonnés.

Le temps... Oui. 
On y revient continuellement.

S’y est greffé la hantise du manque.
Manque d’argent,
manque de boulot,
manque de nourriture.
Seule la présence de nos très proches ne pouvait manquer,
eux aussi piétinant les quelques mètres carrés de nos maisons.
On a alors découvert la présence (distanciée) de nos voisins,
de ceux qui chantent sur le balcon,
qui arborent des drapeaux
des oripeaux sur lesquels des mots d’espoir se gravaient.

Le temps d’avant...

D’avant cette couronne qui nous ceint l’âme et manipule l’après.
Ce futur à l’avenir incertain, du fait qu’un virus, une fois apparu, cherche par ses nombreuses mutations génétiques, à se sédentariser.
Serions-nous contraints à devenir des casaniers impuissants ?
Serions-nous devenus, en l’espace de quelques semaines, des habitants d’un sous-marin errant dans des océans de peur,
des mers engouffrant nos solitudes ?

Ce temps d’avant...

on le répète, ne sera plus. Il faudra modifier en profondeur nos habitudes,
revoir nos certitudes
et repenser nos attitudes.

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