dimanche 31 mai 2015

QUATRE (4) CENT-SOIXANTE-QUATRE (64)


Tel qu'annoncé à l'effet que j'allais vous offrir quelques citations tirées de chacun des deux coups de foudre de mes lectures (mai 2014 à mai 2015), eh bien les voici. 
Cela ne interdit absolument pas de vous lancer dans leur lecture.








                                                                             






















L’ORIGINE DE LA VIOLENCE de  Fabrice Humbert 

- Lors d’un voyage scolaire en Allemagne, un jeune professeur, Nathan Fabre, découvre au camp de concentration de Buchenwald la photographie d’un détenu dont la ressemblance avec son propre père, Adrien, le stupéfie…Rentré en France, il retrouve son père, sa famille, mais le souvenir de la photographie ne le quitte plus. Il décide alors de se lancer dans une recherche qui va bouleverser sa vie.

Voici quelques extraits de ce livre à la fois déchirant d'émotion et garni d'inattendus à chacune des pages:

.  Le microscope a ceci de merveilleux qu’il nous enfonce dans un monde aux déclivités énormes, aux contours fabuleux, comme un conte visuel d’ordinaire inaccessible. La mince lamelle translucide, sur laquelle est déposée un minuscule fragment, révèle brutalement un univers, de sorte que l’infiniment petit recèle autant de richesses qu’une planète entière. Mais en même temps, l’œil collé à l’embout noir, absorbé par ce nouveau monde, ne voit plus rien de l’ancien.


   … si la mémoire s’arrêtait en même temps que meurent les générations, l’humanité n’existerait plus.

.  Rien de plus difficile pour un homme que l’espoir déçu.

.  Dans cette vision brève et ramassée, toutes les fantasmagories de l’horreur que j’avais cru déchiffrer dans le nazisme me revenaient : l’enfer, la bête, l’adoration de la mort, la destruction. Encore une fois j’avais la conviction que le nazisme n’était pas un événement ponctuel mais l’achèvement d’un Mal qui sinuait depuis l’origine dans le cœur de l’homme et qui se signalait aussi bien par ses ravages historiques que par ses manifestations esthétiques.

.  L’oubli, c’est ce qu’on a trouvé de mieux pour les secrets. Ce n’est pas de la lâcheté, c’est juste la voix de la vie. (…) … la mémoire est pour les morts ou les mourants, ‘oubli est pour les vivants. C’est valable pour les peuples comme pour les individus.




Mozart nous a offert LA TRISTESSE DES ANGES dans son Requiem pour un rêve:


www.youtube.com/watch?v=EwS8yZ3sUwk


Dans le livre La tristesse des anges qui fait suite au roman Entre ciel et terre, Jon Kalman Stefansson, auteur islandais, nous présente Jens le Postier arrivant au village. Accueilli par Helga et le gamin qui le détachent de sa monture avec laquelle il ne forme plus qu'un énorme glaçon. Sa prochaine tournée doit le mener vers les dangereux fjords du Nord. Il ne pourra pas les affronter sans l'assistance d'un habitué des sorties en mer.

Le gamin qui l'accompagnera dans son périple, découvre la poésie et prend peu à peu conscience de ses désirs. Il ira «là où l'Islande prend fin pour laisser place à l'éternel hiver». Malgré leurs différences, ils n'ont d'autre choix que de se raccrocher l'un à l'autre, face à l'impitoyable nature.


Au milieu des tempêtes enneigées islandaises, Jón Kalman Stefánsson fait naître une stupéfiante chaleur érotique. Mariant douceur et extrême, il restitue cette intense lumière qui «nous nourrit autant qu'elle nous torture».

La tristesse des anges de Stefansson, c'est la neige, un personnage important à l'extrême.

Voici des extraits parmi tant d'extraits que j'ai conservés de ce roman de la froidure, de la découverte des limites de la virilité





LA TRISTESSE DES ANGES de Jon Kalman Stefansson 

.  … la poésie ne nous rend pas humbles ou timides, mais sincères, c’est là son essence et son importance.

.  Nous mourons si nous n’écoutons pas ce qu’enseigne l’expérience, mais nous moisissons si nous y prêtons trop d’attention.

.  Nombreux sont ceux qui choisissent de se taire quand la vie leur inflige les plus cuisantes brûlures, d’ailleurs, les mots ne sont souvent que des pierres inertes, des vêtements élimés et usés. Ils peuvent également être de mauvaises herbes, de dangereux vecteurs d’infection, des planches vermoulues qui ne supporteraient même pas le poids d’une fourmi et d’autant moins celui d’un homme. Pourtant, ils sont l’une des rares choses qui demeurent à portée de main lorsque tout semble se jouer de nous. 

.  Gardez bien cela à l’esprit. N’oubliez pas non plus ce que nul ne comprend : les mots les plus insignifiants et les plus improbables peuvent, sans qu’on s’y attende, se charger d’un lourd fardeau et conduire la vie pour la sauver par-delà les plus vertigineuses crevasses.

.  Le destin peut toutefois tisser des liens inattendus, nous devons en être reconnaissants, sinon, bien des choses seraient prévisibles et l’air qui nous entoure ne connaîtrait que peu de mouvement, si peu qu’il en deviendrait vicié et que l’existence nous semblerait endormie et morne. L’étonnement et l’inattendu sont des forces physiques qui mettent l’air en mouvement et chargent la vie d’électricité.

.  … l’homme doit toujours souffler longuement sur les braises afin que le feu ne meure pas, quel que soit le nom qu’on lui donne : vie, amour, idéal, il n’y a que l’étincelle du désir qui s’éveille d’elle-même, l’air est son combustible et l’air enveloppe la terre.

.  Celui qui vit dans le doute n’arrive jamais à rien, il ne devient rien.

.  Tout comme l’homme, l’océan possède une chair sous la peau et il faut du temps pour se remettre d’un assaut. Il est rarement possible de juger les choses à leur surface, qu’il s’agisse de la mer ou de l’être humain, et par conséquent il est tellement facile d’être la proie d’une illusion qui peut nous coûter la vie ou le bonheur : je me suis donnée à toi car tu étais si doux et si beau en surface et me voilà désormais malheureuse; je suis parti en mer parce que les eaux étaient calmes, à présent je suis mort, je pleure dans les profondeurs parmi d’autres noyés, les poissons me traversent le corps.

.  Le meilleur moyen de s’assurer une vie aussi paisible qu’engourdie est de ne pas mettre en doute ce qui nous entoure – seul vit celui qui doute.

.  La poésie est un monde à l’arrière du monde.

.  La vie de l’homme n’est qu’une vague vibration de l’air, elle est si brève qu’elle passerait inaperçue aux anges s’ils fermaient un instant leurs paupières.

.  … il est vrai que les mots peuvent être tellement vacillants, tellement fragiles, il existe un tel abîme entre eux et les choses qui s’agitent au fond de vous, et cette distance est souvent source de regrettables malentendus, il arrive même qu’elle détruise des vies. Voilà pourquoi il vaut parfois mieux se taire et s’en remettre à ce que voient les yeux.

.  Serre-toi tout contre moi, le froid s’évanouira.
   Serre-toi tout contre moi, la solitude s’adoucira.
   Serre-toi là contre moi, la beauté règnera.
   Serre-toi bien contre moi, la mort ne m’effrayera.
   Serre-toi fort contre moi, et je trahirai tout.

.  … le pouvoir engendre invariablement l’injustice et, bien que la vie soit probablement belle, l’être humain est bien imparfait.

.  Le bonheur est éphémère mais l’amertume est plus tenace, elle t’est plus fidèle, elle ne t’abandonne pas, l’amour est un vacillement, la haine, un roc.


.  L’être humain est capable d’oublier la plupart des choses ou de les nier en fermant les yeux plutôt qu’en les ouvrant et il est presque toujours plus facile de détourner les yeux que de regarder, car celui qui regarde est forcé de reconnaître ce qu’il voit, ensuite, il n’a pas d’autre choix que de l’affronter.


À la prochaine











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